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ANALYSE

92

Vers une nouvelle approche
de la bibliographie nostradamique

par Jacques Halbronn

    De nombreuses pièces du corpus nostradamique ne nous sont conservées que par des commentaires. C’est le cas de la première Epître de Nostradamus à César, dont on a des passages grâce notamment à un Antoine Couillard, dans ses Prophéties (1556), c’est le cas des premières éditions des Centuries qu’on ne connaît que par le “tirage” d’un certain nombre de versets, qu’en fit un Antoine Crespin, pour ses Prophéties dédiées à la Puissance Divine, parues en 1572. C’est aussi le cas des éditions des années 1570 qu’on ne connaît que par une simple mention d’une édition “à dix centuries de prophéties par quatrains”, dans la Bibliothèque d’Antoine du Verdier (1585). Mais la liste n’est pas close et il ne faudrait pas croire que pour les cent ans qui suivirent on soit en possession de toutes les éditions des Centuries parues. Que sait-on ainsi, très exactement, de l’édition dont le Janus Gallicus commente un certain nombre de quatrains, en 1594 ? Que sait-on au siècle suivant de la date de la première édition des Sixains qui ne saurait être 1605, date figurant dans l’Epître à Henri IV ? Que sait-on enfin de l’édition reproduite en 1672 par Théophile de Garencières, dans laquelle la traduction anglaise fait suite à un texte français distinct des éditions françaises de l’époque et que l’on retrouve en partie reprise dans les années 1690, chez Antoine Besson.

Sommaire :

1 - L’édition des Centuries traduite par Théophile de Garencières
2 - L’édition des Centuries utilisée par le Janus Gallicus


1

L’édition des Centuries
traduite par Théophile de Garencières

    De combien de centuries et de combien de quatrains et autres strophes prophétiques se compose le canon nostradamique, sans compter les épîtres et sans parler des variantes dans la constitution même des pièces dénommées de telle ou telle façon ? De nos jours, le canon correspond à une phase de reflux, c’est-à-dire à un étiage assez bas, à savoir en dessous de mille quatrains, avec deux épîtres. Mais, au XVIIe siècle, il en était bien autrement et le seuil des mille strophes prophétiques était largement dépassé ainsi que celui de deux épîtres. On s’intéressera ici aux éditions les plus “riches” et on se demandera ce qui peut causer de telles fluctuations.

   Cette “richesse” des éditions du XVIIe siècle - ce qui pourrait correspondre à un âge d’or de la littérature nostradamique - se caractérise tant quant au nombre d’unités en prose ou en vers qu’à l’appareil biographique et exégétique, inclus dans les dites éditions, à savoir présence d’une Vie de l’Auteur et de commentaires, éléments qui, selon nous, sous une forme ou sous une autre, ont pu figurer dans les toutes premières éditions, tant il nous semble évident que le lancement des Centuries impliquait une certaine hagiographie affectant aussi bien la vie de Michel de Nostredame que la qualité prophétique de ses quatrains, autant de pièces qui sont absentes du canon “étroit” tel qu’il se mettra à peu près définitivement en place au XVIIIe siècle.

   Tous les nostradamologues qui se respectent ont entendu parler de l’anagramme relatif à Mazarin, lequel figure dans les derniers quatrains de la Centurie VII, au sein d’éditions se présentant comme parues à Lyon, en 1568, sans indication de libraire, avec au titre ! Les Prophéties de M. Michel Nostradamus. Médecin du Roy Charles IX & l’un des plus excellens qui furent jamais, formule qui semble avoir été empruntée à la traduction française de la pierre tombale latine, telle qu’elle figure dans le Brief Discours de la Vie de Michel de Nostredame. Ces éditions se référent donc à 1568 à l’instar des éditions troyennes Du Ruau et de l’édition antidatée à 1605, en raison de la présence des sixains.

   Benazra (RCN p. 210) signale la présence du Nirazam non pas dans une édition des Centuries mais dans La farce des courtisans de Pluton et leur pèlerinage en son royaume (p. 28), pamphlet paru en 1649.

   Rappelons la teneur du quatrain 42 d’une telle édition :

Quand Innocent tiendra le lieu de Pierre
Le Nirazam Cicilien (se verra
En grands honneurs) mais après il cherra
Dans le bourbiert d’une civille guerre

   Giffré de Rechac dénonça en 1656 ce quatrain dans son Eclaircissement des Véritables Quatrains de Maistre Michel Nostradamus (1656) :

“Il faut aussi retrancher deux nouveaux Quatrains, que durant le tumulte de Paris, l’an 1649 on fit courir dans Paris avec trop grande liberté. Les Imprimeurs les ont entrelassé (sic) dans la Cent. 7. entre le 41. & 42. Quatrain. C’est ainsi qu’ils prophétisent faussement

Quand Innocent tiendra le lieu de Pierre
Le Nizaram Sicilien se verra
En grands honneurs, mais après il cherra
Dans le bourbier d’une civile guerre.


Lutèce en Mars, Senateurs en crédit
Par une nuit Gaule sera troublée
Du grand Cresus l’Horoscope prédit
Par Saturnus, sa puissance exilée.

Par le premier quatrain ces esprits de loisir & malice vouloient dire qu’Innocent X estant Pape, le Nizaram Sicilien, qui est Mazarine; au rebours des lettres, periroit dans une guerre civile. Dieu mercy nous voyons qu’ils n’ont pas dit la vérité & qu’il en est sorty glorieux.”

   On aura noté la variante Nizaram au lieu de Nirazam et l’absence de parenthèses. Cette variante n’est pas signalée par les bibliographes susmentionnés.

   La question qui se pose est la suivante : est-ce qu’il s’agit d’une erreur de transcription de la part de l’auteur de l’Eclaircissement ? Certes, Giffré de Rechac a parfois tendance à “amender” les quatrains à sa guise1 mais on ne voit pas quel intérêt il aurait eu à changer Nirazam en Nizaram. A priori, Nirazam est plus probable, étant l’anagramme exact de Mazarin. Mais peut-être la ficelle sembla moins grosse avec Nizaram.2 S’agirait-il d’une simple erreur de copie de la part de Giffré de Rechac qui aurait été adoptée par Garencières ? Question complexe dans la mesure où l’anglais ne s’est appuyé que ponctuellement sur le dominicain, à savoir dans les cas où ce dernier fournissait un commentaire. Or c’est justement le cas pour ce quatrain. Dans les autres cas, Garencières devait nécessairement recourir à une édition des Centuries en bonne et due forme.

   On retrouve cette même version réchacienne dans la traduction anglaise de 1672 de Théophile de Garencières (p. 293), The True Prophecies or Prognostications of Michael Nostradamus etc. Certes, cette édition anglaise emprunte-t-elle substantiellement à Giffré de Rechac pour ce qui de l’explication de nombre de quatrains.

   Une légère variante au quatrain, qui est présenté successivement en français et en anglais :

Quand Innocent tiendra le lieu de Pierre
Le Nizaram Sicilian (sic) se verra
En grands honneurs, mais après il cherra
Dans le bourbier d’une civile guerre.

When Innocent shall hold the place of Peter
The Sicilian Nizaram shall see himself
In great honours but after that he shall fall
Into the dirt of a Civil war.

   En tout cas, Garencières ne semble nullement partager les doutes de Giffré de Rechac :

   “Nothing can be more plain and true than this Prophecie and those that deny it may deny the light of the Sun but to make it more evident, we will examine it verse by verse (...) The Sicilian Nizaram shall seee himself in great honours, that is the Sicilian Nizarim (sic) for Nizaram, is the Anagramme of Mazarin, letter for letter, who was born in Sicily, shall see himself in great honours as he did, for he was then in his greatest splendor.” (p. 294)

   Nous sommes là en présence d’éditions à 44 quatrains à la VIIe Centurie, à la différence des éditions à 42 quatrains, les plus répandues (Cahors, 1590, Antoine du Rosne, 1557, Bib. Univ. Utrecht, Benoist Rigaud, 1568), à 40 quatrains (Ed Antoine du Rosne, 1557, Bib. Budapest), à 39 quatrains (Ed. Chevillot “à la bibliothèque”, Bib. Lyon La Part Dieu), voire, sous la forme d’origine, à 35 quatrains (Ed. D’Anvers, 1590, Bib. Arsenal).

   Il existe une autre catégorie d’éditions à 44 quatrains, c’est notamment le cas de l’édition Antoine Besson, non datée (1691 au plus tôt). Les deux quatrains mazariniens y sont remplacés par ceux là (p. 95) et l’on désignera ce type d’édition comme “édition aux licornes” : Rappelons que les licornes correspondent à la monarchie et ici vraisemblablement aux dynasties, l’une s’arrêtant celle des Valois et l’autre se mettant en place, celle des Bourbons. Les premiers versets de chaque quatrain se contentent de brosser le décor, à savoir celui d’une France où règnent les Bourbons (44 : le bout sera fort bon : jeu de mots sur Bourbon). En réalité, ce sont les versets suivants qui importaient : on nous parle d’un neveu (43) et d’un supplice (44) :

Lors qu’on verra les deux licornes
L’une baillant, l’autre abaissant
Monde au milieus pilier aux bornes
S’ensuyra le neveu riant.

Alors qu’un bout sera fort bon
Portant en soi les marques de justice
De son sang lors portant son nom
Par suite injuste recevra son supplice.

   Il nous est apparu que ces éditions à 44 quatrains à la VIIe Centurie entretiennent entre elles certaines similitudes sur certains points en dehors du nombre de quatrains à la dite Centurie. C’est ainsi que la Préface à César, dans l’édition Besson, correspond à l’original français étudié par la traduction anglaise de Théophile de Garencières, alors que les quatrains de la VII, s’ils sont, dans les deux cas, au nombre de 44 ne sont pas les mêmes. Le problème, déjà signalé précédemment, c’est que l’on ne dispose pas de l’édition utilisée par Garencières, l’édition Besson appartenant aux années 1690, alors que l’édition londonienne est de 1672. Ajoutons cependant que The True Prophecies or Prognostications of Michael Nostrdamus comportent l’original français au dessus de la traduction, du moins pour ce qui est des quatrains et sixains. En revanche, on n’y trouve pas l’original français des épîtres en prose.

   Cette édition non conservée, peut-on en dessiner le profil ? On sait qu’elle comportait une variante en ce qui concerne l’anagramme mazarinien, par rapport aux autres éditions à 44 quatrains à la VII.

   Nous aurions donc trois types d’éditions à 44 quatrains à la VII :

- une édition avec Nizaram (trad. Anglaise Garencières, attestée par Giffré de Réchac)
- une édition avec Nirazam (édition conservée)3
- une édition aux licornes : avec préfaces à César et à Henri II canoniques (1627, 1650, 1667 et les éditions françaises reprises de celles d’Amsterdam comme celle de Jean Ribou, Paris, 1668)
- une édition aux licornes avec préface à César et à Henri II non canoniques (Besson, c 1691).

   Il semble que la première édition recensée d’une édition à 44 quatrains date de 1627 (Lyon, Jean Didier) et qu’elle ait été reprise dans l’édition de Leyde, puis d’Amsterdam (1667 et 1668 et donc après les éditions à 44 quatrains avec l’anagramme mazarinien. Cette édition de 1627 est amplifiée par rapport à l’édition Lyon Jean Poyet, à 42 quatrains, dont la vignette du premier volet est utilisée à trois reprises dans l’édition de 1627.

   Ces éditions “aux licornes” se caractérisent également par le fait qu’à l’Epître à Henri II, on a 1547 et non 1557.4

   Parmi les éditions à 44 quatrains à la VII, celle d’Antoine Besson est assez remarquable. Elle se rapproche, on l’a dit, de l’édition française telle qu’elle figure chez Théophile de Garencières, notamment pour ce qui est de la version de la Préface à César. Par ailleurs, de nombreuses variantes de certains versets centuriques se retrouvent à l’identique chez Besson et chez Garencières, tout en observant que Garencières, s’inspirant de l’Eclaircissement des véritables quatrains de Michel de Nostradamus de Jean Giffré de Rechac (1656), ce dernier reprenant certaines propositions du Janus Gallicus (1594), s’est parfois éloigné de son modèle, ce qui ne semble pas avoir été le cas de Besson, sauf peut-être en ce qui concerne sa version unique de l’Epître à Henri II dont on ne connaît aucun précédent et qui n’est, elle, pas attestée par Garencières. Selon nous, cette édition manquante est probablement liée au chevalier de Jant, dont la production nostradamique se situe justement au début des années 1670. Cette édition perdue comportait-elle Nizaram et non Nirazam ? L’édition Besson, pour sa part, s’en tient aux 44 quatrains de la version “aux licornes”.

Les quatrains terminaux de la VIIe Centurie

   Il semble que le dernier quatrain de la VII ait été généralement le suivant :

Deux de poisson saisis nouveaux venus
Dans la cuisine du grand Prince verser
Par le souillard tous deux au faict cogneus
Prins qui cuidoit de mort l’aisné vexer.

   Et que les additions n’aient pas été effectuées après ce quatrain mais en amont.

   On trouve en effet ce quatrain dans une édition troyenne Pierre Chevillot à 39 quatrains, en dernière position (BM La Part Dieu B 511975) tout comme dans l’édition Nirazam Cicilien qui se termine, malgré les additions, par ce même quatrain. Il est assez logique que l’on ait procédé ainsi de façon à ne pas générer de soupçon d’addition.

   En revanche, dans le cas des éditions à 44 quatrains “aux licornes”, les deux quatrains supplémentaires sont placés après le quatrain “au poisson”.

   Les éditions à 42 quatrains se terminent toutes par ce quatrain, y compris Antoine du Rosne, 1557 (Bib. Univ. Utrecht).

   L’édition Anvers, 1590, qui n’a que 35 quatrains, se termine avec le quatrain qui portera par la suite le numéro 40 :

Dedans tonneaux hors oingts d’huille & gresse
Seront vingt-un devant le port fermez
Au second guet par mort feront prouesse
Gaigner les portes & du guet assommez.

   Là encore, les additions préserveront un temps la dernière position de ce quatrain et s’effectueront en amont.5

   On aura donc eu trois quatrains terminaux :

1° - Le quatrain “Dedans tonneaux etc” (centurie VII de 35 à 40 quatrains) ex. St Jaure, Anvers à 35 quatrains, Antoine du Rosne 1557, Budapest.
2° - Le quatrain “Deux de poissons” (centurie VII de 39 à 44 quatrains) ex. Chevillot, sd. à 39 quatrains, Antoine du Rosne (Utrecht), Cahors 1590, Benoist Rigaud à 42 quatrains, Ed. Nirazam (1649) à 44 quatrains.
3° - Le quatrain “Alors qu’un bout sera fort bon” (Centurie VII à 44 quatrains) ex: Amsterdam 1668, à 44 quatrains.

   Rappelons que selon nous, la centurie VII était initialement à 35 quatrains et que c’est sous cette forme, du moins quant au nombre de quatrains sinon quant à leur contenu, qu’elle figura dans l’édition à Dix Centuries signalée par Du Verdier. Le changement de quatrain terminal permet de classer chronologiquement les éditions et il semble tout à fait hors de question que l’édition censée être du 6 septembre 1557 comportant le 2e quatrain terminal soit antérieure à l’autre édition censée être du 3 novembre 1557 comportant le Ier quatrain terminal. On voit donc que les derniers quatrains ne sont pas nécessairement aptes à fixer le contexte de la parution, étant donné que d’autres quatrains ont pu être interpolés sinon ajoutés par la suite. Il nous semble en tout cas que les centuries puissent difficilement être lues sans un commentaire approprié.

   La notion de quatrain terminal peut s’appliquer également à la Centurie XII laquelle s’achève par un quatrain numéroté 71 dans la plupart des éditions qui comportent cette douzième centurie, à partir des quatrains commentés dans le Janus Gallicus, mais le même quatrain terminal est numéroté 75 dans celle de Cologne, 1689 :

Fleuves rivières de mal feront obstacles
La vieille flame d’ire non appaisée
Courir en France, cecy comme d’oracles
Maisons, manoirs, palais, secte rasée.
6

   Notons que ce nombre de 71 qui correspondait au dernier quatrain de la XIIe Centurie - du moins au dernier abordé dans le Janus Gallicus - est aussi celui du nombre de quatrains de la VIe centurie dans les éditions parisiennes de la Ligue.

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2

L’édition des Centuries
utilisée par le Janus Gallicus

    Nous avons déjà disserté sur le décalage typographique entre les deux premiers volets centuriques7 et nous pensons qu’il s’agit d’un processus additionnel, diachronique et pas seulement synchronique. Au départ, ces éditions ne comportaient qu’un premier volet à 7 centuries, dans le prolongement des éditions ligueuses et de l’édition d’Anvers 1590. Puis, vint s’ajouter un second volet à 3 centuries, d’où son sous-titre “Centuries VIII. IX. X”. Le Janus Gallicus de 1594 s’articule sur ces deux volets mais il n’est pas certain pour autant que dès 1594 ait existé une édition à dix Centuries dont neuf pleines. On remarquera que la lecture du JG vient confirmer le clivage politique entre les deux volets puisque l’Epître à d’Ornano, constitue une sorte de second volet et concerne la victoire des Vendômes sur les Lorrains est extrait des Centuries VIII-X, la dite Epître étant reprise d’une publication de Jean-Aimé de Chavigny, datée de 1595 : Prognostication de l’Advenement à la Couronne de France de très illustre & tres généreux Prince Henry de Bourbon Roy de Navarre (...) le tout tiré des Centuries & autres commentaires de M. Michel de Nostredame, Paris, Pierre Sevestre.8 S’agit-il d’un extrait de l’Epître à d’Ornano ou au contraire n’est-ce pas une pièce, datée du 19 février 1594, intégrée par la suite dans le JG ?

   Il y a là un problème délicat de chronologie : est-ce que la parution du JG au plus tôt en août 1594 - l’imprimatur datant du 21 juillet 1594, donc quelques mois après la première parution de l’Epître à d’Ornano, datée, on l’a vu, de février de cette même année, est la preuve qu’une édition à deux volets existait déjà à l’époque ? Or, si l’on en croit la chronologie des éditions Rigaud, le second volet ne parut qu’en 1596. Par ailleurs, dans le Discours de la Vérité des Causes et effects des décadences, mutations, changements de Claude Duret, Lyon, Benoist Rigaud, il est question, dès 1595, d’un “discours de nouvel imprimé intitulé la première face du Ianus François” (p. 393). Il faut probablement comprendre “de nouvel”, par récemment, plutôt qu’à nouveau.

   On soulignera le fait que le Janus Gallicus interprète de nombreux Présages alors qu’on n’a conservé aucune édition de cette époque des dits Présages, les seules éditions connues étant précisément extraites du Janus Gallicus et pour cette raison incomplètes.

   L’on notera9 que si l’on considère l’édition Benoist Rigaud qui paraît à cette époque - dont aucun exemplaire ne semble avoir été conservé, celui de la Harry Price Collection de la Bibliothèque de l’Université de Londres étant en réalité une édition Héritiers Benoist Rigaud 1597 - on note que le premier volet est daté de 1594 et le second de 1596, année où le Janus Gallicus est réédité et élagué de sa partie latine, sous le nouveau titre de Commentaires du Sieur de Chavigny sur les Centuries et Prognostications de feu M. Michel de Nostradamus, Paris, Gilles Robinot et Paris, Anthoine du Breuil. Il est possible que ce décalage initial se soit répercuté sur les éditions suivantes au niveau d’un différentiel typographique lequel se maintiendra un certain temps. L’édition antidatée de semble être issue de cette époque, de par le dit décalage, ce qui n’est pas le cas de l’édition Pierre Rigaud 1566 laquelle offre une homogénéité de composition et qui date du XVIIIe siècle. On peut d’ailleurs considérer que l’édition Benoist Rigaud 1568 est la reproduction antidatée de l’édition Benoist Rigaud 1594-1596, la date de 1568 étant probablement une erreur de copie par rapport à une édition 1558, par ailleurs disparue, erreur véhiculée par la Bibliothèque de Du Verdier (1585), laquelle mentionne une édition Benoist Rigaud en dix centuries, Lyon, 1568; encore faudrait-il savoir si c’est Du Verdier qui s’est trompé ou bien si l’édition en question qui comportait déjà une telle erreur, laquelle édition n’a pas été conservée, édition antérieure aux éditions 1588-1589 et comportant probablement 71 quatrains seulement à la VIe Centurie et 39 quatrains à la IVe Centurie et, par conséquent, fort différente de l’édition à 942 quatrains Benoist Rigaud 1594-1596. Signalons les éditions intitulées Les Vrayes Centuries et Prophéties de Maistre Michel Nostradamus Revues & corrigées suyvant les premières éditions imprimées en Avignon en l’an 1556 & à Lyon en l’an 1558 (comme celle d’Amsterdam, 1668) - l’édition Jean Ribou, 1668, introduit une coquille : “en Avignon en l’an 1558” au lieu de 1556 - et Les Vrayes Centuries de Me Michel Nostradamus (...) Revues & corrigées suyvant les premières éditions imprimées en Avignon en l’an 1556 (sic) & à Lyon en l’an 1558; on a des raisons de penser que 1558 a été corrompu en 1568. Par la suite, la mention des années d’édition sera “modernisée” comme dans l’édition de Cologne, chez Jean Volcker : “revues & corrigées suivant les éditions imprimées à Lyon l’an 1644 & à Amsterdam l’an 1668”, édition à 44 quatrains “aux licornes” et se référant à l’édition d’Amsterdam.

   Que nous apprennent de telles références à 1556 ou à 1558 et pourquoi pas à 1568 ? Il semble qu’il y ait là deux traditions. Le couple 1556-1558 semble correspondre aux éditions à deux épîtres10, donc être tardif. On trouve une référence à 1555, à la fin de l’édition anversoise, laquelle est introduite par une Préface à César datée de 1555. Il semble que notamment dans les éditions non datées en page de titre, on se reportait à la date indiquée en fin d’épître. Les éditions sans date ne comportant que l’Epître à Henri II pouvaient donc être datées à 1558, laquelle année figure en fin d’épître. Nous ne pensons pas pour notre part qu’il y ait jamais eu d’édition authentique datée de 1568. Les premières éditions comportant une Epître à Henri II ont du paraître au début des années 1570 et le texte de la dite Epître devait correspondre à celui qui sera publié à la fin du XVIIe siècle par le libraire lyonnais Antoine Besson et qui est datée du 27 juin 1558 comme c’est le cas pour toutes les éditions centuriques de la dite Epître.

   On sera passé d’une édition à deux volets à une édition à trois volets, au plus tôt au cours de la deuxième décennie du XVIIe siècle, avec l’intégration des sixains au sein d’un troisième volet. On pourrait relier cette édition de aux éditions troyennes si ces dernières ne comportaient pas “Prophéties de M. Michel Nostradamus” au lieu de “Prophéties de Michel Nostradamus”.

   Rappelons, en effet, que la première édition “aux licornes”, Lyon, 1627 comportait les trois volets suivants :

Les Prophéties de M° Michel Nostradamus Dont il y en a trois cens qui n’ont encores iamais esté imprimées, A Lyon, Jean Didier.
Les Prophéties de M° Michel Nostradamus. Centuries VIII, IX & X Qui n’ont encores iamais esté imprimées, A Lion, 1627.
Les Prophéties de M° Michel Nostradamus pour les ans courans en ce siècle XI, à Lyon, 1627.

   C’est un des rares cas d’une édition structurée en trois volets, comportant chacun une vignette ainsi que la mention d’une année, encore que le nom du libraire ne figure point sur les deuxième et troisième volets.

   L’édition 1627 se distingue des éditions à deux volets datées de la dernière décennie du XVIe siècle et du début du XVIIe siècle par le fait qu’on y trouve une unité typographique entre les deux premiers volets absente des dites éditions. Les éditions troyennes offrent également une telle unité. Signalons une autre édition à 44 quatrains “aux licornes”, mais avec le titre des éditions de type Rigaud : Les Prophéties de M. Michel Nostradamus, Lyon, 1698. (British Library, 8610 a 15).

   A la différence, cependant, des autres éditions “aux licornes”, chaque volet est introduit par une Epître et non point deux épîtres ensemble ainsi que la Vie de Nostradamus laquelle ne figure pas dans l’édition 1627, laquelle est à l’origine des éditions hollandaises. C’est dire que les éditions à 44 quatrains et à trois volets, comportant l’année 1547 et non 1557 dans l’Epître à Henri II, occupèrent, notamment à l’étranger, une place certaine : c’est dans ces éditions que l’on trouve les célèbres frontispices célébrant la confirmation des Centuries du fait notamment de l’exécution du roi d’Angleterre (1649) ; une des dernières éditions de cette série - avec celle de Turin, en 1720 - parut à Rouen, chez J. B. Besongne en 171011, avec le frontispice ; au delà de cette date, l’édition nostradamique en reviendra à l’état prévalant à la fin du XVIe siècle. En réalité, les Prophéties (...) divisées en dix Centuries, titre utilisé en 1794 et sous l’Empire - avec la mention “nouvelle édition imprimée d’après la copie de la première édition faite sous les yeux de César Nostradamus son fils en 1568”12, n’occuperont pas tout le terrain : en 1780, une édition reprise de l’édition Chevillot “à la bibliothèque”13, est mise sur le marché, après un délai d’environ un siècle et demi :

Prophéties de Michel Nostradamus dont il y en a trois cens qui n’ont jamais esté imprimées trouvées en une Bibliothecque (sic) laissée par l’Autheur. Riom, et Clermont, et se vendant à Paris, chez les marchands de nouveautés.14

   On y a remplacé “trouvez en une Bibliotheque delaissez (sic) par l’Autheur” par “trouvées en une Bibliothecque (sic) laissée par l’Autheur” et ajouté, pour faire bonne mesure, “nouvelle édition d’après un exemplaire trouvé dans la Bibliothèque du célèbre Pascal” ; le fait est que cette édition Chevillot, à 39 quatrains et non 42 comme l’autre édition Chevillot plus connue, a bien du être trouvée dans une bibliothèque. Le fait de citer Pascal est lié, selon nous, à la parution, à Clermont (Ferrand) qui y naquit en 1623 et fit des expériences sur le Puy de Dôme.(1648). En 1780, la centurie VII a 46 quatrains, du fait qu’on y a inclus les 4 quatrains en annexe, originellement présents dans l’almanach pour 1561, puis figurant dans les éditions parisiennes de 1588 et 1589. Cette réédition nous intéresse en ce qu’elle démontre la possibilité d’une réemergence d’une édition ancienne, comme cela put se produire notamment avec l’édition Antoine Besson. Ainsi, les éditions aux sixains ne disparurent-elles pas dans les années 1710 - 1720, elles vont connaître un nouveau souffle à la veille et au lendemain de la Révolution : en 1792, la dite édition reparaît toujours dans le Massif Central15 puis en 1815, cette fois à Avignon (BNF, Ye 28646). On peut se demander quelle fut la diffusion de telles éditions émanant d’imprimeurs ayant probablement un assez faible rayon d’action.

   Quel contraste, tout de même, entre les éditions du XVIIIe siècle dépouillées des diverses additions et de toute illustration, et la série des Vrayes Centuries et Prophéties, sensiblement plus pléthorique, série à ne pas confondre avec celle à 42 quatrains à la VII et intitulée Les vrayes Centuries de Me Michel Nostradamus, Rouen J. Cailloué, Jean Viret, Jacques Besongne, BM Lyon La Part Dieu. Tout se passe au XVIIIe siècle comme si l’on avait voulu renouer avec les éditions de la fin du XVIe siècle. En réalité, les choses ne durent pas se passer ainsi : les faussaires se contentant probablement de reproduire une édition paraissant plus ancienne et datée de 1568 et considérant que les éditions du XVIIe siècle en leur possession comportaient des éléments qui étaient absents de l’édition de 1568 et qui paraissaient avoir été effectivement rajoutés, ce qui ne pouvait que conforter son caractère d’ancienneté. Concernant les ajouts, la méthode n’était pas mauvaise; encore eut-il fallu que l’élagage fût conduit à son terme et restituât l’état des premières éditions des Centuries, recoupant la compilation crespinienne (cf. supra). Dès lors que la tâche n’était pas conduite à son terme, les éditions du XVIIIe siècle et leurs rejetons antidaté, eux-mêmes issus d’éditions de la fin du XVIe siècle, se présentent comme un état assez bâtard, en ce que les dites éditions ne comportent ni les Présages, ni les Sixains ni bien d’autres quatrains figurant en certaines éditions, notamment les parisiennes de 1588-1589 et que par ailleurs, elles ne sauraient correspondre pour autant à un état premier des Centuries. Les contrefaçons du XVIIIe siècle restituent-elles un état datant de la dernière décennie du XVIe siècle, l’édition Pierre Rigaud étant vraisemblablement reprise, mais sans le décalage typographique entre les deux volets, d’une édition Benoist Rigaud datant de cette époque et reproduite par Michel Chomarat (Lyon, Ed. Chomarat, 2000) ? Conviendrait-il de dater le second volet au plus tôt de 1596 une édition Benoist Rigaud, 1568, laquelle constitue le canon à dix centuries, généralement utilisé par les exégètes ?

   Selon nous, on ne possède pas le second volet authentique de l’édition Benoît Rigaud 1568 et la raison en est simple, c’est que les éditions qui suivirent (Héritiers Benoist Rigaud, Pierre Rigaud, Chevillot etc ) ne comportent pas les traits de la dite édition dont ils reprennent le premier volet à l’identique, quant à la disposition des quatrains. En effet, l’exemplaire reprinté par Chomarat offre une particularité tout à fait remarquable et qui ne semble pas avoir été signalée jusqu’à présent, à savoir que ses strophes ne sont jamais placées à cheval sur deux pages comme on l’observe notamment dans les éditions Héritiers Rigaud et Pierre Rigaud (fin XVIe-début XVIIe siècle) mais aussi chez Chevillot. Cette pratique qui évoque celle des jardins à la française et qui exige une certaine discipline de la part du typographe n’était pas encore en vigueur dans les éditions des Centuries de cette période, elle ne se répandra que dans le cours du XVIIe siècle. Les contrefaçons datées de 1555 et 1557 présentent un tel désordre, ce qui montre qu’elles appartiennent bien aux dernières décennies du XVIe siècle. Force donc est de découpler le premier et le second volet de l’édition considérée Benoist Rigaud 1568 et de la placer dans la ligne des éditions du siècle suivant et nullement comme leur précurseur. Nous avons déjà signalé, en une autre étude, le caractère atypique de la typographie de l’Epître à Henri II de cette même édition, laquelle ne respecte pas le recours à deux polices de caractère correspondant au bilinguisme franco-latin. Or, l’édition Héritiers Benoist Rigaud, qui est presque contemporaine des éditions Benoist Rigaud 1594-1596, et dont on peut raisonnablement penser qu’elle est un clone de la précédente édition - ce qui est vrai pour le premier volet - est très nettement différente, sinon en son contenu du moins en sa présentation, en ce qui concerne le second volet, tant pour la disposition des quatrains que pour celle de l’Epître en prose, avec citations latines. Et il en est de même, de l’édition Pierre Rigaud, laquelle se situe dans la lignée de la dite édition Benoist Rigaud non conservée et qui ne correspondait certainement pas, du moins pour le second volet, à l’édition “canonique” Benoist Rigaud. Reste la question de la mention de l’année 1568, laquelle, cette fois, ne figure que sur la page de titre du premier volet. Force est de constater qu’une telle mention ne figure pas sur le premier volet des éditions à deux volets de la fin du XVIe siècle et ce jusqu’en 1627 et là encore nous avons la faiblesse de penser que si l’édition Benoist Rigaud est la plus ancienne du corpus, du fait de la période d’activité du libraire lyonnais, qui s’arrête en 1596, ce qui impliquerait d’ailleurs que l’édition du second volet aurait été une de ses toutes dernières réalisations, la mention de 1568 aurait du être reprise. Or, cette mention n’apparaît que dans les éditions troyennes Pierre Du Ruau (y compris l’édition antidatée de 1605) qui ne sont pas des éditions à dix centuries.

   Pour conclure - à partir de ce chronème typographique qui devrait satisfaire les amateurs d’approches liées non pas au contenu mais à la forme - sur la question Benoist Rigaud - et il n’est pas inutile de faire le point aussi souvent que possible - l’exemplaire reprinté par M. Chomarat, en son second volet, ne date pas de 1568 et pas davantage des années 1590, il appartient à une période qu’il faut probablement situer au XVIIIe siècle, qui voit une résurgence rigaldienne ; il est en tout cas marqué par des pratiques de composition typographique des éditions des Centuries qui ne sont pas attestées avant le milieu du XVIIe siècle. C’est ainsi que l’édition de 1627 offre un désordre typographique qui n’existe pas dans la présentation des strophes du second volet Benoist Rigaud. L’édition Rouen Cailloué-Viret-Besogne 1649 s’en rapproche beaucoup plus. Si les éditions Chevillot sont, concernant la présentation des quatrains du second volet, proches du genre Héritiers Benoist Rigaud.

   Il nous faut nous arrêter sur l’édition non datée, chez Jean Poyet, à Lyon.16 Ce libraire exerça à Lyon de 1601 à 161417, l’édition des Centuries en question comporte un agencement très “moderne”, c’est-à-dire très régulier et ce pour les deux volets, qui tranche avec le désordre des éditions Rigaud de la fin du XVIe siècle, ainsi qu’avec l’édition de 1627 avec laquelle il a en commun la vignette du premier volet. On se demandera si ce n’est pas finalement Du Ruau qui aurait lancé cette édition Benoist Rigaud 1568 car n’est-ce pas le même Du Ruau qui publia une édition antidatée de 1605 intitulée Les Prophéties de M. Michel Nostradamus reveues & corrigées sur la coppie imprimée à Lyon par Benoist Rigaud. 1568 mais cette édition présente une disposition des quatrains encore irrégulière, aux deux volets. Or en 1605, Jean Poyet était en activité à Lyon. Par la suite, Du Ruau, sous son nom, publiera une édition non datée - également dotée d’un troisième volet, avec le même titre que l’édition 1605, avec la même référence à Benoist Rigaud, 1568. En fait, l’édition Benoist Rigaud 1568 à dix centuries serait marquée au premier volet par l’édition 1605, elle -même très proche des éditions rigaldiennes et pour le second volet se rapprocherait d’une édition type Poyet. Chacune de ces éditions obéit à une politique cohérente quant à l’agencement des quatrains et tout se passe donc comme si l’édition canonique Benoist Rigaud 1568 avait emprunté la conception du premier volet à la série rigaldienne-Du Ruau et celle du second à l’édition Poyet. Nous pensons qu’on ne peut expliquer une telle distorsion entre les deux volets que par un souci d’économie et un problème de stocks dépareillés qu’il fallait écouler ; nous avons par ailleurs signalé le très piètre état de la composition de l’Epître à Henri II dans l’édition canonique en question.

   Il convient de ne pas s’obnubiler sur la date de 1605 : le fait qu’elle comporte des sixains ne saurait conduire à dater les éditions sans les dits sixains d’avant 1605.18 En réalité, la présence de ces sixains, dont la diffusion ne semble pas pouvoir être antérieure à 1614 et l’intégration dans le corpus centurique est plus tardive encore, montre que l’on ne peut accepter cette date.

   On ajoutera que le libraire Poyet, comme le note Baudrier, recourait à des éléments propres à Macé Bonhomme, ce qui montre que ce libraire lyonnais avait bel et bien laissé des traces à la fin du XVIe siècle dans le milieu de la libraire lyonnaise : on pourrait ainsi éventuellement expliquer le choix de ce libraire pour endosser la contrefaçon datée de 1555.

   En tout état de cause, qu’on nous explique donc pourquoi le premier volet Benoist Rigaud ne ressemble pas au second et se rapproche d’éditions non attestées au XVIe siècle. Prenons ainsi le second volet de l’édition Cahors 1590, on trouve cette présentation “à cheval” des quatrains et non pas l’agencement classique propre au second volet Benoist Rigaud. Or, dans l’édition Pierre Rigaud 1566 (BNF exemplaire numérisé, Numm 70441), on a également un agencement “à cheval” pour les deux volets, ce qui nous conduit à penser que la fausse édition Benoist Rigaud 1568 n’est pas le fait d’une production avignonnaise du XVIIIe siècle mais appartient à une période qui se situe dans la première moitié du XVIIe siècle, ce serait en fait la première occurrence des éditions se référant à Benoist Rigaud19 et à 1568 à ce détail près qu’elle ne comporte pas encore les sixains ; elle serait donc à peu près contemporaine de l’édition Poyet (cf. supra), soit au plus tard au début des années 1620. Rappelons que le premier XVIIe siècle sera marqué, bien après la fin de l’activité Benoist Rigaud (c 1596) par une référence insistante à ce libraire lyonnais et à l’année 1568 avant de laisser la place au siècle suivant à Pierre Rigaud et à l’année 1566, référence qui marquera également le XIXe siècle, notamment chez Torné-Chavigny (Bordeaux, 1862) et Anatole Le Pelletier.20

   On voit qu’une bibliographie nostradamique qui ne relève pas de telles particularités sera difficilement utilisable, ce qui nous permet de souligner à quel point un travail de recension se caractérise par les critères retenus et ne vaut que par la pertinence de ses choix ; le fait d’avoir négligé21 - sauf au titre - les particularités typographiques (indication des polices de caractère dans les épîtres, agencement des quatrains dans la page, description différentiée des deux premiers volets, etc) aura contribué à un certain piétinement de la recherche nostradamologique, au cours des années 1990.

   Dans “Plutarque et la Lettre à Henri II”, Robert Benazra réagit à notre récente étude consacrée aux années 1570 (Espace Nostradamus). Contrairement à ce que nous fait dire R. B., nous ne pensons pas - que l’Epître centurique à Henri II soit parue “avant 1570”; bien au contraire, nous avons rejeté cette idée que nous avions prise en compte antérieurement. En ce qui concerne la question de la corruption de 1782 en 1792, nous nous attendions à ce que cela déclenche une levée de boucliers22 puisque cette date “colle magnifiquement”, selon la formule de R. B., avec une Révolution annoncée. Alors, on nous explique que 1792 est une date qui “n’est point transcrite en chiffres mais en lettres : “l’an mil sept cens nonante deux”, ce qui exclut de fait toute erreur de transcription”. Le problème, c’est que l’erreur s’est faite au niveau de 1782, écrit en chiffres et recopié en lettres et non l’inverse ! A propos de 1792, on sait par ailleurs que la fin du XVIIIe siècle avait été une cible du prophétisme chez un Pierre d’Ailly, un Pierre Turrel, un Richard Roussat, comme le rappelle R. Amadou. “Point de 1789, point de 1791, chez Nostradamus, donc, contre toute attente ? Mais bien 1792 (...) Cette année-là est la première de l’ère républicaine, rappellent les bienveillants ou les complaisants. Le calendrier républicain mérite-t-il ou cet excès d’honneur ou cette indignité ?” Il ne nous semble pas très sérieux, à moins de basculer dans un certain obscurantisme empirique, d’attribuer à Nostradamus une date qui ne fait pas sens d’un point de vue astrologique et qui ne reprend pas l’échéance de Pierre d’Ailly, ce qui aurait au moins respecté une certaine tradition prophétique. Nous persistons et signons : c’est 1782 qui était la date dont il s’agissait et qui faisait sens pour les contemporains de la Grande Conjonction des années 1580, chaque cycle Jupiter-Saturne étant de 200 ans, c’était une façon de baliser le règne d’une nouvelle triplicité, liée à l’occupation de signes de même élément, formant triangle.

   Puis, R. B. revient sur l’affaire Antoine Besson et de la version qu’il publie de l’Epître à Henri II et qui est sensiblement plus courte que l’Epître canonique. Il nous parle de passages “empruntés” - c’est son expression - par l’Epître Besson à la dite Epître canonique, se refusant à envisager qu’il pourrait s’agir de l’inverse alors que le texte Besson est bien plus cohérent que l’autre - ce qui ressort de la source plutarquienne mieux rendue - tout comme il déclare qu’il “manque” au texte Besson 95% de l’Epître qu’il aurait ainsi tronquée, sans accepter d’envisager la thèse inverse. Pourquoi, dans ce cas, ne pas aussi soutenir que l’Epître à Henri II en tête des Présages Merveilleux pour 1557 serait un abrégé de l’autre Epître à Henri II ?

   Pour en revenir à Plutarque, R. B. tire argument de la parution d’une édition latine en 1558 des Vies Parallèles, pour dater l’Epître à Henri II de cette année là, alors que bien des chercheurs ont renoncé à considérer cette date comme authentique, du fait qu’on n’en a pas d’édition avant la mort de MDN, et ce y compris en considérant les éditions dont la datation est douteuse. Bien pis, R. B. Laisse entendre que MDN aurait publié coup sur coup, deux Epître à Henri II, à moins de deux ans d’intervalle, ce qui est encore plus invraisemblable qu’une parution posthume d’une Epître restée longtemps inédite. Or, quand bien même, une source de l’Epître daterait de 1558, cela ne prouverait aucunement que la dite Epître aurait été rédigée à cette date, l’argument des dates concernant d’abord et avant tout l’impossibilité qu’un texte soit antérieur - et non pas postérieur - à une certaine date. Certes, Plutarque était-il accessible, en latin, avant 1572 mais sans une épître au Roi. Benazra laisserait ainsi entendre que c’est l’Epître de MDN au “roi de France régnant”, donc Henri II en 1558, qui aurait en quelque sorte inspiré celle qu’Amyot dédiera à Charles IX, avec sa traduction de Plutarque. Autrement dit, si on admet que la dite Epître au Roi, avec la référence à Lycurgue, serait parue en 1568, dans la fameuse édition Benoist Rigaud, Amyot aurait tout simplement commis un plagiat aux dépens de Nostradamus, lui empruntant l’argument de son épître de 1572 ! C’est bien plutôt le contraire qui a du se produire car ce n’est quand même pas Amyot qui a connu Lycurgue grâce à Nostradamus mais c’est bien Amyot qui pratiquait Plutarque. On est loin de la conclusion de R. B. “Cette référence (à) Lycurgue ne renvoie certainement pas à un texte publié après la mort de Nostradamus mais, au contraire, suggère la lecture par l’astrophile de Salon de Provence d’un ouvrage qui vit le jour au moment même où ce dernier rédigea sa lettre à Henri II”, lettre, rappelons-le, datée de juin 1558 et probablement faut-il entendre aussi que dès cette année là 1558 furent publiées les dix Centuries sous la forme canonique qu’on leur connaît et qui n’auraient été que reprises, à l’identique, dans l’édition Benoist Rigaud 1568 à moins d’admettre qu’il n’y ait pas eu pour autant de publication avant 1568 du second volet; ce qui renvoie à l’idée de publication posthume, puisque, rappelons-le, quand même, on n’a pas conservé d’édition datée de 1558 et qui serait parue quelques mois à peine après l’édition Antoine du Rosne, censée avoir été imprimée en novembre 1557 (exemplaire de Budapest). Rappelons que L’Androgyn de Dorat était également dédié à Charles IX et qu’il inspirera une fausse édition datée de 1570, comportant une Epître de Jean de Chevigny à Larcher, où l’on trouve repris et signalé selon la numérotation canonique, le quatrain 45 de la centurie II.23

   Dans le même article, R. Benazra revient sur la question de la thèse que nous défendons d’une publication posthume, fondée sur la “trop grande précision de certains quatrains supposés rédigés bien avant les années 1550-1560. Avec un tel état d’esprit on ne peut que supposer une publication posthume de quatrains.” A contrario, R. Benazra souhaiterait-il nous démontrer que tous les recoupements entre quatrains et événements postérieurs à 1558 seraient de l’ordre de la prophétie, est-ce donc là, pour lui, l’enjeu du débat ? Sommes-nous le seul à signaler de tels recoupements qu’il ne cite que nos seuls travaux et non ceux de Roger Prévost24 ou d’Ivan Cloulas25 ou encore de Fédéli d’Amore26 ? Si l’on prend le quatrain X, 39, comment ne pas voir qu’il est composé après la mort inopinée - autant que celle de son père Henri II - de François II (1544 - 1560), survenue à la fin de 1560 ?

Premier fils vesve malheureux mariage
Sans nuls enfans. Deux isles en discord
Avant dix huit incompetant eage
De l’autre pres plus bas sera l’accord.

   Que le JG. interprète ainsi (n° 65) : “Le Roy François II meurt d’un mal d’oreille le 14 de ce mois (de décembre) (....) Marié fort jeune n’ayant plus de 15 ans.” Catherine est veuve d’Henri II et son aîné, François II va succomber, sans laisser de descendance, bien que marié à Marie Stuart, fille de Marie de Guise et du roi d’Ecosse. D’aucuns affirment que ce quatrain de la Centrurie IX fut immédiatement identifié comme annonçant cette mort par un ambassadeur vénitien, ce qui supposerait que la centurie IX fut parue avant cette date et non pas, pour la première fois, en 1568. Certains auteurs américains n’hésitent pas à faire apparaître carrément la mention précise (selon la numérotation canonique) du dit quatrain dans une correspondance datée de 1560, produisant ainsi une véritable contrefaçon.27 On ne saurait, en ce qui nous concerne exclure l’existence d’une fausse édition datée de 1558 à dix centuries, comportant la seule Epître à Henri II, elle-même datée de juin 1558, et réalisée dans les années 1580, et dont l’année de parution aurait été corrompue en 1568 dans la Bibliothèque de Du Verdier (1585), nous ne croyons plus guère en effet à une édition parue en 1568 et optons pour une première édition à 6 centuries (I-III et VIII-X selon la numérotation canonique), au début des années 1570; introduite par la version Besson de l’Epître au Roi. Une telle prédiction concernant la mort de François II en 1560 a du contribuer au prestige des Centuries, surtout si le public pensait qu’elles dataient bel et bien de 1558 voire qu’elles avaient déjà été diffusées, sous une forme ou sous une autre, alors, au vu de ce qui était indiqué à la fin de la dite Epître.

   Que dire de la mention répétée, dans les Centuries IV ( quatrain 8) et VIII (quatrain 54), soit des quatrains faisant partie de ceux parus dès les années 1570, de Saint Quentin ville assez signifiante si elle n’avait été prise, un peu par hasard, par les Espagnols en 1557 ? Comment le quatrain 8 de la IV aurait-il pu exister avec cette mention dès 1555 ?

   Certes, nous comprenons bien qu’il ne faudrait pas pousser le raisonnement jusqu’à l’absurde et situer le quatrain comportant Varennes - cher à René Dumézil - après 1791, date de la fuite du Roi ! Idem pour le quatrain (IX, 49) qui aurait annoncé l’exécution du roi d’Angleterre, Charles Ier en 1649, dont l’authenticité ne saurait être remise en doute, sinon l’interprétation.28 Il est cependant des cas sur lesquels il est plus difficile de trancher comme pour le quatrain IX, 18 qui concerne un événement survenu en 1632 - l’exécution de Montmorency, dont le nom figure en clair. Or, ce quatrain - encore plus transparent que celui relatif à Mazarin, à la fin de la VIIe Centurie, mais cette fois, dans un nombre très limité d’éditions - tout comme d’ailleurs le quatrain IX, 49, appartient - cette fois sous une forme identique dans toutes les éditions - au groupe des Centuries VIII-X, soit le second volet, dont on sait que les premières éditions conservées sont les plus difficiles à dater et pourraient fort bien appartenir au XVIIe siècle.29

   Arrêtons-nous un instant sur le cas des diptyques Centuries / Recueil des Prophéties et Révélations, qui paraissent chez les libraires troyens Chevillot et Du Ruau. On sait que la date de 1611 figure chez Chevillot, année qui correspond au début de la régence de Marie de Médicis, à la suite de l’assassinat d’Henri IV, en 1610, Louis XIII étant né en 1601.30 Cette date semble inacceptable pour des éditions comportant les sixains.31 De deux choses l’une : ou bien le Recueil des Prophéties et Révélations date seul de 1611 - la date ne figure pas sur le volume centurique - et paraît en l’honneur de la nouvelle régence, comme il était paru en 1561, pour celle de Catherine de Médicis étant donné que ce Recueil, sous sa forme latine d’origine de Mirabilis Liber - au demeurant antidaté, comme il se doit, à 1522 - est fortement lié à la régence, à commencer par celle de Louise de Savoie durant la captivité à Madrid de François Ier, à partir de 1524/1525 (selon le calendrier utilisé) à la suite du désastre de Pavie32 ou bien il paraît lors de la régence suivante, celle d’Anne d’Autriche, à l’égard, cette fois, de Louis XIV, né en 1638, liée à la mort de Louis XIII survenue en 1643, ce qui permettrait de dater ces éditions non datées des Prophéties du milieu des années 1640. On notera, en tout cas, que le véritable lancement européen des Centuries nous semble dater de cette période, avec en 1650 l’édition de Leyde et les premiers échos des Centuries en Angleterre, chez William Lilly, relatifs à la mort du roi Charles IX, exécuté en 1649, et au verset “Sénat de Londres”.33 Bientôt les commentaires des quatrains vont se multiplier, soit accompagnant les éditions elles-mêmes, soit en s’y référant comme ce sera le cas de l’Eclaircissement de 1656, sans parler de ceux qui paraissent sous la Fronde antimazarinienne, dont beaucoup seront dus à Jacques Mengau. Le quatrain relatif à Montmorency a pu alors apparaître, à tort ou à raison, comme annonçant l’exécution de 1632, voulue par Richelieu, lui-même mort en 1642. C’est alors, on le sait, que paraîtra le fameux quatrain comportant l’anagramme Nirazam et qui appartient, par sa vignette, à la série Du Ruau.

   Signalons, ainsi, le bilan prévisionnel, tenant en deux pages serrées, avec notamment la mention des quatrains IX, 18 et IX, 49 susnommés (in “Observations sur les Prophéties de M. Michel Nostradamus”, texte anonyme) figurant dans l’édition d’Amsterdam de 166730 et qui commence à 1555, avec chaque fois le quatrain correspondant. A l’évidence, dans ce cas, toutes les Centuries sont supposées avoir été composées à cette date, ce qui montre bien que l’on ne renonce nullement à créditer Nostradamus de prophéties concernant des événements ayant eu lieu de son vivant. Sans cela, le bilan serait singulièrement plus pauvre comme il le serait encore davantage, si l’on ne créditait les Centuries que pour des périodes postérieures aux éditions conservées et véritablement parues aux dates indiquées ou, en cas d’absence de date, dont on pourrait déterminer avec assurance, le moment de parution et l’on sait que la mention d’un libraire n’est pas une preuve décisive à ce propos.

   Signalons notamment le bilan prévisionnel, tenant en deux pages serrées, avec notamment la mention des quatrains IX, 18 et IX, 49 susnommés (in “Observations sur les Prophéties de M. Michel Nostradamus”, texte anonyme) figurant dans l’édition d’Amsterdam de 166734 et qui commence à 1555, avec chaque fois le quatrain correspondant. A l’évidence, dans ce cas, toutes les Centuries sont supposées avoir été composées à cette date, ce qui montre bien que l’on ne renonce nullement à créditer Nostradamus de prophéties concernant des événements ayant eu lieu de son vivant. Sans cela, le bilan serait singulièrement plus pauvre comme il le serait encore davantage, si l’on ne créditait les Centuries que pour des périodes postérieures aux éditions conservées et véritablement parues aux dates indiquées ou, en cas d’absence de date, dont on pourrait déterminer avec assurance, le moment de parution et l’on sait que la mention d’un libraire n’est pas une preuve décisive à ce propos.

   Mais il est de bonne guerre, dans le domaine du texte prophétique, d’antidater sa composition de quelques années pour renforcer son crédit, pour forger - dans tous les sens du terme (en anglais forgery signifie contrefaçon) - sa réputation et il eut été dommage de s’en priver. Ce fut notamment au XIXe siècle, vers 1839-40, sous la Monarchie de Juillet, le cas de la Prophétie d’Orval.35

   Il est vrai que le québécois P. Brind’amour avait donné le la, en 1993 - 1996 - en refusant systématiquement toute corrélation avec tout événement postérieur à 1555, préférant ainsi une sorte de fuite dans le passé, qui enlevait au demeurant tout sens à la réputation de prophète faite à Nostradamus. En réalité, certains nostradamologues ou nostradamistes comme disait en 1711 Pierre Joseph, dans sa Vie de Nostradamus (Aix, 1711 (BNF, 16° Ln27 87147), se sont placé dans une position carrément intenable - et ils le sentent bien “inconsciemment” - à savoir que reconnaître qu’un quatrain renverrait de façon univoque à un événement survenu entre disons 1555 et 1568 poserait problème pour celui qui affirmerait - comme c’est présentement le cas de R. B. dans le dit article - que tout le corpus centurique avait été bouclé en 1558, dernier délai. Pourtant, en étudiant la Vie de Nostradamus de Pierre Joseph de Haitze (op. cit., p. 161), il est assez évident que l’on a tout fait pour attribuer à Nostradamus le mérite des événements dramatiques et en quelque sorte imprévisibles survenus en 1559 et 1560.

   “Mais comme [Nostradamus] avait peur que plusieurs choses qu’il avait prévues allassent bientôt s’accomplir, comme la mort des rois Henri II et François II (...) il se détermina de publier ses quatrains prophétiques.•

   On ajoutera que certains quatrains aux ficelles un peu trop grosses ont pu par la suite être éliminés ou retouchés, surtout si à côté de prétendues prophéties qui tombaient juste avaient pu se glisser d’autres qui avaient été infirmées. A force de ne rien vouloir recouper formellement, on se met dans l’incapacité de comprendre ce qui fit le succès des Centuries non pas seulement aux XVIIe, XVIIIe, XIXe, XXe ou XXIe siècles mais tout d’abord dans la seconde moitié du XVIe siècle ! Il a bien fallu enclencher la mécanique prophétique en “mettant le paquet” tant et si bien que par la suite, une fois le “produit” mis en orbite, du fait d’une campagne de promotion musclée, à base de biographie, de quatrains dûment vérifiés, de documents retrouvés à la mort de l’auteur et qu’il gardait jusque là par devers lui - les expressions “secret estude” (Préface à César, déjà sous la forme connue de Couillard, Prophéties, 1556, et Centurie I, 1) ou “solitaire estude” (Epitre à Henri II, in Présages Merveilleux pour 1557) impliquant une certaine discrétion, impliquant un travail à ne pas divulguer prématurément - le dit produit allait ensuite poursuivre sur sa lancée, selon l’adage qui veut que l’on ne prête qu’aux riches.

   On a là un problème de philosophie du langage qui va bien au delà de l’affaire Nostradamus : soit le langage recouvre nécessairement une très grande diversité de réalités spécifiques, ce qui le rend foncièrement polyvalent et dans ce cas on ne pourrait jamais prouver que tel propos ne saurait viser que tel événement et uniquement celui-ci, soit le langage peut parvenir à un degré extrême d’univocité qui ne laisserait aucun doute sur la singularité de ce qui a été annoncé ou sur ce qui est décrit et évoqué, après coup, par le menu, c’est-à-dire en détail. Or, si l’on admet la première thèse, ne devient-il pas impossible de prouver que Nostradamus a bien traité de l’avenir avec un minimum de précision ? Nous faisons partie de ceux qui pensent que certains quatrains centuriques ont été perçus, après sa mort, et ce à tort ou à raison, comme annonçant, avant terme, des événements précis censés être imprévisibles. Ne pas accepter cette position, c’est se condamner à ne pas comprendre ce qui fit la gloire, légitime ou non, de Nostradamus à moins d’admettre la crédulité de l’époque, prenant des vessies pour des lanternes, ce qui aboutirait à démystifier le dit Nostradamus, ce qui serait un comble de la part de ceux qui prétendent défendre et sauvegarder son image face à ceux qui veulent l’en “déposséder” !

   Signalons le travail de l’américain Liberty Le Vert36 dont la contribution la plus intéressante est probablement son étude de la poétique des quatrains (pp. 31 et seq), selon une approche critique qui sera adoptée en France par Jean Céard.37 Ce chercheur n’y va pas par quatre chemins : il boucle, comme le propose Benazra, la composition des Centuries à 1558 (p. 8) mais il admet que les quatrains puissent avoir annoncé des événements qui n’eurent pas lieu, ce qu’apparemment les nostradamologues lyonnais, en particulier, n’ont pas le courage de faire, considérant que si un quatrain ne correspond pas, c’est qu’il annonce autre chose pour un autre moment. Le Vert parle ainsi de l’échec de Nostradamus à prévoir le destin d’Henri II (p. 9) ; ce fut le cas, pense-t-il à propos de VI, 70 :

Au chef du monde le grand Chyren sera
Plus oultre apres aymé, craint, redoubté
Son bruit & loz les cieulx surpassera
Et du seul titre victeur fort contenté.

   Et de commenter : “Chyren is an anagram for “Henryc”, perhaps fashioned after “Cyrus” and “Plus ultra” was the personal motto of the Emperor Charles V.” en ajoutant qu’Henri II se tua stupidement au cours d’un tournoi en 1559.

   En soulignant cet échec cuisant concernant le dédicataire de l’Epître, Le Vert a au moins l’avantage de laisser entendre que le dit quatrain serait antérieur à l’année fatale 1559 car, après coup - par exemple en 1568 - quel intérêt y aurait-il eu à rappeler des espérances déçues face à Charles Quint ? C’est là une voie que ne semblent pas vouloir emprunter les chercheurs français, préférant probablement interpréter autrement le dit quatrain. Mais nous ne suivrons pas pour autant Le Vert concernant VI, 70, lequel quatrain appartient à des Centuries inconnues de Crespin (1572). Pourquoi dans ce cas une telle prophétie relative à Henri II ? Qui est d’ailleurs ce grand Chyren ? Il faut comprendre que les seuls enjeux politiques des années 1570 ne sont pas réduits au périmètre français. Sous Charles IX, son frère le duc d’Anjou, deviendra, au lendemain de la Saint Barthélemy, en 1573, Henri de Valois, roi de Pologne avant de lui succéder en 1574, avec, à terme, des ambitions impériales. Là encore échec prévisionnel mais à une date qui correspond avec la parution des Centuries concernées. Le hasard voudra que le successeur d’Henri III soit également prénommée Henri (de Navarre), ce qui facilitera singulièrement la tache des exégètes après l’avènement officiel du premier roi Bourbon à la couronne de France (en 1593-1594).

   Le Vert souligne aussi le fait que Nostradamus se fait l’écho d’événements assez insignifiants, avec le recul, connus lors de la rédaction.(pp.26 - 28) mais il se demande comment Nostradamus pouvait être aussi vite informé de certains événements de son temps : “And where did Nostradamus get his information ? There were no newspapers and small towns in the back woods, a good walking distance from Marseilles or Toulon would not have been communications centers. Did Nostradamus correspond with someone at the Court; as is often hinted ?” En revanche, si les quatrains furent écrits avec le recul des années, le problème de la rapidité de l’information ne se pose plus car des chroniques paraissaient des années plus tard. Cela vaut aussi pour l’accès de Nostradamus à des ouvrages qui venaient de paraître et dont il ne prenait pas nécessairement connaissance aussitôt, comme ce serait le cas de nos jours.

   Revenons à l’Epître Besson, si dérangeante : pour quelles raisons l’auteur - quel qu’il soit - de cette version dont le ton est proche de celle des Présages Merveilleux par son contenu fort peu technique, au regard de la version canonique de l’Epître au Roi, aurait procédé ainsi alors que s’il avait voulu “corriger” l’Epître au Roi, il n’aurait eu aucune raison de l’abréger aussi considérablement ? L’insignifiance même de l’Epître Besson nous semble plaider en sa faveur en ce qu’elle ne cherche rien à démontrer ou à annoncer, ne comportant au demeurant aucune échéance. Or, on sait à quel point les retouches, dans le champ prophétique, ont des motifs chronologiques. Pourquoi le dit auteur aurait-il jugé bon de faire dédier par MDN ses “premières prophéties” au Roi et non plus les dernières - le “restant” ? Que peut signifier la référence aux “premières centuries” à la fin du XVIIe siècle - alors que chacun connaît l’Epître à César, datée de 1555 et annonçant déjà des centuries - si ce n’est en vue de reproduire une pièce ancienne - une curiosité - issue vraisemblablement d’une bibliothèque ? Ajoutons qu’à l’instar des “quatrains terminaux”, nous avons là affaire à des “épîtres introductives”, que l’on place en tête de documents susceptibles de varier sans parler du contenu même des dites épîtres, et qui confèrent une fausse impression d’immuabilité.

Scénarios anglais pour des centuries incomplètes

   Il nous semble en réfléchissant sur la controverse existant entre chercheurs autour de Nostradamus, que la plus grande difficulté réside précisément dans l’aptitude à discerner ce qui vient avant et ce qui vient après, ce que nous pourrions appeler l’esprit chronématique ce dont certains semblent assez mal pourvus. Il est probable que la véritable physionomie de la chronologie des éditions est bien éloignée de celle qui nous a été proposée dans les années 1989-1990; non seulement, convient-il de repérer les éditions antidatées mais encore convient-il de déterminer leur date réelle de parution. Faute de quoi, on risque de porter un jugement comme celui de Ian Wilson38 qui n’hésite pas à écrire :

   “Then, despite the oft-quoted claim that Nostradamus has never been out of print since his lifetime, there passed nearly a century (depuis la Concordance de Guynaud, 1693 !) without any significant Nostradamian publication (...) When he next surfaced it was at the geat turning point of French history, the French Revolution of 1789”, ce qui est faire bien peu de cas des fausses éditions Pierre Rigaud 1566, parue au cours du XVIIIe siècle. Le même Wilson39 explique à sa manière pourquoi la Centurie IV n’eut d’abord que 53 quatrains auxquels on ajouta 47 (et non 46 comme il écrit) : “which printer Bonhomme had omitted for lack of space (...) With regard to Century VII’s arbitrary truncation, clearly du Rosne exercised every bit as much Procrustean rtuthlessness towards Nostradamus’ verses as his predecessor.” Autrement dit, ce sont les libraires de 1555 et 1557 qui seraient responsables, peut être pour des raisons techniques, de l’absence de certains quatrains alors que Nostradamus leur aurait bien fourni d’office un ensemble impeccable de centuries à cent quatrains.

   Il convient de citer un autre nostradamologue britannique, John Hogue, à propos des Centuries dites incomplètes40, lequel, par ailleurs, affirme que vingt ans passèrent entre 1568 et 1588 - alors qu’une activité importante eut lieu au début des années 1570 et au début des années 1580 - sans nouvelle édition des Centuries. On a droit à un véritable roman :

   “There has been a lot of speculation by modern scholars about how certain quatrains for Century 7 came to be lost and partially recovered. One theory suggests that Nostradamus was a. messy archivist f his own writing and somehow misplaced and/or threw away those pages of the original manuscript for Century 7. He discovered these were missing, sometime after Rosne’s sloppy edition came out in 1557 with the last 60 quatrains for Century 7 dropped. Lemesurier speculates that there was some falling out between Nostradamus and Rosne. He surmises that when Nostradamus approached Benoist Rigaud for a new and better-printed edition, in a fit of pique Rosne did not return his copy of the original manuscript with the extra quatrains (...) During Nostradamus’s final six years of life, he was either unsuccessful in pressuring Rosne to return the other 58 missing quatrains or Rosne and his inattentive copy editor had already thrown the manuscript away once printed copies were coming off the presses.”

   Autre exemple d’une tentative de rendre compte de la succession des “premières” éditions, chez Peter Lemesurier :

   “By the time, Nostradamus had the second installment of 289 verses ready in 1557 he had changed publishers and his new publisher, Antoine du Rosne of Lyon, evidently unwilling (...) to publish : what was in effect a sequel (une suite) to another publisher’s book, decided to make a new start and publish both installments together for himself, finishing ar verse VII, 42. When, however, Nostradamus finally completed his third and final installment in 1558, he had changed publishers yet again and this time, his new publisher (Jean de Tournes) decided to cut his losses and publish just the last three “centuries” as a separate book (so leaving the seventh “century” of the second edition incomplete to the extent of 58 verses and with a new dedication of its ownn, this time to King Henri II himself.”41

   Ainsi, le désordre des éditions centuriques se voit-il attribuer à Nostradamus lui-même ou à l’incurie ou à la désinvolture des libraires auxquels il aurait confié son œuvre.

   Saluons l’ingéniosité des nostradamologues d’Outre Manche s’évertuant à expliquer comment purent cohabiter les “premières” éditions, parues du vivant de Nostradamus, du moins selon leurs dires, celle à quatre, celle à sept, celle à dix Centuries avec la mise en place des deux Epîtres à César et à Henri II. On notera qu’un tel exercice est nettement moins à la mode en France, ce qui montre bien que chaque pays développe ses centres d’intérêt, au niveau de la recherche. Cela tient peut-être au fait que pendant longtemps la recherche nostradamologique connut une pénurie d’éditions. En France, l’essor de la recherche des documents nostradamiques aura conduit à un certain positivisme comportant probablement ses propres excès et limites. Un autre trait surtout propre aux nostradamologues britanniques consiste à répertorier les quatrains les mieux confirmés par l’Histoire.42 Apparemment, ces chercheurs ne sont pas gênés par le fait que des quatrains puissent correspondre à des événements datant de la fin de la vie de Nostradamus ou du lendemain de sa mort et ne se rendent pas compte que cela peut mettre en doute la date de composition des dits quatrains. D’ailleurs, un Peter Lemesurier43 par ailleurs très savant sur les sources des Centuries n’hésita nullement à publier, avec des résultats peu concluants, au demeurant, des prédictions pour ces dernières années, ce qui aurait été assez peu concevable dans le milieu des nostradamologues français. Quant à démontrer que les Centuries sont bien parues du vivant de Nostradamus, il semble que cela aille de soi chez les nostradamologues anglo-saxons et qu’il ne soit pas même nécessaire d’en apporter la preuve. Nous avons la faiblesse de penser qu’une telle préoccupation pourrait être due à nos exigences dont nous avions notamment fait part au début des années 1990 à Pierre Brind’amour, ce qui explique son extrême réticence à relier des quatrains avec des événements postérieurs à la supposée parution des Centuries. On voit donc que l’école nostradamologique francophone, avec son French touch, se distingue assez nettement, par ses préoccupations et ses méthodes, de l’école nostradamologique anglophone, moins bien armée, pour des raisons historiques et culturelles, selon nous, pour dénoncer les impostures. Cela dit, nous trouvons assez louables les tentatives de trouver une cohérence, après coup, dans le cours de l’Histoire des Centuries et d’inclure éventuellement des éditions devenues introuvables ou dont l’existence reste hypothétique, ce que beaucoup de nostradamologues français hésitent à faire, scrupule qui, certes, les honore, mais qui, selon nous, les réduit à réfléchir sur un ensemble limité aux aléas de la conservation ; il faudra probablement trouver un juste milieu entre ces diverses optiques.

   Si l’on fait un peu de nostradamisme comparé, entre milieux nostradamologiques francophones (France, Québec, notamment) et anglophones (Angleterre, Etats Unis, notamment), nous dirons que les chercheurs francophones actuels sont plus prudents que leurs confrères anglophones ; ils se méfient des recoupements trop proches du temps de Nostradamus, d’une part, et de l’autre, ils sont conscients du peu d’éléments démontrant la diffusion des Centuries de son vivant, tout cela étant lié à la conscience de l’existence de contrefaçons antidatées, ce qui ne semble pas être la cup of tea des nostradamologues de l’école anglo-saxonne. Les nostradamologues de l’école francophone sont, en quelque sorte, un peu plus paranoxs, c’est ainsi qu’ils savent que l’étude des sources des quatrains peut conduire à se demander si Nostradamus aurait pu recourir à des emprunts aussi massifs et si cela ne vient pas renforcer la thèse d’une production centurique non attribuable à ce dernier. Bref, ces gens là sont plus sur leurs gardes, d’où parfois un certain immobilisme de peur de donner prise à la “critique nostradamique”, nom sous lequel on tend à désigner ceux qui ne cherchent pas à sauvegarder l’image d’un Nostradamus publiant de son vivant “ses” Centuries.

   Quand le chat n’est pas là, les souris dansent ; et c’est ce qui se passe Outre Manche. Que penser, en effet, du “roman” proposé (cf. supra) par un Lemesurier et consorts, quant à l’enchaînement des éditions des Centuries ? Pourquoi se demande-t-on, là-bas, est-on passé de 353 quatrains, en 1555, à 642, en 1557, ce qui fait un peu désordre et pourquoi a-t-on ajouté encore trois Centuries (en 1558 ou en 1568, c’est selon) sans prendre la peine de compléter la VIIe ? Chamailleries, susceptibilités, excentricités nous répond-on ! Nous avons montré dans une précédente étude, aux relents kabbalistiques, l’existence de centuries volontairement incomplètes et postérieures aux deux groupes I-III et VIII-X. Quid de l’édition Barbe Regnault annonçant en 1560 une addition de 39 “articles” à la “dernière” Centurie et dont l’intitulé est repris dans les éditions parisiennes de 1588 / 1589 et qui nous semble bien montrer que : 1° il y eut une centurie à 39 quatrains avant qu’elle n’en ait davantage et 2° il y eut des éditions sans addition avant qu’il y en ait avec addition, ce qui n’est le cas d’aucune des éditions 1555 ou 1557.

   Apparemment, les anglo-saxons n’ont pas, non plus, subi l’effet Crespin44 et s’en tiennent docilement à l’ordre de numérotation canonique des Centuries qui a l’avantage de suivre l’ordre des dates d’édition des Centuries ; mais de quoi se plaint-on ? L’idée selon laquelle l’ordre des éditions aurait été établi, après coup, pour légitimer celui des Centuries n’effleure pas nos confrères anglo-saxons : pourquoi, en effet, compliquer quand on peut faire simple ? Pourtant Lemesurier est le premier à reconnaître que les Centuries n’ont pas joué un si grand rôle dans l’activité de Nostradamus :

   “It needs to be stressed at the outset that the Propheties were in no sense Nostradamus’s life’s work (...) In effect; they were really just a natural extension of the Almanachs.”45 Tout est, précisément, dans l’amalgame entre Centuries et Almanachs, autour du mot Prophéties que d’aucuns voudraient ne voir désigner que les quatrains centuriques. En réalité, on aura désigné les quatrains centuriques sous le nom de Prophéties pour entretenir la confusion, ce qui permettait de dire que l’on avait bien parler des prophéties-centuries chez Nostradamus et chez ses adversaires alors même que le terme prophéties ne désignait même pas nécessairement des quatrains, ce n’est que par la suite que, dans le contexte nostradamique, les deux termes deviendront synonymes comme on peut le voir dans l’intitulé des deux volets de l’édition (antidatée) Benoist Rigaud 1568.

   Peter Lemesurier ne semble d’ailleurs pas avoir développé un culte de Nostradamus, comme c’est parfois le cas en France : ses travaux sur les origines des Centuries le conduisent, en quelque sorte, à déposséder Nostradamus de la paternité de celle-ci - exactement comme on nous reproche de l’en déposséder en étudiant la production postérieure à son temps ! Lemesurier va même un peu (trop) loin, dans ce sens, quand il écrit :

   “This (book) was entitled The Prophecies (Les Propheties) Nor, note, Prophecies but The Prophecies. There was good reason for this rather strange formulation. It was that the majority of them were simply not his (...) he was, in effect, merely re-interpreting whole rafts of ancient end-time prophecies by prominent saints and divines (...) The subject of his book was thus not his prophecies but the prophecies.”46

   Rappelons que, selon nous, de tels quatrains ont d’abord pu circuler sans se rapporter à Nostradamus et qu’on a pu les nostradamiser en raison de leurs similitudes formelles avec les Présages, dont ils pouvaient d’ailleurs, bel et bien, s’être inspiré, encore qu’à notre avis leur caractère prophétique initial ne soit pas avéré, à la différence de ce qui se produira pour les sixains et leur parution associée au nom de Morgard, au début du XVIIe siècle.47 On ne voit donc pas pourquoi Nostradamus se serait livré à de telles opérations besogneuses de récupération voire de plagiat - telles que les décrit et les reconstitue, à la suite d’un P. Brind’amour48 un P. Lemesurier49, pour les Dix Centuries, insistant notamment sur les emprunts au Mirabilis Liber, dont il ne semble pas être conscient que cet ouvrage est antidaté alors que probablement postérieur à Pavie (1524 / 1525)50, sans parler des recherches éclairantes de Chantal Liaroutzos51 qui sont surtout affaire de faussaires, pressés par le temps et voulant faire du (simili) prophétique à peu de frais et somme toute, paradoxalement, d’abord à court terme. Quant au recours, pour introduire les Centuries, à une Epître au Roi remaniée, réaffectée, redatée, transférée des Présages Merveilleux pour 1557, cela ne dit vraiment rien qui vaille.

   Or, Lemesurier semble ignorer notamment l’ “extraict (vrai ou faux, peu importe, ici) des registres de la Senechaussée de Lion” : “Sur ce que Macé Bonhomme Imprimeur demeurant à Lyon, ha dict avoir recouvert certain livre intitulé LES PROPHETIES DE MICHEL NOSTRADAMUS etc”, tout comme il y aura Les Prophéties du Seigneur du Pavillon, Paris, 1556, sans que l’on aborde ici quel pouvait être le contenu des dites Prophéties, terme qui semble bel et bien avoir été employé par Michel de Nostredame dans un sens non centurique. Lemesurier voudrait qu’on lût : “Nostradamus. Les Prophéties”, oubliant aussi l’intitulé de la Préface à César - et là encore on n’abordera pas ici la question de son authenticité : “Préface de M. Michel Nostradamus à ses Prophéties”. No comment !

Jacques Halbronn
Paris, le 2 mars 2004

Notes

1 Cf. notre étude sur “Les exégètes de Nostradamus au XVIIe siècle”. Retour

2 Cf. I. Wilson, Nostradamus. The evidence, op. cit., p. 348, qui ne signale que la forme Nizaram ! Retour

3 Cf. RCN, Bibliographie Nostradamus. Retour

4 Cf. notre étude sur Postel, Espace Nostradamus. Retour

5 Cf. Antoine du Rosne, 1557, Bib Budapest. Retour

6 Cf. RCN, p. 263. Retour

7 Cf. notre étude sur la septième centurie, sur Espace Nostradamus. Retour

8 Cf. Mazarine, 372541. Voir RCN, pp 141 - 142. Retour

9 Cf. RCN, p. 140 - 144. Retour

10 Cf. notre article sur Espace Nostradamus. Retour

11 Cf. RCN, pp. 290 et 300. Retour

12 Cf. RCN, p. 340 et 343. Retour

13 Cf. RCN, pp. 172 - 173 et 325 et seq. Retour

14 Cf. BNF YE 28645. Retour

15 Cf. RCN, p. 337. Retour

16 Document numérisé BNF Cote NUMM 70320. Retour

17 Cf. Baudrier, Bibliographie Lyonnaise. Recherches sur les imprimeurs, libraires, relieurs et fondeurs de lettres de Lyon au XVIe siècle, tome I, Reed. Paris, 1964, pp. 358 - 360. Retour

18 Cf. E. Leoni, Nostradamus Life and Literature, New York, 1961 devenu Nostradamus and His Prophecies, New York, 1982, p. 47. Retour

19 Cf. RCN, p. 156, p. 191, p. 209. Retour

20 Cf. Oracles, Paris, 1867. Retour

21 Cf. les travaux de M Chomarat, R. Benazra, notamment. Retour

22 Cf. l’étude de R. Amadou sur cette date, en 1992, deux cents ans plus tard, in “Nostradamus - De nuit secrète étude”, Le Chant de la Licorne, 33 (juillet 1992. Retour

23 Cf. Documents Inexploités sur le phénomène Nostradamus, Feyzin, Ed. Ramkat, 2002, pp. 134 - 135. Retour

24 Cf. Nostradamus, le mythe et la réalité, Paris, Ed. R. Laffont, 1999. Retour

25 Cf. notre compte-rendu du Colloque de la BNF, en 2003, sur Espace Nostradamus. Retour

26 Cf. La gloire de Nostradamus et la mémoire du futur, France-Europe Editions, 2002. Retour

27 Sur l’hypothèse d’une édition Benoist Rigaud 1558, voir E. Leoni, Nostradamus and His Prophecies, New York, 1961, 1982, pp. 30 - 31 ; I. Wilson, Nostradamus. The Evidence, Londres, 2003, pp. 200 - 201, et nos Documents Inexploités sur le phénomène Nostradamus, pp. 136 - 137 et 318 - 319. Retour

28 Cf. I. Wilson, Nostradamus. The evidence, op. cit., pp. 351 et 358. Retour

29 Cf. Le texte prophétique en France. Formation et fortune, pp. 122 et seq et G. Ashe, The Book of Prophecy from Ancient Greece to the Millenium, Londres, Blanford, 1999, pp. 142 - 143. Retour

30 Cf. A. Corvisier, Les régences en Europe, Paris, PUF, 2002, pp. 143 et seq. Retour

31 Cf. Documents inexploités sur le phénomène Nostradamus, op. cit. Retour

32 Cf. notre étude sur Lichtenberger et le Mirabilis Liber sur le Site du Cura.free.fr et notre thèse d’Etat, Le texte prophétique en France, formation et fortune, Lille, ANRT. Retour

33 Cf. nos études “L’Astrologie sous Cromwell et Mazarin”, Colloque Astrologie et Pouvoir, Politica Hermetica 17, 2003 et “The importance of comets for the cause of Astrology ; the case of Pierre Bayle in the years 1680-1705” in Astrology, Science and Culture. Pulling down the Moon, Dir R. Willis et P. Curry, Oxford, Berg, 2004. Retour

34 Cf. notre étude sur le Brief Discours sur la Vie de Michel de Nostredame, Espace Nostradamus. Retour

35 Cf. E. Leoni, Nostradamus and His Prophecies, New York, 1961, 1982, p. 21. Retour

36 Cf. The prophecies and enigmas of Nostradamus, Fire Bell Books, Glen Rock, New Jersey, 1984. Retour

37 Cf. la Préface au RCN de R.Benazra, Paris, 1990. Retour

38 Cf. Nostradamus. The evidence, Londres, Orion, 2003, p. 356. Retour

39 Cf. The Evidence, op. cit., p.161. Retour

40 Cf. Nostradamus. A Life and Myth, Londres, Element, 2003, pp. 275 - 276. Retour

41 Cf. Nostradamus, The illustrated Prophecies, Winchester, 2003, p. XIV. Retour

42 Cf. notamment le travail de classement de Geoffrey Ashe, The Book of Prophecy from ancient Greece to the Millenium, Londres, Blandford, 1999, pp. 139 et seq. Retour

43 Cf. Nostradamus in the 21st Century, featuring the coming invasion of Europe, Piatkus, 2000. Retour

44 Cf. nos DIPN, Documents Inexploités sur le phénomène Nostradamus, op. cit. Retour

45 Cf. The Unknown Nostradamus, op. cit., p. 81. Retour

46 Cf. Nostradamus. The Illustrated Prophecies, op. cit.,. p. IX. Retour

47 Cf. Documents Inexploités sur le phénomène Nostradamus, Feyzin, Ramkat, 2002. Retour

48 Cf. Nostradamus Les premières Centuries ou Prophéties, Genève, Droz; 1996. Retour

49 Cf. Nostradamus, the illustrated Prophecies, Winchester, 2003. Retour

50 Cf. notre étude sur Lichtenberger, Site Cura.free.fr. Retour

51 Cf. “Les prophéties de Nostradamus. Suivez la Guide”, Réforme, Humanisme, Renaissance, 23, Lyon, 1986. Retour



 

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