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ANALYSE

96

Réflexions sur les avatars des quatrains centuriques
aux XVIe et XVIIe siècles

par Jacques Halbronn

    Face à l’approche critique, qui met en évidence les contradictions d’un ensemble de documents réunis sous une seule et même étiquette, la tentation est celle de l’apologétique et de l’hagiographie. En réalité, le monde est fait ainsi qu’à certaines périodes, les avis sont partagés et se confrontent et qu’à d’autres, un modèle finit par s’imposer, les résistances n’ayant qu’un temps.1

   Rappelons qu’il y a deux critiques complémentaires, la textuelle qui concerne l’état premier du texte et la littéraire qui touche à l’identité de l’auteur2 et cela n’est nullement réservé au corpus nostradamique. Il ne s’agit nullement de remettre en question l’existence du phénomène Nostradamus mais d’essayer de comprendre comment et quand, selon quelles étapes, il a été véritablement engagé. Michel de Nostradame a certes existé tout comme Jésus de Nazareth, 1500 ans plus tôt, mais, dans les deux cas, - tous deux étaient d’origine juive, tous deux ont acquis une dimension prophétique et la littérature qui les concerne est considérable - on a beaucoup brodé autour.

   Or, l’on ne peut pas ne pas s’intéresser aux fluctuations qui affectent certains quatrains, soit qui connaissent des variantes sur un verset, soit qui ne figurent pas dans certaines éditions. Quelles sont les raisons de tels avatars - problèmes techniques ou retouches volontaires ? - qu’est-ce que cela nous apprend sur l’Histoire de l’édition centurique et notamment comment ignorer le poids des guerres de religion qui commencent dans les dernières années de la vie de Michel de Nostredame, sur la fortune des quatrains centuriques ? En tout état de cause, on s’aperçoit que les deux dernières décennies du XVIe siècle constituent une période clef pour appréhender la formation du corpus centurique. En 1599, au lendemain de l’Edit de Nantes, parut à Nîmes, ville protestante, un pamphlet antipapiste, mais assez bon enfant, qui constitue probablement la première pièce de théâtre mettant en scène Nostradamus, dans son étude, tenant sa sphère, comme sur “sa” vignette et citant “modernes magiciens comme Agrippa et ses semblables” (p. 25) ; il s’agit de la Comédie facétieuse et très plaisante du voyage de Frère Fecisti en Provence vers Nostradamus. Pour scavoir certaines nouvelles des Clefs de Paradis & d’Enfer que le Pape avoit perdues.3 Cette pièce nous évoque quelque peu un autre texte huguenot, paru en 1562, Les Vertus de nôtre Maître Nostradamus en Rimes, par Conrad Badius, ouvrage dont on ne connaît plus qu’un extrait rapporté par Du Verdier dans sa Bibliothèque, en 1585.4 On notera que si Badius se réfère bel et bien à des vers, il ne s’agit pas pour autant des centuries, tout comme Couillard évoque des “carmes obscurs” (Prophéties, 1556) : “Mais pour un diseur de matines/ Il couppe mal ses féminines/ Ses vers sont faicts à estrivière/ Fort courts devant et longs derriere/ Et sont naiz soubs tel horizon/ Qu’il n’y a ny sens ny raison etc.”

   Signalons également la Déclination des Papes, Contreprognostication à celle de Nostradamus.5 Par ailleurs, plusieurs attaques des années 1550 contre Nostradamus seraient le fait de Protestants tel Guillaume Farel pour la Première Invective du seigneur Hercule Le François contre Nostradamus.6

   Il est clair que tout au long des XVIe et XVIIe siècles, on aura accommodé diversement le corpus centurique, par des suppressions ou/et des additions et que c’est au travers de celles-ci que le public s’en est fait une idée, que la réception du dit corpus s’est effectuée, et non à partir d’un état premier qui ne fut qu’une étape du processus et que l’on ne saurait rétablir, sans anachronisme, à partir d’états ultérieurs.

Sommaire :

1 - Variantes et filiation des éditions centuriques
2 - Quatrains manquants et éditions censurées
3 - La transformation des quatrains centuriques à partir de la fin du XVIe siècle


1

Variantes et filiation des éditions centuriques

    Lorsque un quatrain ou du moins un verset connaissent des variantes, comment déterminer quelle est la version la plus correcte et à quoi tiennent de telles variations ? Peut-on prétendre restituer un quatrain sous sa forme d’origine ? Faut-il distinguer le cas des quatrains centuriques et celui des Présages ? Combien de quatrains sont affectés par un problème de variante.7 Il ne s’agit pas ici de déterminer quels sont les vrais et les faux quatrains mais de réfléchir sur la façon dont le corpus centurique est traité, tant au niveau des commentateurs que des imprimeurs. On laissera de côté la question des Présages et de leurs variantes, abordée notamment par Bernard Chevignard.8

   Cette question reste probablement une des plus délicates de la recherche nostradamologique et nous en avons déjà traité à propos des textes en prose, et notamment en ce qui concerne l’édition Antoine Besson. L’affaire semble plus complexe pour ce qui est des quatrains en ce que le sens du verset est volontiers plus obscur que pour le texte en prose.

   Nous avons dressé ci-dessous un inventaire des quatrains affectés par des variantes de façon significative, ils sont au nombre de 133 sur un ensemble d’un peu moins de 1000 quatrains, soit près de 15% mais cela ne fait guère plus de 150 versets sur un ensemble de près de 4000, soit un total d’environ 3%.

   Notre recensement a inclus tant des éditions des Centuries à 4, 7 et 10 centuries que des commentaires ou des compilations datant des XVIe - XVIIe siècles ne comportant qu’un nombre limité de quatrains (Crespin, Janus Gallicus, Giffré de Rechac). Quand la variante n’apparaît que chez un commentateur, on peut raisonnablement supposer qu’elle est de son fait, c’est le cas du Janus Gallicus, de Giffré de Rechac et de Théophile de Garencières quand il reprend les deux premiers.

   Abréviations utilisées :

CR : Crespin (Lyon, 1572).
SJ : François de Sainct Jaure (Anvers, 1590).
JG : Janus Gallicus (1594).
BR : Benoît Rigaud (Lyon, antidaté BR, c 1620).
CH : Chevillot (Troyes, non daté, c 1630).
GR : Giffré de Rechac (sans lieu, 1656).
TG : Théophile de Garencières (Londres,1672) - Jant.
BS : Antoine Besson (c 1691).

   Nous avons numérotés les quatrains de notre sélection de 1 à 133, par ordre de succession à travers les dix centuries. La liste n’est probablement pas exhaustive car tout dépend du degré de variance choisi. Mais ce travail devrait pouvoir suffire pour établir certaines relations entre éditions.

   Essayons de sérier les types de variantes et d’en tirer certaines conclusions.

1 - Changement dans l’ordre des mots d’un verset

   La rime finale n’est pas modifiée.
Ces variantes pourraient être dues à une transmission orale, en tout cas à une dictée.

   Exemples :

I, 15
GR
De par ceux qui d’eux voudront rien entendre
CH, TG, 1605, SJ
Et plus ceux qui d’eux rien voudront entendre.

I, 76
JG
Puis peuple grand par langue & fait duira
TG, CH, 1605, SJ
Puis grand peuple par langue & faict dira.

IV, 43
JG
Ouis seront au ciel les armes batre
CH et TG, 1605, SJ
Seront oys au ciel les armes battre.

V, 35
JG (VI, 35), TG, 1605
Prendre un rameau de grand ouverte guerre
CH, 1557, BR, SJ
Un rameau prendre du grand ouverte guerre

2 - Changement par équivalent phonique

   A l’écoute, le verset n’est pas modifié mais tel mot est remplacé par un autre, sur une base homophonique. Là encore, ces variantes pourraient être dues à une transmission orale, en tout cas à une dictée. Ces erreurs de dictée ou de mémoire justifient certaines corrections proposées par les commentateurs , fondées sur le sens obvie du verset.

   La notion de variante, on l’a dit, est relative, elle implique pour nous un changement de sens. Si le changement est purement orthographique, nous n’avons pas retenu la variante. C’est ainsi que les variantes relevées par R. Benazra9 lors de sa comparaison (Lyon, 1984) des deux exemplaires (Bibl. Albi et Vienne, Autriche) ne recoupent pas notre travail.

   Exemples :

I 83
TG
L’Agent estrange divisera butins
CH,1555, 1557, BR, SJ
La gent estrange divisera butins.

II 62
TG
Sang, Main, Soif, Faim, quand courra la Cométe
CH, 1555, 1557, BR
Cent, main, soif, faim, quand courra la comete.

3 - Changements dus à des mots se ressemblant graphiquement

   Il peut s’agir là de mots mal lus, commençant pareillement.

   Exemples :

I, 63
TG, SJ
Les Fléaux passez, diminué le Monde (idem BS)
CH, BR, 1605
Les fleurs passés diminue le monde

I, 33
GR
Par effort portes lui seront resseréess
TG , CH, SJ, 1605
Par effroy portes luy seront reserrées

I, 65
TG
Trois sur les champs par le milieu troussez
CH, 1555, 1557, BR, SJ
Trois souz les chaines par le milieu troussez

I, 92
TG
Soubz un la paix par tout sera clemence
CH, 1555, 1557, BR, SJ, JG, GR
Sous un la paix par tout sera clamée (rime avec entamée)
III, 33
JG, SJ
Aux monts & Alpes les amis passeront
GR, CH, 1605
Aux murs & Alpes les amis passeront

4 - Changement par synonyme

   Un mot est remplacé par un terme équivalent. Dans ce cas, il ne peut s’agir d’un problème de dictée mais plutôt de mémoire. Ce qui nous conduit à penser qu’il a pu exister une transmission orale des Centuries et que la versification pouvait servir à la mémorisation. Si transmission orale, il y eut, en un temps, où l’analphabétisme était très répandu, il y a pu y avoir aussi transmission de commentaires et en tout état de cause accent mis sur certains quatrain. Mais on pourrait tout aussi bien supposer que cette tradition orale n’était nullement nostradamique à l’origine et qu’elle le serait devenue, pour les besoins de la cause (politique) en prenant une forme écrite.

   Exemples :

III, 51
JG
Blois le fera venir à plein effect (...)
SJ ,CH, TG
Bloys le fera sortir à plain effect (...).

5 - Changement attesté uniquement au sein d’un commentaire

   Il s’agit d’un quatrain dont la variante n’est pas attestée par une édition complète en bonne et due forme. On peut dans ce cas soupçonner une initiative du commentateur. C’est ainsi que le Janus Gallicus abonde en variantes de ce type, comme si l’on s’ingéniait à retrouver quelque rythme interne du verset. Le cas de Théophile de Garencières est le plus complexe : s’il présente un texte complet des Centuries en français assorti de sa traduction anglaise, il tient, cependant, compte des corrections propres à certains commentateurs, dont il s’inspire ponctuellement et encore pas de façon systématique. En outre, une de ses sources semble devoir être une édition non conservée, due au Chevalier de Jant ; cela ressort notamment lorsque les variantes qu’on trouve chez Garencières ne sont pas attestées dans le Janus Gallicus ou chez Giffré de Réchac.

   L’étude des variantes doit pouvoir faire ressortir des filiations entre éditions, elle permet donc une certaine traçabilité. C’est ainsi que l’édition Antoine Besson apparaît se rattacher au groupe Garencières-Jant. et reprendrait une édition disparue parue au début des années 1670. Il ressort aussi de notre inventaire que Giffré de Rechac s’est servi de l’édition 1605 ou en tout cas d’une édition de type Pierre Du Ruau, libraire troyen, laquelle comportait certaines variantes qui la distinguent à plusieurs reprises des autres éditions. Rappelons que seul les éditions de ce modèle, ce qui inclut l’édition rouennaise de 1649, l’édition de Leyde de 1650 et les éditions d’Amsterdam notamment, comportent les Présages, eux-mêmes repris du Janus Gallicus, ce qui n’est pas le cas de l’autre libraire troyen, Pierre Chevillot. Rappelons également que le modèle Du Ruau comporte à la fin de la Vie un quatrain 100 “Orange” et un avertissement latin “Legis cautio” alors que les éditions appartenant à une autre filière n’ont pas le dit quatrain et qu’elles ont une forme corrompue de l’avertissement en “Legis cantio”, comme c’est le cas notamment de l’édition Benoist Rigaud, 1568. Mais le texte de Garencières, à la différence de celui de Giffré de Rechac, est à rapprocher d’une autre lignée, celle de l’édition dont se servira Antoine Besson et que nous attribuons, jusqu’à nouvel ordre, aux soins du chevalier de Jant (c 1672), mais nous l’avons dit l’édition Garencières est hybride. Précisons que lorsque nous indiquons version Garencières, nous ne nous référons évidemment pas au texte anglais mais au texte français qui y est reproduit et qui doit bien venir de quelque part.

   Note : en ce qui concerne le Janus Gallicus, nous donnons le numéro d’ordre qui s’y trouve. Et pour Crespin, nous fournissons le n° de l’adresse tel que nous l’avons fixé dans notre édition des Prophéties dédiées à la Puissance divine et à la Nation française (1572).10

   Nous n’aborderons pas ici le cas des quatrains ne correspondant pas d’une édition à l’autre à une numérotation différente, dès lors qu’ils ne comportent pas de variantes significatives, c’est notamment le cas de l’édition St Jaure dont les quatrains de la VIIe Centurie ne coïncident nullement, quant à leur succession, avec ceux des autres éditions. C’est d’ailleurs, également, cette même VIIe Centurie qui comporte des décalages avec les interpolations liées notamment aux quatrains comportant un anagramme de Mazarin, lequel anagramme comporte d’ailleurs une variante.

   A l’arrière-plan de ce type d’inventaire se situe bien entendu le problème de l’état premier des quatrains, quel que soit la date de la composition et de la production des uns et des autres. Notre propos était ici plus modeste, il consistait simplement en une contribution à l’histoire des éditions des Centuries. Paradoxalement, l’étude des variantes permet de rapprocher de nombreuses éditions tout autant que de les différencier les unes par rapport aux autres. Vraisemblablement, dès la fin du XVIe siècle, le corpus centurique semble déjà doté de plusieurs moutures lesquelles constituent chacune des matrices pour toute une série d’éditions.

   D’un côté, on a l’édition Benoist Rigaud 1568 dont nous datons le second volet tel que conservé des années 1620 et qui se prolonge avec des additions dans l’édition Chevillot. De l’autre, nous avons la série Du Ruau, soit deux libraires troyens. Par ailleurs, nous avons la série Garencières-Jant-Besson attestée en 1672 et dont il conviendra de préciser ultérieurement le rapport qu’elle entretient avec le modèle Du Ruau-1605. Le commentaire de Jacques de Jant (1626-1676), à la différence de celui du Janus Gallicus et de celui, au vrai, incomplet, de l’Eclaircissement, sera repris dans nombre d’éditions des Centuries, introduit par une Epître au Roy, en l’occurence Louis XIV, laquelle constitue une quatrième épître centurique, avec la Préface à César, l’Epitre à Henri II et l’Epître à Henri IV, placée en tête des sixains. Le commentaire du chevalier, dont le nom figurera d’abord en toutes lettres puis seulement sous les initales L. C. D. J, datant des années 1670, s’intitule “Remarques Curieuses sur les Centuries de Michel Nostradamus” mais est aussi désigné comme “Centuries expliquées par un Scavant de ce temps” ; on le retrouve encore dans les années 1690 chez Antoine Besson, il suit l’ordre des Centuries et des quatrains comme le fait Garencières et non pas celui des événements. Besson met un astérisque en face des quatrains commentés dans les “Remarques Curieuses” reprises des Prédictions tirées des Centuries de Nostradamus11, parues en 1672 et 1673.12 Ajoutons que le commentaire de Jant est réactualisé dans les éditions des Centuries qui le comportent, et on y mentionne, chez Besson (pp. 186 et seq), des événements des années 1680 voire du début des années 1690. On ne connaît l’édition Jant que dans le cadre de l’édition bilingue réalisée en 1672 par Théophile de Garencières.

   A propos de l’impact du Janus Gallicus, il convient d’ajouter qu’une série d’éditions comportant les Présages est fortement marquée par le dit recueil et a fort bien pu lui emprunter certaines variantes pour certains quatrains centuriques. Enfin, se pose la question des contributions des éditions connues partiellement au travers d’un commentaire ou d’une forme ou une autre de sélection et dont certaines particularités sont le fait des commentateurs alors que d’autres peuvent renvoyer à une édition conservée ou non.

   Comme nos précédents travaux, le présent inventaire vise à fournir au chercheur des outils d’investigation, complétant les Bibliographies de Chomarat et de Benazra.

   Notre démarche n’a pas consisté à opter pour une édition de référence par rapport à laquelle on indiquerait des variantes; nous avons sélectionné les versets les plus sujets à variante en vue de déterminer certaines filiations quand telle ou telle édition était impliquée dans le même réseau de variantes, autrement dit, nous avons voulu chronématiser les variantes et montrer qu’elles constituaient des ensembles se répercutant sur telle ou telle série d’éditions. Quand on trouve plusieurs éditions autour d’une même variante, il faut tenir compte de la variante alternative ; si celle-ci se réduit à une seule référence à un commentaire, on considérera que ce n’est, a priori, pas une variante significative. On conçoit, en effet, que deux matrices différentes peuvent comporter nombre de quatrains ne se distinguant pas entre eux, il est clair que ce qui démarquera une matrice d’une autre ne concerne qu’un nombre limité de versets. C’est le cas notamment du deuxième quatrain de la Centurie I qui ouvre notre sélection de 133 quatrains.

1
Centurie I, 2
TG
En peur j’escris fremissant par les manches
CH, 1555, 1557, BR, SJ, BS, 1605
Un peur & voix frémissent par les manches
Note : Garancières est le seul, ici, à proposer une variante.

2
I, 15
GR
De par ceux qui d’eux voudront rien entendre
CH, TG, 1605, SJ
Et plus ceux qui d’eux rien voudront entendre.

3
I, 19
GR
Chef fuit, caché aux Mars dedans les Saignes
TG, SJ
Chef fuit, caché aux Marets dans les saignes
CH, 1605
Chef fruict, caché aux Mares dans les saignes
Note : l’édition St Jaure d’Anvers de 1590 se retrouve en 1672 chez Garancières.

4
I, 22
TG
La Guerre & la Glasse sera grand malefice
CH, 1555, 1557, BR, SJ
La gresle et glace fera grandmaléfice
Note : version propre à Garencières et éventuellement à l’édition Jant qu’il reproduit partiellement.

5
I, 33
GR
Par effort portes lui seront resseréess
TG, CH, SJ, 1605
Par effroy portes luy seront reserrées
Note : version propre au seul Giffré de Rechac.

6
I, 35
TG
Deux playes une puis mourir mort cruelle13
CH, SJ, 1555, 1557, BR
Deux classes une puis mourir mot cruelle
Note : variante pour le seul Garencières.

7
I, 44
JG
Chassez seront moines, abbez , novices
Le miel sera beaucoup plus cher que cire
En brief seront de retour sacrifices
Contrevenans seront mis à martire

TG, CH, 1605, SJ
En bref seront de retour sacrifices
Contrevenans seront mis à martire
Plus ne seront moines, abbés, ne novices
Le miel sera beaucoup plus cher que cire.

Note : variante pour le seul Janus Gallicus. Ordre des versets modifié.

8
I, 45
JG, n° 50
Secteur de sectes grande preme au delateur
TG , CH, SJ
Secteur de sectes, grande paine au delateur
Note : variante seulement pour le Janus Gallicus.

9
I, 52
JG
* (mots manquants) le nouveau Roy ioint
TG, CH, SJ
Peste à l’Eglise par le nouveau Roy joint.

10
I, 63
TG, SJ
Les Fléaux passez, diminué le Monde (idem BS)
CH, BR, 1605
Les fleurs passés diminue le monde
Note : on notera que l’édition anversoise (1590) comporte la variante de Garencières.

11
I, 65
TG
Trois sur les champs par le milieu troussez
CH, 1555, 1557, BR, SJ
Trois souz les chaines par le milieu troussez
Note : variante propre au seul Garencières -Jant.

12
I, 76
JG
Puis peuple grand par langue & fait duira
TG, CH, 1605, SJ
Puis grand peuple par langue & faict dira.

13
I, 83
TG
L’Agent estrange divisera butins
CH,1555, 1557, BR, SJ
La gent estrange divisera butins
Note : variante pour le seul Garencières-Jant.

14
I, 92
TG
Soubz un la paix par tout sera clemence
CH, 1555, 1557, BR, SJ, JG, GR
Sous un la paix par tout sera clamée (rime avec entamée)
Note : variante pour le seul Garancières-Jant.

15
II, 12
JG
Thrésor ravi des temples par devant
TG, CH, 1605, SJ
Ravir des temples le trésor par devant
Note : variante pour le seul Janus Gallicus.

16
II, 14
TG
A Tours, Gien, Gargeau seront yeux penetrans
CH, 1557, BR
A Tours; Gien, gardé seront yeux penetrans
1555 et SJ
A Tours, Jean etc
Il est probable que l’édition Macé Bonhomme soit issue de celle d’Anvers SJ laquelle cite in fine une édition 1555 Pierre Roux, Avignon.

17
II, 20
TG
Les contempler ses deux yeux ententifs
CH, 1555, 1557, BR SJ, JG
Les contempler ses rameaux ententifs
Note : variante pour le seul Garencières.

18
II, 26
TG
Le sang d’ans Paul le Thesin versera
CH ,1555, 1557, BR, SJ
Fuis le rang Pau Thesin versera
Note : variante pour le seul Garencières.

19
II, 38
JG
Mais à l’un d’eux viendra tel malencombre
GR, TG, CH, SJ
Mais l’un d’eux viendra si mal encombre
Note : variante seulement dans le Janus Gallicus.

20
II, 44
TG
Quand bruit des Timbres, Tubes & Sonaillons
CH, 1555, 1557, BR, SJ
Quand bruit des cymbres tube & sonnaillons
Note : variante pour le seul Garencières.

21
II, 48
GR, TG
Saturne, Aries, tournant au Poisson Mars
CH, 1555, 1557; BR, SJ,
Saturne en l’Arcq, tournant du poisson Mars
CR
Saturne en Arab tournant du poisson à Mars.

22
II, 48
GR, TG
Venins cachez sous testes de Moutons
CH, SJ, 1605, 1557, 1555, BR
Venins cachez soubs testes de Saulmon.

23
II, 54
TG
Par gent estrange & Nations lomtaine
CH, 1555, 1557, BR, SJ, CR
Par gent estrange & Romains loingtaine.

24
II, 59
GR
Classe Gauloise n’aura apuy de garde grande
Du Grand Neptune & ses tridens soldas
Rongée Provence pour soutenir grande bande
Plus Mars Narbon par iavelots & dars

TG, BR
Classe Gauloise par appuy de grand Garde (rime perdue du fait de la permutation)
Du grand Neptune & ses tridens Soldats

CR sur deux versets :
Classe gauloise par appuy de grand garde du grand Neptune & ses tridens soudains
Ronger Provence pour soustenir grand bande
Plus Mars, Narbon, par Javelots & Dards

Idem SJ, 1555.

25
II, 61
TG
Agen, Tonneins, Gironde & La Rochelle
CH, 1555, 1557; BR, SJ
Euge, Tamins, Gironde & La Rochelle.

26
II, 62
TG
Sang, Main, Soif, Faim, quand courra la Comète
CH, 1555, 1557, BR
Cent, main, soif, faim, quand courra la comete.

27
II, 89
TG
Un jour seront amis les deux grands maistres 1557
CH Un jour seront demis les deux grands maistres SJ
JG
Du ioug seront demis les deux grands Maistres
1555 (Du jou etc).

28
II, 98
TG, Idem BS / Jant
Venant en Leo augure par presaige
CH, SJ
Tonant en Leo augure par presaige
GR
Venus en Leo augure par présage
N.B. Lecture astrologisante de GR
Nous avons là un lien entre Garencières et l’édition Antoine Besson, qui semble indiquer une même source pour les deux.

29
II, 99
GR, CR
Par gent Gauloise sera par trop vexée
TG, CH, SJ
Par gent Gauloise par trop sera vexée.

30
III, 4
GR
Quand seront proches les defauts des luminaires
TG, CH, SJ
Quand seront proches le défaut des lunaires Cf. III, 5 : défaut de deux grands luminaires.

31
III, 21
TG
De face humaine & de corps aquatique
CH, 1555, 1557, BR, SJ
De face humaine & la fin aquatique
Note 1605 : De face humaine et la aquatique.

32
III, 33
JG, SJ
Aux monts & Alpes les amis passeront
GR, CH, 1605
Aux murs & Alpes les amis passeront.

33
III, 51
JG
Blois le fera venir à plein effect (...)
SJ, CH, TG
Bloys le fera sortir à plain effect (...).

34
III, 51
JG
Tours, Langre, Angiers leur feront grand forfaict
CH, TG, 1605, SJ
Angiers, Troye, Langres, leur feront un meffait.

35
III, 57
GR
Sept fois verrez changer gent Britannique
CH, TG, 1605, SJ
Sept fois changer verrez gent Britannique.

36
III, 58
TG
Qui défendra Sarmates & Pannoniques
CH, 1555, 1557; BR, SJ
Qui défendra Saurome & Pannoniques.

37
III, 81
JG
Esleu sera Gouverneur de l’armée
TG, CH, 1605, SJ
Sera esleu gouverneur de l’armée.

38
IV, 5
JG
L’Espagne & Gaule unis seront ensemble
TG, CH, SJ
L’Espane & Gaule seront unis ensemble.

39
IV, 7
TG
Le fils mineur du grand & hay Prince
JG
Le fils mineur du grand & aimé Prince
CH, 1605, SJ
Le mineur filz du grand & hay prince.

40
IV, 19
TG
Par leurs levées raviront les Rivages
CH, 1555, 1557, BR, SJ
Par dons lenees raviront les rivages
Note : 1605: Pardons leuées raviront les rivages.

41
IV, 20
TG
Paix uberté long temps on ne loüera
CH, 1555, 1557, BR, SJ
Paix uberté long temps lieu loüera
BS
long temps Dieu louera.

42
IV, 21
TG
Coeur haut, prudent mis, chassé l’Inhabile
CH, 1555, 1557, BR, SJ
Coeur haut, prudent mis, chassé luy habile
CR
26 Coeur haut prendront.

43
IV, 23
GR TG
Port Selin chercher, feu les consumera
CH 1605, 1555, 1557, BR, SJ
Port Selyn, Hercle feu les consumera.

44
IV, 37
TG
Occupera le Mont de l’Insubre
CH , 1555, 1557, BR, SJ
Occupera le grand lieu de l’Insubre.

45
IV, 43
JG
Ouis seront au ciel les armes batre
CH et TG, 1605, SJ
Seront oys au ciel les armes battre.

46
IV, 44
JG
Lous gros de Mende, de Rhodez & Millau
CH et TG, SJ
Deux gros de Mende; de Roudés & Milhau.

47
IV, 63
JG n°75
Celtique armée contre les montagnars
TG, CH, SJ
L’Année Celtique contre les Montagnars.

48
IV, 63
JG n° 75
(…) Paysans frecz pousseront tost saugnars
Idem CH, SJ
TG
Paysans irez pulseront tost saugnars.

49
IV, 89
TG, BS
Les Satellites la mort desgouteront
CH Idem 1557, BR, SJ
Luy, fatalites la mort desgouteront
Note : Besson retrouve ici la version française de Garencières.

50
IV, 91
GR,TG
La nef de mole Monech n’approchera
CH, 1605, SJ
La nef Melle le Monech n’approchera.

51
IV, 97
TG
Esleu du peuple Lusitant pres de Pactole
CH
Esleu du peuple l’usitant pres de Gagdole
Idem 1557; BR, SJ
BS
peuple Lusitan près de Graulade.

52
V, 11
TG
Leur Regne plus Saturne n’occupera
CH, SJ
Leur regne plus Sol, Saturne n’occupera
BS
Leur regne plus Sol n’occupera.

53
V, 24
TG
La Loy & Regne par Jupiter levé
CH, 1557, BR, SJ
La Loy & Regne par le Soleil levé.

54
V, 32
TG
Le Ciel s’advance à changer ta fortune
CH , 1557, BR, SJ
Du Ciel s’advance vaner ta fortune.

55
V, 35
JG (VI 35) TG, 1605
Prendre un rameau de grand ouverte guerre
CH Idem 1557, BR, SJ
Un rameau prendre; du grand ouverte guerre.

56
V, 37
TG
Vingt mois apres tous eux & leurs records
CH, 1557, BR, SJ
Vingt mois apres tous & records.

57
V, 44
TG
L’une & l’avare commettra pat saincte acte
Idem BS
CH
L’ire & l’avare commettra par sainct acte
SJ
Note : est -ce une corruption de l’une & l’autre ?

58
V, 56
TG
Et long tiendra & de picquant courage
CH , 1557, BR, SJ
Et long tiendra & de picquant ouvrage.

59
V, 80
TG
Des deux lois l’unique lachera
CH, 1557, BR, SJ
Des deux loix l’une l’estinique lachera.

60
V, 85
TG
Gammares, locustes & cousins
CH, BR, SJ, 1557
Gamp marins locustes & confins
Note 1605 Gamp marins locustes & cousins.

61
V, 86
JG, TG, 1605
La grand cité sera par eux vexée
Idem 1605
CH, SJ, 1557
La cité grande sera par eux vexée.

62
V, 90
TG
Dans les Cyclades en Corintge & Larissa
CH, 1557, BR, SJ
Dans les cyclades, en perintge & larisse.

63
V, 100
TG
Du feu du Ciel à Tartas & Comminge
CH, 1557, BR, SJ
Du feu du ciel à Carcas & Cominge.

64
VI, 2
TG, JG
En l’an sept cens & trois (cieux en tesmoins)
Regnes plusieurs, un à cinq feront change

Idem 1605
CH, SJ
En l’an sept cens & trois cieux en tesmoings
Que plusieurs regnes un à cinq feront change
.

65
VI, 9
JG, TG
Aux temples saincts seront faits grands scandales
Idem 1605
CH, SJ
Aux sacrez temples seront faicts escandales.

66
VI, 3
TG, JG
Le Sceptre osté Corone de concorde
CH, 1557, BR, SJ
Ostera le Sceptre coronal de concorde
Note : 1605 Le Sceptre osté coronal de Concorde, version TG.

67
VI, 17
TG
Après les livres bruslez les Asiniers
CH, 1557, BR, SJ
Après les limes bruslez les asiniers.

68
VI, 23
TG, JG, 1605
Despit de Roy, numismes descriez
Peuples seront esmeus contre leur Roy

CH, 1557, BR, SJ
D’esprit de regne musnimes descriees
Et seront peuples esmeuz conte leur Roy
.

69
VI, 23
TG
Rapis onc fut en si piteux arroy
CH, SJ, JG
Rapis onc fut en si tres dur arroy.

70
VI, 28
GR
Le grand Pasteur mettra à port tout homme
TG, CH, 1557, BR, SJ
Le grand Pasteur mettra à mort tout homme.

71
VI, 39
TG
Auprès du Lac Trasym en la Tour prinse
CH, 1557, BR, SJ
Aupres du lac Trasymen l’azur prinse.

72
VI, 43
TG
Ou Siene & Marne autour vient arrouser
CH, BR, 1557
Où Signe & Marne autour vient arrouser
SJ
Où Seine & Marne etc.

73
VI, 50
GR, CH n° 66, BR, SJ, 1557
L’Estat changé, on querra bruit & los
JANT, TG
L’estat changé en fera bruit des os
Note : la version Garencières est isolée.

74
VI, 61
TG, 1605, JG
Chassé du Regne aspre loin paroistra
CH, 1557; BR, SJ
Chassé du Regne loing aspre apparoistra.

75
VI, 63
JG n ° 66, CH, 1605 GR, SJ
Puis longue vie au regne par grand heur
TG
Puis longue vie au regne par bonheur
On note dans ce cas que Garencières ne suit pas systématiquement Giffré de Rechac !

76
VI, 64
TG, JG, 1605
De tresve & paix terre & mer protesté
CH, SJ
De paix & tresve, terre & mer protesté.

77
VI, 69
TG, 1605
La grand pitie sera sans long tarder
JG
Grande pitié sera sans long tarder
CH, 1557, BR, SJ
La pitié grande sera sans loing tarder.

78
VI, 69
TG, JG
Passer les monts en faisant grand esclandre
Idem 1605
CH
Les monts passer commettant grand esclandre.

79
VI, 71
GR
Avant le jour qu’il ait l’ame rendue
TG, CH, 1557, SJ
Avant qu’il ait du tout l’ame rendue.

80
VI, 71
JG n° 43, CH, BR, 1557, SJ
D’aigles , lions, croix. Couronne vendue
TG et GR
D’aigles, Lions, croix, Couronne de Rüe.

81
VI, 73
GR
Contre Matrone secret cavé disant
TG, CH, SJ, 1605
Contre Modéne secret, cave disant.

82
VI, 79
TG
Pres de Tesin les habitants de Logre
CH, 1557, BR, SJ
Pres de Tesin les habitants de Loyre.

83
VI, 89
TG
Guespes & mouches feront amour fachez
CH
Guespes & mouches fitine amour fachez
Idem 1557, BR, SJ
BS
fetide amour fachez.

84
VI, 93
JG, TG
Rien ne sera que trop cuider viendra
Idem 1605
N. B. Probléme de rime avec viendra qui doit rimer avec fendroit.
CH, SJ
Rien ne sera que trop viendra cuider.

85
VI, 99
TG, BS
Monts Pyrenees luy seront faicts refus
CH
Monts Pyrenees & Poenus luy seront faicts refus
Idem 1557, BR SJ.

86
VI, 100
Fille de l’Aure etc
Absent dans 1557, BR et SJ, présent dans 1605 et JG.

87
VII, 12
TG
Ruser, Lectoure, les Agenois rasez
CH, 1557, BR
Refus Lectore, les Angenois rasez.

88
VII, 14
TG
Seront les Urnes des Monuments ouvertes
CH, 1557, BR
Seront les Cruches des monumens ouvertes.

89
VII, 17
TG
Le Prince rare en pitié & clemence
Après avoir la paix aux siens baillé
Viendra changer par mort grand cognoissance
Après grand repos le regne travaillé

JG n°45, BS p. 92
Par grand repos etc
CH
Le Prince rare de pitié & clemence
Viendra changer par mort grand cognoissance
Par grand repos le regne travaillé
Lors que le grand tost sera estrillé

1557, BR autre quatrain pour l’édition SJ.
Note : Ed. 1605 selon variante TG, sauf pour Par grand repos le regne travaillé.

90
VII, 23
TG, 1605
Puis que l’anneau on fera mal entendre
(1557, BR) quatrain différent pour l’édition SJ.
CH
Puis à Laigneau on fera mal entendre.

91
VII, 25
En fait VII, 20 dans l’édition SJ
Par longue guerre tout l’exercite exquise
TG, CH, 1605, 1557, BR
Par guerre longue tout l’exercice expuiser.

92
VII, 27
TG
Au coin de Vast la grand Cavalerie
CH, 1557, BR
Au cainct de Vast la grand Cavalerie.

93
VII, 32
TG
Qui Duc & Compte viendra tyranniser
CH, 1557, BR
Qui cave & compte viendra tyranniser.

94
VII, 40
TG
Au second guet seront par mort prouesses
CH, 1557, BR, pas de quatrain 40 dans l’édition SJ à 35 quatrains à la VII
Au second guet par mort seront prouesses.

95
VII, 42
TG
Quand Innocent tiendra le lieu de Pierre
Le Nizaram Sicilian se verra
En grands honneurs mais après il cherra
Dans le bourbier d’une Civile guerre

CH
Quand Innocent tiendra le lieu de Pierre
Le Nirazam Cicilien (se verra
En grands honneurs) mais après il cherra
Dans le bourbier d’une civile guerre

Note : L’édition 1605 n’a pas ce quatrain.
Absent de 1557, BR et SJ
GR ne mentionne pas ce quatrain mais celui de la version canonique alors que Garencières adopte le quatrain mazarinien (sous la forme Nizaram) et reporte donc le quatrain 43 en 44.

96
VIII, 14
TG, 1605, JG
Aveuglera par Libide l’honneur
Cogneu sera d’adultere l’offence

CH, BR
Fera aveugler par libide l’honneur
Sera cogneu d’adultere l’offence
.

97
VIII, 17
TG, 1605,JG
Le monde mis par les trois freres en trouble
CH, BR
Par les trois freres le monde mis en trouble.

98
VIII, 18
JG
Par son fruit sauve*
CH et TG
Par son fruit sauve comme chair crue mueyre.

99
VIII, 21
TG
Portant infection avec soy pestilence
CH, BR
Portant l’infect, non soy & pestilence.

100
VIII, 26
TG
De Carones trouvez en Barcelone
CH, BR
De Caton es trouvez en Barselonne.

101
VIII, 29
TG
D’or Capion, ravy puis tost rendu
CH, BR
D’or capion ravy & puis rendu.

102
VIII, 45
TG, GR
Louis puisné de Palais partira
CH, BR
Longs puis nay de Calais portera
Note : ce quatrain n’est pas commenté dans le JG.

103
VIII, 66
GR
D’un Roy & Prince Vulpian éprouvée
TG, CH, 1605
Loy, Roy & Prince Vulpian esprouvée.

104
VIII, 66
CR n ° 41
Pavillon Royne & Duc sous la comète
TG, CH
Pavillon Royne & Duc sous la couverte.

105
VIII, 75
CR GR
La mère à Tours du fils aura ventre enflé
CH, TG, 1605
La mère à Tours du fils ventre aura enflé
Note : Giffré de Rechac est sur la même longueur d’onde que Crespin.

106
VIII, 77
TG
L’Antechrist bien tost trois annichilez
CH Idem BR, CRESP n° 43
L’antechrist trois bien tost annichilez.

107
VIII, 78
TG
Un Bragamas avec la langue torte
Viendra des dieux rompre le Sanctuaire

CH, BR
Un Bragamas avec la langue torte
Viendra des dieux le sanctuaires

BS
Viendra des dieux piller le sanctuaire.

108
VIII, 79
TG
De Gorgon sur la fin sera sang perferant
CH
De Gorgon sur la sera sang perferant
BR, BS
De Gorgon la sera sang perferant.

109
VIII, 90
TG
Par vierge pore son lieu lors sera double
CH, BR
Par vierge porc son lieu lors sera comble.

110
VIII, 98
GR, TG, JG, 1605
Des gens d’Eglise sang sera epanché
CH
Des gens d’eglise sang sera espandu.

111
IX, 6
TG
Occuperont par nom d’Angle Aquitaine
Du Languedoc. I. Palme Bourdelois

CH, BR
Occuperont par nom d’Anglaquitaine
Du Languedoc Ispalme Bourdeloys
.

112
IX, 9
TG, JG, 1605
Nismes eau perir, Tholouse cheoir les Halles
CH
Perir eau Nymes, Tgolose cheoir les halles.

113
IX, 29
GR
Lors que celuy qu’à nul ne donne lieu
Abandonner viendra lieu pris non pris
Feu Nef par Saignes, Regiment de Charlieu
Seront Guines, Calais, Oye repris

TG, BR et 1605
Lors que celuy qu’à nul ne donne lieu
Abandonner voudra lieu pris non pris
Feu, Nef par saignes, bitument à Charlieu
Seront Quint, Bales repris
.

114
IX, 36
TG, GR, 1605, BS et JG
Un grand Roy prins entre les mains d’un jeune (...)
Trois freres lors se blesseront & meurtre

CH, BR
Un grand Roy prins entre les mains d’un Ioyne (…)
Lors que trois freres se blesseront & murtre

Note : Besson est dans la ligne des commentateurs.

115
IX, 39
GR, TG
En Arbisselle, Vezame & Crevari
De nuit conduis pour Savonne attrapée
Le vif Gascon, Givry, & la Charry
Derrièr mur vieux & neuf palais grapper

CH, BR
En Arbissel à Veront & Carcari
De nuict conduicts pour Savonne attraper
Le vif Gascon, Turby & la Scerry
Derrier mur vieux & neuf palais gripper
.

116
IX, 42
TG
De la Sicile pres Monaco unis
CH, BR
De la Secille peste Monet unis.

117
IX, 47
GR
Et de la mulcte auront contraire avis
Changé Monarque mis en pareille transe

TG, CH, BR
Et de la multe auront contre avis
Change monarque mis en perille pence
.

118
IX, 51
CR n° 5
Au point marin ceux qui machineront
Un qu’au monde sur tout ruinera

TG, 1605, CH
Au point mourir ceux qui machineront
Fors un qu’au monde sur tout ruynera

Note : Crespin est le seul à présenter cette variante.

119
IX, 54
CR n°5
Près de Ravenne qui pïllera la masque
CH, TG
Près de Ravene qui pillera la Dame
Note : Crespin est le seul à présenter cette variante.

120
IX, 55
TG, BS, JG, 1605
Si fort terrible que jeune, vieil, ne beste
CH, BR
Si fort horrible que ieune, vieux ne beste
Note : Besson est dans la ligne du Janus Gallicus et du modèle du Ruau.

121
IX, 70
TG
Par les cantons latins, Mascon eront
Idem 1605 Masconneront
CH, JG n°57
Par les cantons latins, Mascons ne ment.

122
IX, 87
TG
Du Montlehery Prelat docha exemple
CH, BR, 1605
Du mont Lehori prelat docha exemple.

123
IX, 89
TG, JG, BS
Rabaissera des Barbares l’effort
CH, 1605
Rabaissera des Arabes l’effort
CR n° 81, BR
Rabaissera des Arabes l’effaict (pas de rime).

124
X, 1
TG, 1605, BS, JG
Donnant le reste pour estre secourus
CH, BR
Damné le reste pour estre soustenus
Note : 1605 est ici rejoint par Garancières et par Besson.

125
X, 6
TG
Gardon a Nismes eaux si haut desborderont
CH, BR, CR n°72
Sardon Nemans si hault desborderont
Gardon Nemaus, si haut desborderont
.

126
X, 27
GR TG
Charles cinquiesme & un grand Hercules
Viendront le Temple ouvrir de main bellique
Une Colonnes, Jules & Ascan reculez
L’Espagne, clef, Aigle neurent onc si grand pique

CH, BR
Par le cinquiesme & un grand Hercules
Viendront le temple ouvrir de main bellique
Un Clement, Iule & Ascans recules
Lespee, clef, aigle, n’eurent onc si grand picque

CR
N° 65 pour les deux derniers versets, BS
Par le cinquiesme (...) Un Colonne etc
Note : on note que Besson rejoint ici Crespin.

127
X, 37
TG, 1605, BS, JG
Grande assemblée pres du Lac du Borget
Se rallieront pres de Mochmelian
Passants plus oultre pensifs feront projets
Chambray, Morienne, combat Saint Julian

CH, BR
L’assemblée grande pres du Lac de Borget
Se rallieront pres de Montmelian
Marchans plus outre pensifs feront proget
Chambry Moriane combat Sainct Iulian

Note : on a ainsi un axe associant les commentateurs à 1605 et à Besson.

128
X, 45
GR
Roy Orléans docha pour legitime
TG, CH, BR
Roy d’Orléans docha mur légitime.

129
X, 59
GR
Cinq Citoyens, Germains, Latins, Bressans
TG, CH, BR
Cinq Citoyens Germains, Bressans, Latines.

130
X, 61
TG
Betta, Vienne, Comorre, Sacarbance
CH, BR
Betta, Vienne, Emorre, Sacarbance.

131
X, 83
GR, TG
De Gasp, l’entour sera cogneu l’enseigne
CH, BR
De Gand l’entour sera cogneu l’ensigne.

132
X, 87
TG, BS
Aux Antipodes posera son genisse
CH, BR, 1605
Aux Antipolles posera son genisse
Note : Besson rejoint ici Garencières.

133
X, 94
TG
Nobeyront a ledict Hesperique
CH, BR
N’obey tout à l’edict d’Hespericque.

   En conclusion, on ne saurait exclure une certaine transmission orale des quatrains centuriques ou en tout cas de certains d’entre eux, ce qui expliquerait certaines variantes qui n’auraient d’autre raison d’être qu’un certain travail de la mémoire, conduisant à des inversions de mots, à des synonymes ou à des flottements homophoniques dus à la carence d’une référence écrite. Il nous semble, par ailleurs, avoir montré quelle fut l’influence du Janus Gallicus non seulement sur Giffré de Rechac et Théophile de Garencières, au niveau du commentaire lequel s’accompagnait souvent de l’adoption du texte du quatrain ainsi traité, mais sur les éditions type Du Ruau, lesquelles ne se contentèrent pas d’y récupérer les 141 Présages qui y étaient commentés mais en outre adoptèrent nombre de variantes notamment dans l’agencement des quatrains centuriques. On peut donc parler d’éditions en quelque sorte janussisées. Quant à l’édition Antoine Besson, elle se retrouve également souvent en phase avec le Janus Gallicus, ce qui nous incite à penser que l’édition de 1672, reprise par Théophile de Garencières, et dont la dite édition Besson est issue, en serait également marquée mais autrement parfois que la série Du Ruau. Un groupe semble, en revanche, avoir échappé à l’influence janussienne, celui que l’on pourrait appeler série Chevillot, ce groupe n’ayant jamais adopté les Présages et n’ayant pas suivi le Janus Gallicus dans ses variantes centuriques. Il convient néanmoins de nuancer l’opposition Du Ruau-Chevillot : d’abord parce que dans les deux cas, les éditions puisent dans les éditions parisiennes de la Ligue pour leurs annexes à la VIIe et à la VIIIe Centurie, parce qu’elles recourent toutes deux aux sixains, mais aussi, du point de vue qui nous intéresse ici plus spécialement, parce que les éditions Chevillot comportent les quatrains des Centuries XI et XII, lesquels ne figurent que dans le Janus Gallicus. Par ailleurs, tant Pierre Chevillot que Pierre Du Ruau, tous deux libraires à Troyes, associeront les Centuries avec le Recueil des Prophéties et Révélations, incluant notamment la traduction française du Mirabilis Liber, ce que semble ignorer Peter Lemesurier, dont le dit Mirabilis Liber est pourtant le cheval de bataille14, ouvrage, au demeurant, antidaté, ce dont le nostradamologue britannique ne semble pas avoir pris conscience.15 Un autre lien est à rappeler entre le Janus Gallicus et une édition des Centuries, cela concerne l’édition Macé Bonhomme 1555.16 Cela dit; la question des sources du Janus Gallicus, quant à elle, reste posée.

   Il n’en reste pas moins que des passerelles existent entre les commentateurs (Janus Gallicus, Giffré de Rechac, Chevalier de Jant, Théophile de Garencières) et l’état des quatrains centuriques. Certes, il n’est plus guère possible au XVIIe siècle de modifier radicalement une Centurie voire un quatrain mais par le jeu de variantes, le texte centurique continuera à évoluer jusque dans les années 1670.et ce non seulement en français mais aussi en anglais, cette évolution ne sera pas suivie par toutes les éditions et finalement ce sont précisément les éditions réfractaires aux suggestions des exégètes - soit la série Chevillot ou plutôt celle qui la précéda et qui est celle, à dix centuries - sans les sixains - de Benoist Rigaud 1568 - cf. aussi l’édition non datée du libraire lyonnais Jean Poyet - produite vers 1620 - qui imposeront, au XIXe siècle, leur traitement du canon, reléguant aux oubliettes les éditions des Centuries que l’on pourrait qualifier d’exégétiques.

Les éditions à 7 centuries (I-VII)

   On peut certes soupçonner les dites éditions exégétiques d’avoir été remaniées ; il n’en reste pas moins que sans ces remaniements, l’impact des Centuries eut-il été le même (cf. infra) ? A contrario, un autre groupe de Centuries aurait été moins touché par les impératifs du commentaire, ce serait le cas de l’édition d’Anvers 1590 qui est actuellement la plus ancienne édition à 7 centuries qui nous soit conservée intacte, celle de Rouen de 1589 étant tronquée. Encore convient-il de prendre en compte le premier volet de l’édition de Cahors. Ne parlons pas des éditions parisiennes dont nombre de quatrains ont été supprimés, notamment à la Centurie III (cf. infra).

   Il nous semble souhaitable de consacrer une étude comparative aux éditions à 7 centuries (I-VII), tout en sachant qu’il s’agit d’un stade intermédiaire entre les éditions à deux volets et à 10 centuries et les éditions de la première génération à six centuries (I-III et VIII-X), en prenant en compte l’appendice de 39 quatrains qui viendra se greffer par la suite étant entendu que pour la dite première génération nous ne disposons comme repère que la compilation des Prophéties dédiées à la puissance divine et à la nation française d’Antoine Crespin (1572).

   La première question qui se pose est la suivante : peut-on regrouper ces diverses éditions en un nombre plus limité ? Il ressort d’une approche comparative que l’édition Antoine du Rosne 1557-Utrecht est très semblable à l’édition de Cahors 1590. Elles ont toutes deux 42 quatrains à la VII, il leur manque à toutes deux le 100e quatrain de la VI, elles ont le même avertissement défectueux Legis Cantio et elles ont toutes deux des mots en majuscules, ceux de l’édition Antoine du Rosne se retrouvant dans l’édition de Cahors (I, 2 BRANCHES, IV, 34 CHYREN), cette dernière en ayant qui ne se retrouvent cependant pas dans la dite édition Antoine du Rosne. L’édition de Cahors comporte un motif au titre assez proche de celui du premier volet des éditions Benoît Rigaud, Héritiers Benoist Rigaud et Pierre Rigaud parues à la fin du XVIe siècle, à savoir une main tenant une sphère alors que l’édition Antoine du Rosne comporte une vignette “nostradamique” avec un personnage dans son étude.

   Le premier volet de l’édition Benoist Rigaud est également fort proche des deux éditions abordées ci-dessus, avec le même mot dans 1, 2 et IV, 34 en majuscules. Mais en fait ce sont strictement les mêmes mots qui sont en majuscules dans l’édition de Cahors et dans Benoist Riagud, 1568, à savoir, outre ceux déjà mentionnés : I, 16 ; II, 94 ; IV 27, 76 ; V, 23 ; V, 57.

   Il convient de mener aussi la comparaison avec l’édition Macé Bonhomme 1555, comportant une vignette nostradamique, laquelle édition comprenant des mots en majuscules. : I, 2 ; I, 16 ; II, 94 ; IV, 27 ; IV, 34. L’édition Macé Bonhomme a d’autres mots en majuscules qu’on ne trouve pas dans le corpus abordé présentement : IV, 19 (ROUAN) et surtout III, 96, strophe qui comporte deux mots mis en majuscules : FOUSSAN et TARPEE. Mais elle n’a que 3 centuries et demie.

   Quant à l’autre édition Antoine du Rosne 1557-Budapest, elle semble s’apparenter davantage à l’édition Anvers 1590 par son absence de mots en majuscules, l’absence d’avertissement latin et de 100e quatrain à la VI. Une différence importante cependant : 35 quatrains à la VII dans l’édition de 1590 contre 40 quatrains à la VII pour Antoine du Rosne-Budapest - mais avec un même quatrain final - sans parler du titre qui diffère; d’un côté “Les Prophéties de M. Michel Nostradamus” et de l’autre “Les Grandes et Merveilleuses prédictions de M. Michel Nostradamus” mais à la fin, l’édition d’Anvers renvoie aux “Professies de Nostradamus”. Autre différence : la Préface à César dans l’édition d’Anvers est datée du 22 Juin 1555 au lieu du Ier mars 1555. Mais la Préface à César est tronquée à la fin dans l’édition Antoine du Rosne et non dans l’édition d’Anvers. Enfin, alors que l’édition Antoine du Rosne comporte une vignette nostradamique, ce n’est pas le cas de celle d’Anvers qui dispose d’une marque de libraire.

   Il semble qu’il faille distinguer une première génération ne comportant pas de mots en majuscules (Anvers 1590, Antoine du Rosne 1557-Budapest) et une seconde génération en comportant un certain nombre (Antoine du Rosne 1557-Utrecht, Cahors 1590, Benoist Rigaud 1568, Macé Bonhomme 1555-Albi). On sera peut-être surpris de voir l’édition Macé Bonhomme à 4 Centuries être inclus dans le second groupe dans la mesure où son nombre limité de Centuries la désignerait plutôt comme antérieure aux deux groupes considérés. Il nous semble qu’il s’agit bien là d’une édition à 7 centuries tronquée, sans les Centuries V à VII ; le fait qu’elle dispose de 53 quatrains à la IV plaide, selon nous, dans ce sens car nous ne pensons pas qu’il ait jamais existé une édition à 4 centuries en dehors de cette édition Macé Bonhomme 1555, la dite édition nous semblant par ailleurs (cf. supra) marquée par le Janus Gallicus de 1594, dont on rappellera que le commentaire use et abuse de mots mis en majuscules, lesquelles nous semblent une marque de janussisation. Selon nous, comme nous l’avons exposé dans de précédentes études sur Espace Nostradamus, la première édition des Centuries était à six centuries (I-III et VIII-X) selon la numérotation canonique qui n’existait évidemment pas alors. Puis l’on passa à une édition comportant l’embryon d’une septième centurie, à 39 quatrains17 mais cette “septième” centurie correspond en réalité à la IVe centurie canonique. Quand les centuries VIII-X furent censurées, la VIIe centurie devint la IVe et les centuries qui la suivaient en huitième, neuvième et dixième position devinrent les centuries V, VI et VII, la VIIe Centurie n’étant pas complétée à la différence des autres de façon à constituer un ensemble ressemblant à l’ensemble initial (première génération) de six centuries suivies d’un appendice, d’où la fabrication de fausses éditions à sept centuries Antoine du Rosne 1557, mais avec un contenu fort différent, au moins pour moitié, de la vraie deuxième édition du début des années 1570 à six centuries augmentées de 39 articles. On notera d’ailleurs que l’édition Antoine du Rosne Utrecht comporte à la fin de la VI l’avertissement latin, marquant la fin de l’ensemble à six centuries, la VII se retrouvant en quelque sorte extra muros. Cette marque ne figure pas encore dans l’édition Antoine du Rosne Budapest, nous ne pensons pas qu’elle y ait été supprimée mais que l’insertion de cet avertissement latin soit une touche supplémentaire visant à renforcer le caractère d’authenticité de l’ensemble. On ne peut ainsi exclure que le Legis Cautio ait pu figurer à la fin de la toute première édition à six centuries, puis avoir été maintenue lors de l’addition de 39 articles mais cela supposerait dans ce cas que les faussaires des années 1580-1590 aient été bien informés de la configuration des éditions les plus anciennes des Centuries et notamment qu’ils aient eu en main, comme ils le prétendent d’ailleurs, l’édition Barbe Regnault datée de 1560/1561, laquelle devait déjà comporter le dit avertissement latin - suivie de la Centurie IV actuellement dans le canon - comme dans l’édition qui l’avait précédée. En fait, la VII sera complétée à hauteur de 4 quatrains pour parvenir elle aussi à 39 “articles”18 mais on continuera, par méconnaissance de l’enjeu, à ajouter d’autres quatrains parvenant ainsi, tout en gardant le même quatrain terminal déjà présent dans l’édition à 35 quatrains (Anvers, 1590) aux éditions à 40 quatrains (Antoine du Rosne, Budapest) et à 42 quatrains (Antoine du Rosne, Utrecht, Cahors, Benoist Rigaud 1568) sans parler d’éditions à 44 quatrains voire à 48 quatrains à la fin du XVIIIe siècle en englobant quelques quatrains de la septième centurie des éditions parisiennes de la Ligue.

   Il convient donc d’aborder la Centurie IV (initialement VII) telle qu’elle figure à ce titre dans le canon en l’appréhendant comme un supplément à la toute première mouture à six centuries (I-III, VIII-X), laquelle centurie connaîtra à nouveau son heure de gloire quand reparaîtront des éditions à quatre centuries sous la Ligue mais sans la marque de séparation à la fin de la IIIe Centurie, ni aucune marque indiquant que la Ive Centurie était additionnelle. On retrouve au début de la IV la mention de St Quintin (sic), au quatrième quatrain, échec militaire français datant de 1557 déjà évoqué en VIII, 54.19

VIII, 4 (et probablement début de VIII, 5) :
La grand cité d’assaut prompt repentin
Surprins de nuict, gardes interrompus
Les excubies & veilles saint Quintin
Trucidés, gardes & les pourtails rompus.

Le chef du camp au milieu de la presse
D’un coup de fleche sera blessé aux cuisses.

   Saint Quentin est associé au “grand Montmorency” évoqué en IX, 18. Le connétable Anne de Montmorency fut fait prisonnier avec six mille soldats venus porter secours à la ville de Saint Quentin assiégée depuis un mois par Emmanuel Philibert de Savoie pour le compte du roi d’Espagne. Ce fut un cuisant et imprévu échec pour Montmorency, célébré par un quatrain... daté de 1558, si l’on se fonde sur l’Epître à Henri II de juin 1558. Il y a là un problème : quel mérite pouvait-on avoir en 1558, en mentionnant St Quentin et Montmorency, respectivement à la VIII et à la IX, à annoncer un événement survenu en 1557, soit l’année précédente ? Et quel mérite, a fortiori, à le faire dans une addition de 1560, à la IVe/VIIe Centurie ? On imagine mal camper un Nostradamus s’adressant à Henri II et lui annonçant en juin 1558 le désastre de l’année précédente, quel beau prophète il aurait fait ? Et cependant, tel semble avoir été le scénario imaginé par les faussaires, au début des années 1570. Nostradamus annonce d’emblée qu’il a produit une miliade (de quatrains) et qu’il en offre les premières Centuries (selon l’édition Besson) et les dernières (selon le canon). C’est dire que ces Centuries, il est supposé les avoir composées, il y a déjà un certain temps. D’ailleurs, Nostradamus ne se permettrait pas de les présenter à Henri II s’il ne les avait en partie vérifiées sur des événements passés; ce qui importe, en fait, n’est pas tant ce qui a déjà eu lieu mais ce qui pourrait avoir lieu ultérieurement, et qui est annoncé de façon bien plus floue que ce qui est déjà connu, et dont nous avons d’autant plus de mal à nous faire une idée que ce qui est annoncé ne se produisit vraisemblablement pas, ce qui est le sort de ce type de prophétie traitant à la fois du passé et de l’avenir, à la façon du dieu Janus, qui donna son nom au mois de janvier, mois qui clôt l’année écoulée et inaugure le nouvel an.

   Etant donné qu’il est assez patent que le début de la IV se situe dans le prolongement des Centuries VIII-X qui la précédaient en réalité, cela rend d’autant plus incongrue la parution de cette édition à 4 centuries sans les dites Centuries. Par ailleurs, on peut se demander si la mise en avant de la Centurie IV sous la Ligue n’est pas tout simplement liée aux liens que la Ligue entretient alors avec l’Espagne du même Philippe II, dont on veut nous montrer que cette alliance était déjà annoncée, dès 1555, par Nostradamus; en fait, on évoque ainsi les événements de 1557-1559 qui avaient déjà évolué vers un tel rapprochement.

   En revanche, il est tout à fait inconcevable que le quatrain IV, 8 soit déjà paru en 1555, dans une édition Macé Bonhomme, deux ans avant le siège du mois d’août 1557 tout à fait imprévisible de cette ville, comme ce serait le cas si l’édition Macé Bonhomme 1555 était véritablement parue en 1555. Si édition Macé Bonhomme, il y avait pu avoir, elle ne saurait, en tout état de cause, comporter que trois centuries sans un tel quatrain bien invraisemblable.

   On suit mal Leoni quand il cherche à minimiser l’impact de Saint Quentin :

   “Unfortunately, nothing happened at the Battle of Saint-Quentin (two years after publication) to justify this verse (…) It felle by storm after a seventeen-day siege. But at least Nostradamus gets credit for prophesying the capture of Saint Quentin.”20

   Mais ce quatrain ne fait que prolonger, puisque selon nous plus tardif, les trois quatrains “quentiniens” déjà parus au sein de la première édition à six centuries (VIII, 54, IX, 29 et IX, 40). Tout se passe, bel et bien, comme si on avait voulu bâtir la réputation de prophète de Nostradamus sur l’annonce des événements liés à la déconfiture de Saint Quentin, laquelle allait déboucher en 1559 sur la Paix franco-espagnole de Cateau Cambresis : Il faudrait dresser une statue de Nostradamus à Saint Quentin, sur la Somme (Département de l’Aisne). A la différence de Varennes qui s’explique par le recours à des itinéraire, la présence répétée de Saint Quentin relève tout simplement de la manipulation, avec à la clef un hymne au rapprochement franco-espagnol, thème que l’on retrouvera d’ailleurs dans les sixains. Il semble bien que les réédition des Centuries puissent avoir été liées à un tel enjeu, souvent d’ailleurs conclu par un mariage, comme celui, en1559, de Philippe II avec la fille d’Henri II, Elisabeth - ce qui alimentera ses ambitions sous la Ligue pour le trône de France - de Louis XIII avec Anne d’Autriche, en 1615, sans parler de projets non aboutis tout comme les périodes de régence ont pu favoriser périodiquement celle de la traduction française du Mirabilis Liber21 :

   Un des morceaux de choix de ce thème se trouve dans la Centurie IV :

Quatrain IV, 5
Croix, paix, sous un accompli verbe,
L’Hespaigne & Gaule seront unis ensemble

   On retrouve en IV, 2, ce lien entre la France et l’Espagne voire l’annonce des mariages liés à la dite Paix :

Par mort la France prendra voyage à faire
Classe par mer, marcher Mont Pyrénées
Hespagne en trouble marcher gent militaire
Des plus grand dames en France emmenées.

   Mais rappelons que les six premières centuries et leur addition de 39 quatrains ne sont pas parues avant les années 1570. La mention de Venise au premier quatrain de la IV correspond d’ailleurs aux préoccupations d’alors : “Venise quiert secours estre donné”.22

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2

Quatrains manquants et éditions censurées

    On voudrait attirer l’attention sur le fait que la suppression, même momentanée, de certains quatrains pourrait avoir des raisons religieuses. Nous prendrons deux exemples devenus classiques, celui du quatrain IV 46 “Prends garde Tours à ta proche ruine” et VI, 100 “La fille de l’aure etc”, quatrains qui manquent dans certaines éditions des Centuries. Puis nous aborderons le cas de la genèse complexe de la Centurie VII, dont le nombre de quatrains a été assez fluctuant.

   Parallèlement à la notion de chronème, nous avons élaboré celle de chorème : si le chronème permet d’aider à dater un document, en introduisant un terminus, le chorème permet, quant à lui, de déterminer à quel camp le dit document appartient, en l’occurrence catholique ou protestant. Or, la suppression, la censure sont souvent plus éloquentes que l’addition.

   Prenons le cas de la IVe Centurie telle qu’elle se présente dans l’édition rouennaise de Raphaël du Petit Val, datée de 158823 :

   Les Grandes et Merveilleuses prédictions de M. Michel Nostradamus divisées en quatre Centuries

   R. Benazra précise qu’il y “manque les quatrains 44, 45, 46,47 de la Centurie IV qui se termine par le quatrain 53. Cette édition comporte 349 quatrains pour se terminer typographiquement à la dernière page du dernier cahier.”24 Entendons que le dernier quatrain de la IV est numéroté 53 mais que certains quatrains intermédiaires manquent.

   Que nous enseignent les quatrains manquants ? Ce n’est probablement pas par hasard que le quatrain 46 de la Centurie IV a été supprimé mais parce que ce quatrain et les trois autres étaient défavorables au camp Réformé. D’ailleurs, il est probable que l’Epître à Henri II et les Centuries VIII-X ont connu une éclipse à cette époque parce, comme on le sait, ils annonçaient la victoire du camp Bourbon-Navarre sur le camp Guise-Lorraine. Echange de bons procédés.

   Non pas que ces quatrains aient été composés au cours de ces années 1588-1589 mais précisément, ils n’en étaient que plus dangereux par l’influence qu’ils pouvaient exercer sur les esprits en ces dites années. D’où la suppression de quatre quatrains litigieux successifs.

   Très peu de temps après, en 1589, une édition comportant une centurie IV à 100 quatrains allait paraître chez le même libraire rouennais, sous le titre de Grandes et Merveilleuses Prédictions de M. Michel Nostradamus dont il y en y a (sic) trois cens qui n’ont encores jamais esté imprimées. On notera cette maladresse au titre que l’on retrouve dans les deux éditions Antoine du Rosne, 1557. Dans ce contexte, la parution d’une édition comportant les 53 quatrains de la IV comme c’est le cas pour l’édition Macé Bonhomme situe cette dernière dans le camp catholique, lequel veut croire à la fin de Tours, ville capitale des adversaires de la Ligue.

   On ne reviendra pas ici sur la genèse de cette IVe Centurie, laquelle est liée à la fausse édition Barbe Regnault 1560, dont le titre, repris par les éditions parisiennes ligueuses des années 1588-1589, comporte une addition de “39 articles” à la “dernière centurie” (pleine) et comment on est passé, au début des années 1580, à 53 quatrains. Il se trouve que les quatrains controversés se situent dans cette fourchette entre 39 et 53 quatrains et qu’ils sont d’inspiration anti-réformée.

   Le cas du quatrain IV, 46 est en fait selon nous à rapprocher de VI, 100, un quatrain qui, notamment, ne figure pas dans les éditions Antoine du Rosne, 1557, susmentionnées. Ce quatrain ne figure pas non plus dans l’édition rouennaise de 1589 qui n’a pas non plus l’avertissement latin, ce qui correspond exactement au cas de l’exemplaire de Budapest de l’édition datée de novembre 1557. Quant à l’exemplaire d’Utrecht, il ne comporte pas davantage le quatrain 100 mais dispose du texte latin sous la forme corrompue Legis Cantio.

   Or, ce quatrain 100 comporte un jeu de mots transparent concernant la ville protestante d’Orange et aucun Protestant n’apprécierait que l’on évoquât le sort funeste de cette ancienne cité romaine, autrefois centre réformé florissant.

   C’est dire que tout se passe comme si un certain nombre d’éditions des Centuries avaient été victimes de la censure protestante. Cela ne signifie pas pour autant que les éditions comportant ce manque soient toutes ipso facto situées dans le camp réformé mais qu’elles utilisent, probablement sans le savoir, des versions expurgées. Le propre d’une édition expurgée, c’est qu’on ne sait pas forcément ce qui a été supprimé. C’est comme celui qui ne mange pas de telle nourriture, cela ne fait sens que pour celui qui connaît les interdits alimentaires propres à certaines religions.

   On a donc le sentiment qu’avant qu’il y ait eu une édition expurgée, il a fallu qu’il y ait une édition antérieure qui ne le fut point et qui, elle, n’a pas été conservée, édition d’une inspiration guère favorable aux Réformés, d’où la double censure du quatrain Tours et du quatrain Orange, tous les deux figurant dans le lot des centuries initialement incomplètes : IV, VI, VII, rajoutées aux six premières Centuries complètes. Mais rappelons-le, l’absence des quatrains en question dans une édition ne signifie nullement qu’elle paraisse dans le camp réformé.

   Passons à la VIIe Centurie dont les premières éditions connues sont à 35 quatrains, c’est le cas de l’édition anversoise de 1590. A la différence de la Centurie IV, le quatrain 35 est bien le quatrain 35 et numéroté comme tel et rien ne prouve que des quatrains manquaient à ce stade de la formation de la VII.

   Ce qui nous intéresse, c’est de comparer cette Centurie VII avec les éditions Antoine du Rosne, Lyon,1557. Et avec l’édition Benoist Rigaud, Lyon, 1568, dont nous avons mis la date de parution en question, comme chacun sait.

   Signalons un problème à propos de l’édition rouennaise datée de 1589. En effet, on ne dispose pas de la fin de la dite édition mais on peut raisonnablement supposer qu’elle devait être identique aux éditions Antoine du Rosne 1557 avec lesquelles elles partagent (cf. supra) une impropriété du titre. R. Benazra écrit à son sujet : “Cet exemplaire se compose de 8 cahiers de 8 folios chacun. Sans doute manque-t-il un demi-cahier, soit 4 folios pour arriver au quatrain VII, 36 et 1 folio de plus pour arriver au quatrain VII, 40 ou bien il y a 39 quatrains à la centurie VII et il reste un folio blanc.”25 En attendant, l’exemplaire s’arrête à VI, 96.

   Or, si l’on admet que cette édition rouennaise a 40 ou 42 quatrains à l’instar des deux éditions Antoine du Rosne 1557, ne peut-on dire que cette édition est postérieure à l’édition anversoise datée de 1590 et qui, elle, ne comporte que 35 quatrains à la VII, en soulignant que les deux éditions, rouennaise et anversoise, ont le même titre, à savoir les Grandes et Merveilleuses prédictions etc. Edition anversoise qui ne comporte pas non plus le 100e quatrain de la VI ni l’avertissement latin et qui ressemblerait également fort à l’édition Antoine du Rosne 1557-Budapest, avec son titre également déformé - “dont il en y a” (sic) au lieu de “dont il y en a” - si elle n’avait 35 quatrains au lieu de 40. En tout état de cause, puisque l’édition Antoine du Rosne 1557 ne correspond, sur ce point, à celle d’Anvers, on peut raisonnablement supposer qu’elle pourrait correspondre à celle de Rouen Petit Val 1589, si l’on admet que ces éditions sont des copies antidatées des dites éditions du type “dont il en y a”. Mais cela impliquerait que l’édition anversoise ne fait que reprendre une édition plus ancienne, ce qui n’aurait rien d’étonnant puisque l’on a vu qu’elle comportait une censure à la fin de la VI, avec l’absence du quatrain 100 Orange, quatrain qui réapparaîtra dans le Janus Gallicus et dans les éditions modèle du Ruau, au XVIIe siècle, d’abord sous le titre de Prophéties de M. Michel Nostradamus selon la terminologie généralement en vigueur puis à partir de la Fronde, probablement pour éviter la confusion entre les deux “écoles” sous celui de Vrayes Centuries de Me Michel Nostradamus puis de Vrayes Centuries et Prophéties, le terme Vrayes revêtant un caractère polémique, impliquant une sorte de guerre des éditions.26

   Mais revenons à la composition de la Centurie VII, dans l’édition Saint Jaure, en observant que la dite Centurie manque dans les éditions parisiennes 1588-1589 alors qu’elle figure dans celle d’Anvers 1590 et éventuellement dans l’édition de Rouen, 1589, ce que l’on devra mettre également sur le compte de la censure puisqu’il semble bien que la Centurie VII, du moins à 35 quatrains, ait existé - avec le groupe IV 53 et VI 71 - dés le début des années 1580.

   Non seulement, l’édition St Jaure ne comporte que 35 quatrains mais l’agencement des dits 35 quatrains ne coïncide nullement avec celui des autres éditions connues conservées et cela pose problème car si on est là avec la reproduction de la première mouture de la VIIe Centurie, cela démontrerait que les éditions qui en diffèrent à la VII correspondraient nécessairement à des états plus tardifs. Et cela va bien au delà de la question de quelques quatrains que l’on aurait voulu supprimer, ce qui en tout état de cause ne nous semble pas avoir été le cas ici.

   Dès le troisième quatrain de la VII, on a un quatrain qui n’est qu’en cinquième position dans les autres éditions, à commencer par les éditions Antoine du Rosne que nous utiliserons en lieu et place de l’édition rouennaise dont nous n’avons pas copie. On se servira du reprint Lyon, Chomarat, 1993, introduit par R. Benazra, de l’exemplaire Budapest.

   C’est ainsi que les quatrains supplémentaires ne se situent nullement à la fin de la Centurie VII mais en sa première moitié (3, 4, 8, 20, 22 sur 40 quatrains), ce qui aboutit à bouleverser la numérotation de tous les quatrains de la Centurie VII, hormis pour les deux premiers. De deux choses l’une, ou bien des quatrains ont été supprimés dans l’édition d’Anvers ou bien des quatrains ont été ajoutés dans les autres éditions. Si on en avait supprimé, n’aurait-on pas conservé, comme dans l’édition rouennaise à 4 Centuries, pour le n° 53, la numérotation 40 pour le quatrain “terminal” ? Or; l’inverse n’est pas possible, on ne peut pas ajouter des quatrains et conserver le même numéro pour le quatrain terminal.

   On conçoit donc que les diverses éditions dont on dispose pour les années 1588-1590 ne constituent pas nécessairement un ensemble cohérent et qu’il ne suffit pas de les mettre à la suite les unes des autres en vrac, comme cela se pratique dans les bibliographies susnommées. Nous proposerons donc de procéder avec une certaine méthode et d’admettre pour commencer que si nombre d’éditions ne comportant que 99 quatrains à la VI existent, c’est bien qu’elles ont été précédées par une ou des éditions comportant 100 quatrains à la VI, lequel quatrain a d’ailleurs été conservé mais dans des éditions bien plus tardives, ce qui n’est le cas d’aucune des éditions datées des années 1588-1590, ni des contrefaçons antidatées qui en dérivent et notamment des éditions Antoine du Rosne 1557. Par ailleurs, si l’on connaît des éditions censurées, on n’en connaît que des avatars parus dans des villes nullement réformées, comme Anvers, qui appartient aux Pays Bas Espagnols, à moins d’admettre, ce qu’on ne saurait exclure, que l’édition de François de Saint Jaure est une fausse adresse, ce que l’on ne saurait exclure. Elmar Gruber faisait d’ailleurs remarquer que les lieux d’édition des Centuries étaient à prendre sous toute réserve. Il pourrait en être ainsi également des éditions rouennaises Raphaël du Petit Val, sauf à considérer que ces éditions reprennent des éditions réformées telles quelles, en maintenant, les suppressions, faute de pouvoir, pour ces libraires, restituer le texte d’origine, en ces temps troublés. On voit donc qu’il convient de se méfier tant de la date que du lieu d’édition et par conséquent de la mention du libraire.

   Mais d’autres problèmes se posent qui font comprendre à quel point on ne saurait se contenter de raisonner sur les seules éditions dûment conservées à ce jour, une telle approche frileuse du corpus ne nous paraissant nullement scientifique, tant elle en donne une image incohérente et disparate, contrairement à ce que d’aucuns s’imaginent. Il convient ainsi de garder à l’esprit la question des centuries incomplètes et notamment de la Centurie VI, qui ne comporte encore que 71 quatrains dans les éditions parisiennes 1588-1589 alors qu’elle en aura 99 dans l’édition St Jaure datée de 1590, après un passage, entre temps, par une édition intermédiaire non conservée à 100. Tout cela semble bien précipité et soudain! Il semble bien que les éditions parisiennes reprennent un état probablement plus ancien, quelque peu antérieur aux dites années 1588-1589 ; rappelons que l’édition rouennaise datée de 1589 comporte déjà au moins 96 quatrains à la Centurie VI et qu’elle est certainement tronquée.27 Or, la VIe centurie à 96 quatrains appartient à un stade postérieur à la VI à 71 ou 73 quatrains et nous avons la faiblesse de penser qu’il ne s’agit pas là d’une censure parisienne de plus de 25 quatrains mais de la réminiscence d’une Centurie VI conçue initialement à 71 quatrains, comme nous l’avons montré lors de précédentes études (sur Espace Nostradamus). On notera aussi que si dans les éditions parisiennes, on signale une addition après le 53e quatrain de la IV, cette mention ne figure plus dans l’édition d’Anvers de 1590 ni dans les éditions Antoine du Rosne 1557 et apparemment pas non plus dans l’édition de Rouen de 1589, du moins telle que nous la connaissons par la description sommaire qu’en donne R. Benazra.

   On aboutit ainsi à la thèse selon laquelle le contenu des éditions parisiennes conservées, même si celles-ci sont bel et bien parues en 1588-1589, serait sensiblement plus ancien que ne le laissent entendre leurs dates d’édition, ce qui ressort notamment de l’état dans lequel se trouve la Centurie VII, réduite à quelques quatrains (pris de l’almanach pour 1561) alors que dès 1590, la dite Centurie se présente avec 39 quatrains, pour ne pas parler des 42 quatrains du premier volet de l’édition de Cahors également daté de 1590, détail qui n’est pas signalé dans les Bibliographies de Chomarat et de Benazra, ces 42 quatrains à la VII se retrouvant au demeurant dans l’édition Antoine du Rosne 1557-Utrecht.

   Dès lors, ces éditions parisiennes n’en deviennent que plus intéressantes puisque correspondant à un état antérieur à celui des années 1588-1589, ce qui n’exclue pas des retouches, par ailleurs. Il conviendra également de se demander pour quelles raisons on procéda à de telles impressions d’un matériau centurique devenu quelque peu obsolète sinon archaïque. Cet archaïsme, au demeurant, n’est-il pas manifeste dans le sous titre récurrent dans tout ce groupe parisien d’éditions, à savoir reveues & additionnées par l’Autheur pour l’an mil cinq cens soixante & un de trente neuf articles à la dernière Centurie ?

   A en croire les bibliographies de Chomarat et de Benazra, qu’un tel intitulé se retrouverait textuellement dans une édition, non conservée, datée de 1560, chez Barbe Regnault28 alors que dans les éditions parisiennes en question, le nom du libraire parisienne n’est pas signalé. La question est de savoir de quand date véritablement cette édition Barbe Regnault qui sert ici de référence et qui est encombrante, à bien des égards, tant et si bien que beaucoup préfèrent l’ignorer et il est bien commode que le prétexte soit tout trouvé pour cela, à savoir qu’elle est introuvable bien que dûment signalée dans le Manuel du Libraire de Brunet (Supplément, tome II, reprint, Genève, Slatkine, 1990, p. 36), lequel nous semble assez digne de foi, le problème de son caractère de contrefaçon probable ne changeant rien à l’affaire, étant donné que ce n’est pas, loin de là, la seule édition des Centuries à se trouver dans ce cas.

   Cette édition est gênante parce qu’elle s’inscrit mal dans la chronologie des éditions supposées parues du vivant de Nostradamus. Car l’addition dont il s’agit ne peut, a priori, concerner que la IVe ou la VIIe centuries ou si l’on préfère ne peut se greffer que sur la IIIe ou la VIe centuries, faisant fonction de “dernière centurie” à laquelle est ajouté un appendice. Or, dans un cas comme dans l’autre, cela fait problème dans la mesure où il existerait une édition Macé Bonhomme à 53 quatrains à la IV, en 1555 et en 1557, donc dans les deux cas avant 1560, des éditions à 40 et 42 quatrains à la VII. Bien plus cette édition Barbe Regnault serait parue après la rédaction de l’Epître à Henri II, (juin 1558) où il est question du “reste” des Centuries constituant une miliade. C’est dire que l’on se passe très bien de cette édition mais que là où les choses se compliquent c’est que celle-ci est présente quelque part par le biais des éditions parisiennes de 1588-1589.

   Mais cette édition nous interpelle également, de toute façon, en ce qu’elle pose le problème de la date du passage d’une présentation posthume des Centuries à une présentation d’un texte censé paru du vivant de Michel de Nostredame. Comment cette contrefaçon s’articule-t-elle par rapport aux autres contrefaçons datées des années 1550-1560, à savoir celles portant les dates de 1555, 1557, 1568 et éventuellement 1558 ? A propos de l’édition de 1558, elle semble, en dépit de son absence, être mieux appréciée que l’édition Barbe Regnault. Abordons ce qu’en dit, dans sa “Chronology : Life and Afterlife”, J. Hogue :

   “Autumn 1558 Third Edition of Les Prophéties de M. Michel Nostradamus published by de Tournes. It included the final 300 of the planned 1000 quatrains in Centuries 8, 9, and 10 (...) c 1561. (...) Nostradamus releases a fourth edition of Les Prophéties de M. Michel Nostradamus published by Barbe Regnault, Paris. It included the Preface à César, Centuries I through Century 7, Quatrain 42, the Epistre (Letter) to Henry II, and Centuries 8 through 10”.29

   Selon Brunet, cependant, cette édition n’aurait comporté que sept centuries. Il semble que Hogue n’ait pas pris garde à l’addition de 39 articles et qu’il signale un intitulé abrégé comme le fait d’ailleurs Brunet et il a une bonne raison pour ce faire, c’est que l’on n’est nullement certain qu’une telle addition ait jamais figuré dans la contrefaçon datée de 1561, date qui figure in fine. Il s’agit là en réalité d’une reconstitution adoptée par Chomarat30 et Benazra. Chomarat cite à ce sujet Ruzo “d’après Brunet”, “exemplaire disparu connu par les copies de 1588 et 1589”. Or, Brunet ne propose nullement un tel rapprochement ! Il s’agit bel et bien d’une invention de Ruzo31 qui complète le titre figurant dans le Manuel de Brunet sans même recourir à des crochets. Ruzo, en outre, suppose que les éditions parisiennes sont nécessairement identiques à cette édition disparue, ce qui donnerait une centurie VI à 71 quatrains en 1560 alors qu’en 1557, la même centurie en aurait eu 99. Ce qui fait dire à R. Benazra : “Si cette édition a réellement vu le jour, il apparaît que l’éditeur parisien n’a point connu l’édition lyonnaise d’Antoine du Rosne (1557) puisque les copies (sic) de 1588 et 1589 ne nous donnent que 74 quatrains pour la VIe Centurie. De là à penser qu’il n’a point connu l’édition lyonnaise de 1558 avec la préface à Henri II - que les copies de 1588 et 1589 ne reproduisent pas - il n’y a qu’un pas que nous sommes tenu de franchir.“32

   Cela dit, le rapprochement entre les éditions parisiennes de 1588-1589 et l’édition Barbe Regnault n’est pas absurde et il est possible que Brunet n’ait pas rapporté le titre complet de la dite édition. Qu’est-ce qui a poussé à produire une telle édition qui ne semble guère compatible avec un bouclage des Centuries dès 1558 ? On rappellera d’abord que selon nous l’Epître à Henri II correspondait à l’édition Besson et n’était pas un aboutissement mais un point de départ de la mise en lumière des Centuries. Dans ce cas de figure, une addition était parfaitement concevable en 1560/1561, ce qui ouvrait la voie vers une “suite” aux six premières Centuries constituant le premier étage de la fusée. A une pseudo édition de l’Epître datée de 1558 et parue au début des années 1570 pouvait fort bien s’adjoindre une addition de 39 articles, qui aurait été réalisée au début des années 1560, à savoir à la suite de la mort d’Henri II, voire de François II, à ce détail près que l’Epître à Henri II n’était pas supposée être parue en 1558 mais seulement rédigée alors, tout comme les Centuries étaient supposées, selon l’expression du “Brief Discours sur la Vie de Michel Nostradamus”, avoir “longtemps gardé prison”. Il semble que le faussaire qui produisit peu de temps après le lancement des six premières centuries, soit la moitié du contingent initialement prévu, une suite, a cru qu’il avait bel et bien existé une édition de 1558 et donc qu’il pouvait tout aussi bien exister une édition augmentée en date de 1560, parue chez Barbe Regnault. C’est ainsi probablement que l’on bascula de la thèse posthume à la thèse d’une parution du vivant de Nostradamus, en fournissant des éditions antidatées.

   Mais à ce stade, on n’a encore confectionné ni l’édition Macé Bonhomme 1555 à 353 quatrains, ni les éditions Antoine du Rosne 1557, à 640 (Budapest) et 642 quatrains (Utrecht), éditions qui datent des années 1580 et sont calquées (cf. supra) sur les éditions de Rouen Raphaël du Petit Val (1588 et 1589), d’Anvers (1590) ou de Cahors (1590), autant d’éditions qui ignorent l’Epître à Henri II et ne jurent que par la Préface à César, datée de 1555 ; il était donc logique que le discours programmatique sur la miliade de la dite Epître au Roi ne fut pas pris en compte avec la date butoir de juin 1558.

   Comment dès lors situer la référence implicite à une addition survenue en 1560 ? Il nous semble que l’addition de 39 articles de la fausse édition Barbe Regnault n’ait rien à voir avec la douzaine de quatrains formant la Centurie VII dans les éditions parisiennes 1588-1589. Cela dit, on peut quand même se demander d’où est venue l’idée de constituer la dite Centurie VII avec les quatrains de l’almanach de Nostradamus pour 1561 et qui disposait des Présages du dit almanach, près de trente après sa date d’échéance. Précisons que si ces quatrains furent éliminés en partie dans les éditions des Centuries comportant 141 Présages par la suite, c’est sur la base des dits Présages connus par le truchement du Janus Gallicus, ce qui aurait fait double emploi. Mais ajoutons qu’alors, on ne disposait pas de l’ensemble des quatrains du dit almanach sinon l’on n’aurait pas conservé les Présages non commentés dans le Janus Gallicus. Il a donc bien fallu recourir à une source autorisée pour constituer la centurie VII telle qu’elle figure dans les dites éditions parisiennes et la source la plus évidente est le Recueil des Présages Prosaïques, daté de 1589, que l’on ne connaît actuellement qu’en manuscrit (Bibl. Mun. Lyon La Part Dieu) édité en partie par B. Chevignard.33

   Revenons sur un certain nombre de données : les éditions parisiennes sont les seules qui comportent 71 quatrains à la VI et cela leur donne un net caractère d’ancienneté par rapport aux autres éditions contemporaines. La VIe Centurie s’achève sur le quatrain “Quand on viendra le grand Roy patenté etc”. On connaît une édition parisienne augmentée, non datée, chez Pierre Ménier, avec 73 quatrains à la VII. Or, ces 73 quatrains se retrouveront à leur place dans l’édition d’Anvers 1590 ; il y a donc bien une filiation entre les éditions parisiennes et l’édition François de St Jaure. En revanche, nous pensons que les 35 quatrains de la Centurie VII de la dite édition anversoise correspondent à un état antérieur aux 12 quatrains de la dite Centurie VII des éditions parisiennes, et ce d’autant qu’on ne retrouve pas les dits quatrains au sein de la Centurie VII de l’édition anversoise, à la différence de ce qu’on avait pu observer dans le cas de la Centurie VI.

   Précisons, pour éviter toute confusion, que l’édition Barbe Regnault à 7 centuries n’avait rien à voir avec les éditions à 7 centuries telles qu’elles apparaissent dans les années 1588-90 et ce, pour la simple raison, que les 7 centuries en question étaient les suivantes I, II, III, VIII, IX. X plus un appendice de 39 articles et non les centuries I à VII, les ajouts des centuries V, VI et VII n’ayant pas alors encore eu lieu. Il est donc bien dommage que l’on ne puisse connaître avec plus de détail le contenu de la dite édition Barbe Regnault, laquelle devait recouper la compilation crespinienne34 et l’on voit à quel point Daniel Ruzo faisait fausse route en croyant que le contenu de cette édition se retrouvait in extenso dans les éditions parisiennes de la Ligue.

   Précisément, les éditions parisiennes appartiennent à un tout autre stade que celui de l’édition Barbe Regnault, celui où les Centuries VIII-X ont été évacuées ainsi que l’Epître à Henri II, qui devait ouvrir l’édition Barbe Regnault, et remplacées par des centuries incomplètes et la Préface à César. Mais déjà les centuries parisiennes comportent une centurie IV “complétée” avec cependant la mention d’une addition qui n’est pas attestée ailleurs. Ce qui tendrait à montrer que le processus de “remplissement” s’effectua au moins en deux temps et ne concerna d’abord que la IV. Ajoutons que ce que désigne en réalité par “39 articles” l’édition Barbe Regnault, c’est le point de départ de la IV, recoupé par la compilation de Crespin et ce n’est que dans un deuxième temps que la IV passa à 53 quatrains.35

   Pourquoi donc ce cafouillage à propos de la VII dans les éditions parisiennes ? Ajoutons que ces éditions comportent aussi une centurie VIII embryonnaire à six quatrains sans aucun rapport avec la Centurie VIII du “second volet” canonique, introduit par une Epître à Henri II remaniée. Et, encore une fois, pourquoi ces Présages infiltrés dans le cadre centurique ? Nous sommes donc bien ici, à nouveau, en face d’une censure plus massive encore que les coupures signalées à propos de la Centurie VI et de la Centurie IV (cf. supra). Mais, cette fois, la censure comporte un élément de substitution certes assez maigre mais pouvant donner le change.

   Le moins que l’on puisse dire est que les faussaires étaient bien équipés : quatrains de l’almanach pour 1561 plus page de titre de l’édition Barbe Regnault, datant des années 1570, ce qui n’était certainement pas à la portée du premier venu. On a là un tout autre gabarit que pour les autres censures signalées et qui ne font appel à aucun savoir nostradamique quelque peu pointu. On songe de fait à un Jean Aimé Chavigny que l’on peut croire assez bien équipé pour ce genre d’opération, sans parler de la conservation d’une édition déjà ancienne comportant une centurie VI encore non comblée.

   Bien entendu, l’étiquette ne correspond pas au contenu et on est loin de trouver une addition de 39 articles à la suite de la dernière centuries comme indiqué au titre. Mais il y a quelque clin d’oeil à placer précisément en VII les quatrains de l’almanach pour 1561, contemporain de la dite édition Barbe Regnault, ce qui confère un caractère d’authenticité à la Centurie VII ainsi visée, se présentant comme une addition par rapport à la Centurie VI à 71 quatrains. On ne suivra donc pas R. Benazra36 quand il adopte la thèse de Ruzo selon laquelle l’édition Barbe Regnault se retrouverait à l’identique dans les éditions parisiennes de 1588-1589 : “Nous ignorons pourquoi ils furent supprimés (sic) de l’almanach imprimé par Barbe Regnault & intégrés dans l’édition 1561 des Centuries.”

   Exit, en tout cas, dans les éditions parisiennes de la Ligue, la vraie Centurie VII avec ses 35 quatrains (cf. édition d’Anvers) ; tout se passe comme si la Centurie VI était conclusive, était la “dernière” centurie, suivie d’un appendice dont on n’aurait, pour quelque raison, conservé que 12 quatrains sur les 39 ; cela expliquerait, au demeurant, pourquoi l’avertissement latin se place à la fin de la VIe Centurie car on voit mal un tel avertissement ne pas apparaître tout à la fin d’une édition ; voilà probablement qui indique une volonté déterminée d’évacuer la VII. L’édition d’Anvers, bien qu’ayant rétabli la Centurie VII dans ses droits ne modifiera pas pour autant l’emplacement de l’avertissement latin, et dans la foulée ce sera aussi le cas de l’édition Antoine du Rosne 1557 Utrecht et de l’édition Benoist Rigaud 1568 et finalement de la plupart des éditions, à la seule exception des éditions parisiennes et de l’édition d’Anvers ainsi que de l’édition Antoine du Rosne 1557 Budapest. Nous en déduirons que l’édition d’Anvers correspond à un état antérieur à la censure de la VII alors que les autres éditions correspondent à un état postérieur, où la Centurie VII est rétablie mais cette fois avec un nombre de quatrains supplémentaires, atteignant 42 quatrains et 44 par la suite, dans certaines éditions du XVIIe siècle. Ajoutons que l’avertissement latin tel qu’il figure dans les éditions de la fin du XVIe siècle conservées est fautif, comme l’a bien montré P. Brind’amour37 et qu’il faut donc supposer l’existence d’une édition plus ancienne comportant Legis cautio au lieu de Legis Cantio. On notera que la forme correcte a été maintenue dans la série Du Ruau, ce qui montre bien que la dite série, par delà sa dette envers le Janus Gallicus (cf. supra) doit s’originer en partie dans une édition de la fin du XVIe siècle non conservée.

   On notera, par ailleurs, la quasi similitude entre les 39 articles indiqués dans l’édition Barbe Regnault et les 35 quatrains qui deviendront d’ailleurs assez vite 40 et 42, comme l’attestent les éditions Antoine du Rosne 1557 et l’édition de Cahors, 1590, sans parler d’une édition à 39 quatrains à l’adresse de Pierre Chevillot.38

   Il y avait probablement quelque chose d’insupportable dans la Centurie VII, aux yeux des partisans de la Ligue et l’on voit ainsi à quel point les Centuries étaient l’objet d’un enjeu au coeur même des Guerres de Religion. En effet, elle n’est pas sans point commun avec le groupe VIII-X lequel annonçait la victoire de Mendosus sur Norlaris.

VII, 19
L’ensevely sortira du tombeau
Fera des chaînes lier le fort du pont
Empoissonné avec oeufs de barbeau
Grand de Lorraine par le Marquis du Pont.
(le fils du duc de Lorraine)

   Cela fait écho à X, 18 :

Le ranc Lorrain fera place à Vendosme etc.

   Et à X, 50 :

Lorrain deluge trahison par grand hurne etc.

VII, 24
Le grand duc d’Albe se viendra rebeller
A ses grands pères sera le tradiment
Le grand de Guise le viendra debeller
Captif mené & dressé mouvement.

   C’est la seule occurrence dans toutes les Centuries où le nom de Guise soit indiqué en clair.

   En amorçant une nouvelle Centurie VIII, n’était-on pas, en quelque sorte, en train d’esquisser un nouveau train de quatrains voué à atteindre un jour à la miliade, espérant ainsi avoir rejeté dans les limbes les Centuries VIII-X ? On nous objectera, peut-être, que le Janus Gallicus fera bel et bien bonne figure aux dites Centuries. Mais ce sera en 1594 et entre temps, beaucoup d’eau aura coulé sous les ponts - “Paris vaut bien une messe” - et Jean Aimé de Chavigny retourne sa veste. Mais l’Epître à Henri II ne retrouvera jamais sa position première et devra désormais se contenter de présenter ce que l’on nomme le “reste de la miliade”.

   R. Benazra a souligné39 les particularités de la Centurie III telle qu’elle se présente dans les éditions parisiennes - et telle qu’elle n’était certainement pas dans l’édition Barbe Regnault 1560, il s’agit d’une véritable purge qui concerne une quarantaine de quatrains jugés indésirables :

   “Cette édition (de 1588) supprime 12 quatrains de la IIIe Centurie : 18, 19, 33, 34, 35, 38, 39, 40, 41, 42 et 49 qui sont remplacés par des quatrains répétés : 11 de la centurie I : 59, 61, 21, 87, 23, 64, 44, 16, 20, 83 et 58 et un de la IIe centurie : 27.

   Cette édition supprime 5 quatrains de la Ve centurie : 16, 17, 18, 19 et 20 et les remplace par (III. 30), (II, 45), (II, 24), (II,.40) et (IIII, 25).

   La VIe centurie va jusqu’au quatrain 71 dans cette édition. Mais dans ces quatrains on en a supprimé 21 (...) Et on les a remplacé (s) etc.”

   Dans tous ces quatrains répétés, l’ordre des vers a été changé pour dissimuler la répétition etc.”

   On relèvera notamment le cas du quatrain III, 41 :

Bossu sera esleu par le conseil
Plus hydeux monstre en terre n’apperçu
Le coup volant Prelat crevera l’oeil
Le traitre au Roy pour fidelle receu.

   Il semble que ce quatrain désigne le Prince de Condé, qui était, note Le Pelletier40, bossu, “hunch-backed”41, assassiné en 1569, ce Louis de Bourbon ayant inspiré un grand nombre de commentaires du Janus Gallicus et de la part de Giffré de Rechac. Or ce quatrain qui désignerait un des chefs du parti protestant - son fils prendra la relève aux côtés d’Henri de Navarre - est supprimé dans les éditions parisiennes et remplacé par un autre (cf. supra). A priori, ce quatrain aurait pu indisposer plutôt les Huguenots, ce qui expliquerait pourquoi l’édition d’Anvers le restitue. En revanche, la suppression de la Centurie VII serait bien l’oeuvre des Ligueurs avec la suppression du quatrain évoquant défavorablement le duc de Guise. On voit donc que les censures des deux bords se croisent et qu’elles soient adoptées par inadvertance par le camp qui aurait été intéressé à rétablir tel ou tel quatrain disparu.

   Ce sera également le cas des quatrains issus de l’almanach pour 1561 et dont l’ordre des versets aura été changé pour constituer une Centurie VII de fortune. Mais ces changements internes, à notre avis, n’ont pas affecté pour autant le nombre global de quatrains de chaque centurie ; bien au contraire, il semble que l’on ait tout fait pour sauver les apparences : il était donc important que la VIe Centurie se terminât par le quatrain 71. De telles contrefaçons se doivent à la fois d’éliminer les quatrains qui fâchent sans pour autant éveiller les soupçons : plutôt que de se fatiguer à produire de nouveaux quatrains, ne valait-il pas mieux, en effet, en déplacer certains authentiques, en spéculant sur le manque de vigilance et de culture nostradamique du lecteur.

   En conclusion, un constat s’affirme : plus de la moitié des éditions parues au XVIe siècle n’ont pas été conservées ni même répertoriées et celles qui l’ont été ne sont probablement pas les plus importantes, même si c’est largement grâce à elles que l’on peut sinon les reconstituer du moins déterminer leur profil. Plus que jamais, pour l’historien, la carte - c’est-à-dire les documents qui nous sont parvenu - n’est pas le territoire - ce qui a vraiment existé. En examinant les travaux d’un Edgar Leoni, composés dans les années Cinquante et notamment sa “Nostradamus Bibliography : Chronological List of Original Titles”42, on s’aperçoit qu’à cette époque, un chercheur disposait de fort peu de documents, qu’une grande partie de ceux qu’il signalait étaient plus ou moins introuvables ou inaccessibles. Depuis lors, les choses ont considérablement changé et la liste des documents manquants s’est énormément réduite mais cela a eu des effets pervers car on arrive au point de ne plus prendre en compte le moindre document non disponible, passant ainsi d’une extrême à l’autre d’autant que l’on tend à survaloriser les pièces exhumées et à minimiser le rôle des pièces qui n’ont pas eu l’heur d’être conservées ou en tout cas localisées. Or, se contenter d’élaborer une chronologie des éditions des Centuries sur la base des seuls documents parvenus s’avère une gageure, surtout, si de surcroît, on prend pour argent comptant les dates figurant sur les pages de titre et en bas des Epîtres, en voulant organiser la dite chronologie sur une telle base. Il semble qu’une nouvelle ère de la recherche nostradamologique soit en train de s’ouvrir et qui exige des qualifications particulières qui semblent manquer à ceux qui ont animé l’ère précédente.

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3

La transformation des quatrains centuriques
à partir de la fin du XVIe siècle

    De quand datent les toutes dernières modifications du canon centurique ? Il convient de prendre en compte non seulement l’ajout ou la soustraction de quatrains mais la modification de certains mots au sein de certains quatrains, laquelle modification a pu, dans certains cas, conférer aux dits quatrains un impact qu’ils n’auraient pas eu autrement, en cet âge d’or du nostradamisme qui coïncida avec le gouvernement de Mazarin et, à partir de 1661, le début du règne personnel de Louis XIV, soit un siècle après le prétendu premier âge d’or des années 1550-1560, qui ne vit d’ailleurs paraître pas la moindre édition des Centuries.

   C’est ainsi que nous avons insisté précédemment sur les interactions entre commentaires et éditions des Centuries ; encore faudrait-il en prendre la pleine mesure et se demander si les quatrains ne sont pas retouchés de façon à permettre une certaine interprétation, sans parler de certaines traductions particulièrement forcées, telles celles que l’on trouve dans le Janus Gallicus, du français vers le latin ; c’est notamment le cas, nous semble-t-il du quatrain I, 35 associé à la mort d’Henri II. Nous voudrions également nous arrêter dans cette étude sur un phénomène qui commence à nous intriguer, à savoir le fait que certains personnages soient désignés sans ambages au sein de tel ou tel quatrain nostradamique.

La fortune tardive du quatrain I, 35

   On connaît la légende dorée figurant dans tant de biographies qui veut qu’à la mort inopinée d’Henri II, en 1559, on aurait constaté à quel point le 35e quatrain de la première Centurie était prémonitoire. Il fallut en fait attendre 1614 et l’Histoire et Chronique de Provence de Caesar (sic) Nostradamus (...) jusques à la Paix de Vervins (entre la France et l’Espagne, 1598), Lyon, chez un autre Rigaud, Simon (BNF Fol Lk2 1408A) de son fils Caesar de Nostradamus, pour que ce quatrain soit mis en vedette. César ne cite (p. 782) - il importer de le souligner - que les trois premiers versets, donc sans le verset qui par la suite sera retouché.

   “Infortune coup de lance qu’un certain personnage excellent sembloit avoir montré au doigt à l’un de ses quatrains prophétiques quelques ans auparavant, où il chante ces mesmes vers :

Le Lyon jeune le vieil surmontera
En champ bellic par singulier duelle
Dans cage d’or les yeux luy crevera


Prophétie à la vérité estrange, où pour la cage d’or se void le timbre Royal au vif, qui accordant merveilleusement bien avec ce qu’il en avoit dit en quelque autre endroit en ces termes courts & couverts, L’orge estouffera le bon grain. Car non seulement le nom de celuy qui porta ce coup de lance tant malheureux est exprimé, ains (mais) ie ne scay quel mystic pronostic de la nouvelle doctrine qui tascheroit d’estouffer la pure & orthodoxe creance de plusieures hommes deceus. Ce que l’experience fait voir depuis soixante ou septante ans.”

   En marge, il est indiqué à propos de ce “personnage excellent” : “Michel de Nostradamus en ses centuries & propheties”.

   Le texte “L’orge estouffera le bon grain” n’appartient à aucun quatrain et d’ailleurs ne le prétend pas forcément - il peut s’agir de l’extrait d’une prédiction en prose - mais le Janus Gallicus (n° 276) fait déjà le rapprochement avec Gabriel de Lorges, comte de Montgomery, à propos de III, 30, pour l’an 1574, année de l’éxécution de Montgomery, quinze ans après les tragiques événements, avec un passage appartenant à une publication de Nostradamus pour l’an 1552, dont l’original n’est pas conservé et dont le texte pourrait avoir été rédigé post eventum : “Certes le Grain (entendant d’orge) sera cause de grande mutinerie &t trouble. Or chacun scait qu’on appelait autrement ce Comte, le Capitaine Lorges.” Mais si en français on a :

Celuy qu’en luite & fer au fait bellique
Aura porté plus grand que luy le pris
,

   dans le texte latin, placé en vis à vis, on a :

Qui se maiorem certamine vincet equestri
Et sparget ludens horrendi semina belli.

   Commentaire :

   “Montgomerium Comitem intelligit, qui in hastiludio illo celebri, quod exhibitum est Lutetiae anno Domini 1559. Henricum secundum huius nominis Regem interfecit”.

   Le français “grand” est rendu par “semina”, la semence, le grain.43 Il semble bien que l’on veuille lire “grain” là où est écrit “grand”.

   Il convient de rapprocher ce passage de celui qui figure dans une mouture contrefaite de la Prognostication nouvelle pour 1562, Paris, Barbe Regnault :

   “Comme quand j’en mis : Lors qu’un oeil en France regnera. Et quant le grain de Bloys son amy tuera”.44

   Or, toutes les éditions des Centuries que nous connaissons comportent :

En l’an qu’un oeil en France regnera
La Cour sera en un bien facheux trouble
Le Grand de Bloys son ami tuera
Le regne mis en mal & doubte trouble.

   On note que les deux versets cité dans la Prognostication Nouvelle pour 1562 ne se suivent pas dans le quatrain centurique et surtout que l’on “le Grand de Bloys” et non “le grain de Blois”. Pour le Janus Gallicus (n° 51, p. 68), ce quatrain désigne le Trouble d’Amboise de 1560 et non la mort d’Henri II. En revanche, pour les faussaires, il faut lire carrément “grain” et non “grand” et y trouver une allusion à Gabriel d’Orges, qui aurait ainsi été désigné par le “grain” (d’orge). La citation de la dite Prognostication est donc fautive et infléchit un verset aux fins du commentaire.45 Or, l’expression “Le Grand”, quand elle ne sert pas d’épithète, désigne dans la terminologie centurique le Roi, tout comme probablement “noir”. Le “grand de Bloys”, c’est le Roy de Bloys, expression que l’on retrouve en clair en VIII, 38 et VIII, 52 : “Le Roy de Bloys dans Avignon régner”, le seul verset à figurer à deux reprises et qui, plus est, à quelques quatrains d’intervalle. On trouve également l’équivalent grand pour roi dans le Présage pour janvier 1559 : “Plus le grand n’estre”, c’est-à-dire “Le Roi n’est plus”. Notons que le Présage pour le mois suivant, février, commence, lui, ainsi : “Grain corrompu”, qui pourrait tout à fait référer à Lorges. Ces deux versets qui commencent l’année 1559 sont d’ailleurs associés à la mort du Roi dans le Janus Gallicus qui confirme cette clef (n° 34, p. 58) :

   “Plus le Grand n’estre : Mort du Roy Henry II ceste année, à laquelle succèdent tous préparatifs de troubles”.46 Ces deux vers de l’almanach disparu pour 1559 se retrouvent dans la traduction anglaise, l’Almanack for the year of our Lord God 1559 (Bibl. Henry Sutton) : “The great to be no more” et “Grayne corrupted”.

   Il s’agirait donc là d’un succès prédictif, et il est possible que la version anglaise soit parue après la mort du Roi de France. Cela dit, la forme “Plus le Grand n’estre” appartient au langage des Prophéties Perpétuelles - auquel fait écho Couillard dans ses Prophéties (1556) - et elle est aussi commune dans l’interprétation des comètes - elle ne visait pas nécessairement Henri II en tout cas pas de façon suffisamment imagée, on lui aura préféré un quatrain comportant le mot “oeil” (III, 55) ou “yeux” (I, 35). Mais historiquement, c’est bien le début du quatrain de janvier 1559 qui dut marquer les esprits par son adéquation avec l’année sinon le mois du drame, alors que les quatrains en question, si même ils avaient existé alors auraient été enfouis parmi des centaines d’autres, et qui, plus est, sans le moindre cadre chronologique. Précisons tout de même que l’on retrouve cette formule, mot pour mot, dans l’almanach pour 1563, pour le mois de mars : “Le Grand plus n’estre tout le monde finir”.

   Rappelons que Nostradamus composait ses quatrains en mettant bout à bout des présages et que chaque quatrain en comportait plusieurs parfois même chaque verset.47 Un même présage peut donc figurer à plusieurs reprises mais avec une suite différente du verset concerné. Cette observation nous fait précisément toucher du doigt la différence entre les Présages et les quatrains centuriques. Signalons, en passant, que l’anagramme choisi par Nostradamus pour désigner les Lorrains est Lorvarin et non pas Norlaris, comme le montre le Présage pour octobre 1562.

   On voit mal, en tout état de cause, l’auteur même du quatrain III 55 déformer son texte en changeant “Grand de Bloys” en “Grain de Bloys”, il s’agit là d’une interpolation dans l’Epître à Jean de Vauzelles, placée en tête de la Pronostication Nouvelle pour 1562. Dans les Présages, la forme “Le Grand” est tout à fait courante à l’époque même où est rédigée l’Epître à Vauzelles, comme on vient de le voir pour l’almanach de 1563, lequel comporte pour janvier “le Grand tenu captif”, ce qui annonce quelque capture d’un Roi, qui aurait subi le même sort qu’un François Ier devant Pavie, pronostic apparemment moins heureux que celui de l’almanach de 1559, ce sont là les aléas et les vicissitudes du métier de pronostiqueur.

   Quant à la référence marginale à Michel de Nostradamus, dans le passage de l’Histoire et Chronique de Provence, elle semble quelque peu incongrue dans la mesure où César ne le désigne pas comme étant son père bien qu’il signe son livre, Caesar de Nostradamus et non de Nostredame. Ce qui retient aussi notre attention dans cette note, c’est la formule “Nostradamus en ses centuries & prophéties” car “centuries et prophéties” est un intitulé qui ne s’imposera que plus tard, à partir de 1650 (édition de Leyde), avec les Vrayes Centuries et Prophéties, édition qui mettra précisément l’accent sur le quatrain I, 35, cher à César de Nostredame, ce qui pourrait laisser entendre que César ait pu jouer un certain rôle dans la mise en place d’une édition commentée des quatrains centuriques. En tout cas, César s’y connaissait en astrologie, comme en témoigne son Epître, datée de mai 1614, adressée au jeune Louis XIII, en tête de son Histoire, où il évoque “les Cieux, les astres amys, leurs aspects très favorables”.

   La formule figurant dans l’Histoire et Chronique - on notera le goût des titres redondants comme dans Centuries et Prophéties - “L’orge estouffera le bon grain” fait apparaître “orge” aux côtés de “grain” mais commente avant toute chose “orge” - “le nom de celuy qui porta ce coup de lance tant malheureux y est exprimé”, il s’agit bien ici de Gabriel de Lorges.

   On aura donc noté que César ne s’arrête pas sur le 4e verset - à la manière du commentaire du JG qui est tout à fait disposé à ne prendre qu’une partie des versets d’un quatrain pour un événement et le reste pour un autre événement - ce qui ne sera pas de l’avis des éditeurs des Centuries et Prophéties qui incluront le dit verset mais au prix de la retouche d’un mot clef ; c’est ainsi, il semble bien, que lorsque ce quatrain fut finalement mis en avant, au sein d’une édition des Centuries, il avait quelque peu changé d’aspect.

   En effet, l’édition d’Amsterdam 1668 tout comme l’édition Besson comportent pour le fameux quatrain I, 35 une variante “playes” à la place de “classes”, ce qui montre d’ailleurs à quel point “classes” était gênant, qui veut dire “flottes” !

   L’on trouve cette forme - “playes” - en 1656 chez Giffré de Rechac48 chez Théophile de Garencières, tant en français qu’en anglais49 :

French
Le lion ieune le vieux surmontera
En champ bellique par singulier Duelle
Dans Cage d’or Loeil il luy crevera
Deux playes une, puis mourit mors cruelle.


English
The young Lion shall overcome the old one
In Martial field by a single Duel
In a Golden Cage he shall put out his Eye
Two wounds from one, then he shall die a cruel death.

   L’édition Garencières ou du moins celle dont il se sert se permet de remplacer “les yeux” par “l’oeil”, de façon à mieux se conformer au fait que le Roi ne fut blessé qu’à un seul oeil. P. Lemesurier ne suit pas Garencières et traduit le français de l’édition Macé Bonhomme 155550 :

The younger lion shall surmount the old
Midst martial battlefield in a single duel
His eyes he’ll put out in a cage of gold
Two forces joined - and then a death most cruel.

   Edgar Leoni51 explique qu’ “according to the popular interpretation, two fractures, hence two wounds”. La traduction anglaise de “classes” par “fleets” a au moins le mérite de l’honnêteté alors que beaucoup de ceux qui lisent “classes” ne songent nullement à une flotte.

   Rappelons que ce quatrain n’est pas commenté dans le Janus Gallicus, ce qui en dit long sur son prétendu impact à la mort d’Henri II ; il ne sera interprété dans ce sens qu’au début du XVIIe siècle. Nous avons là une illustration frappante de l’influence des exégètes des années 1650-1670 - et donc pas seulement du Janus Gallicus - sur les éditions des Centuries telles qu’elles paraîtront dans la seconde moitié du XVIIe siècle.

   En fait, si l’on admet que le véritable lancement des Centuries eut lieu dans la seconde moitié du XVIIe siècle, avec des éditions accompagnées de commentaires, ce qui n’avait pas été le cas pendant la première moitié du siècle ni à la fin du siècle précédent, force est de constater qu’il fut sensiblement favorisé par des retouches de ce type, figurant dans les éditions hollandaises de 1667 et 1668 :

   “Mort d’Henry II. en courant la lance avec Gabriel de l’Orge (Montgomery) en la mesme année (1559, Cent. I, qu. 35” (“Observations sur les Prophéties de M. Michel Nostradamus”).

   Par une certaine ironie du sort, on peut dire que les Centuries devront beaucoup à la Hollande : non seulement on y publie les premières éditions comportant frontispice des prédictions accomplies et commentaires dans les années 1667-1668 mais quelques années plus tard, alors que la France et la Hollande seront en guerre, les Centuries serviront la propagande française contre les Provinces Unies, au travers des Commentaires du chevalier de Jant.

   Le même quatrain est signalé dans les “Remarques Curieuses sur les Centuries de Michel Nostradamus” du chevalier de Jant, avec la version “playes” et non “classes” de I, 35. (Rouen, J. B. Besongne, Rouen, 1691 et 1710 et Antoine Besson, Lyon, vers 1691). Ces deux éditions comportent un frontispice célébrant les événements de Londres à l’instar de l’édition d’Amsterdam 1668 On notera cependant qu’une coquille s’est glissée dans les éditions rouennaises : dans le commentaire, le quatrain 35 est devenu le quatrain 32.

   Il faudrait donc éviter de se servir du quatrain sous sa forme “classes”, qui est probablement celle de la première mouture pour expliquer son succès alors qu’il était passé à la forme “playes”.

Les noms de famille en clair

   On ne parle pas ici de noms de villes, sauf si ces noms désignent aussi des familles célèbres, pas question non plus des anagrammes pourtant souvent bien transparents : Chiren, Nirazam, Robin, Mendosus, Norlaris ou de noms communs pouvant désigner éventuellement une personne ; il n’est pas non plus question de simples prénoms ou de personnages de l’Antiquité. Notre propos consistera ici à recenser des mentions beaucoup plus directes et guère univoques, encore que cela puisse viser de grandes familles qui se succèdent d’un règne à l’autre.

   L’on pourrait aussi parler, au quatrain 19 de la même Centurie du “Grand de Lorraine par le Marquis du pont” ; il s’agirait du Marquis de Pont à Mousson, fils du Duc de Lorraine.52 Ajoutons le quatrain VII, 9 “Entre les mains du grand prince Barroys”, Barrois équivalent ici à Lorraine. Un tel luxe de précisions est vraiment tout à fait inhabituel et est bel et bien en contradiction avec tant de précautions prises par ailleurs, en d’autres Centuries. On a déjà noté, en une autre étude, l’étrange cohabitation entre les anagrammes Mendosus et Norlaris dans la Centurie IX et, un peu plus loin, tel le 18e quatrain de la X, portant en toutes lettres Vendôme et Lorraine, pourquoi, donc, un tel décalage ?

   Et nous pourrions aussi nous interroger sur le quatrain portant tout simplement le nom du “grand Montmorency”, en IX, 18. Dont les commentateurs du XVIIe siècle veulent qu’il y ait été annoncé l’exécution de 1632 d’Henri de Montmorency.

   Il existe ainsi un certain type de quatrain qui ne s’embarrasse d’aucune précaution comme ce quatrain apocryphe, figurant dans l’édition Besson (p. 142) : “Et de trop près le suivera (sic) de Thou” et qui fait l’objet d’un commentaire adéquat (pp. 207 - 208) on nous renvoie à la “conspiration tramée contre l’Etat par Messieurs de saint Marc & de Thou & qui se termina à ce qu’ils furent l’un & l’autre decapitez”. François de Thou fut exécuté en 1642.

   Nous ne pouvons nous empêcher de penser que cette façon de procéder est suspecte et qu’elle correspond avec un style prophétique tardif qui tend à se mâtiner plus directement d’enjeux politiques, ce qui expliquerait d’ailleurs la tendance à censurer certains quatrains.53

   Nul doute que la présence de noms aussi clairement indiqués n’ait contribué à renforcer le prestige de Nostradamus. Voilà donc un prophète qui était capable de camper en les nommant “en clair” ces deux adversaires acharnés que furent, durant les années 1550, le duc d’albe et celui de Guise, que ce soit devant en Lorraine ou en Italie, dans le quatrain VII, 24 et qui fait figurer le nom de Montmorency également sans recours au moindre anagramme. En même temps, on se rend compte que certaines centuries (I-III) ne se révèlent pas aussi généreuses pour ne pas parler des Présages.

   Edgar Leoni54 appelle thèse de la retroactive prophecy l’argument des “critiques” qui relèvent que certains quatrains ont été composés après l’événement qu’ils sont censés avoir annoncé. Il fait remonter cette thèse à 1724, dans des articles du Mercure de France. Leoni a bien de la peine, cependant, à expliquer ce que font Guise et Albe dans le même quatrain sans éveiller un soupçon de prophétie faite après coup.55

Différences d’inspiration entre Centuries

   Revenons sur la question abordée, au début de notre étude, à savoir la présence de noms de personnages dans les quatrains centuriques mais aussi dans les sixains. On sait que c’est cette présence qui a contribué à disqualifier les éditions des Centuries comportant l’anagramme Nirazam pour Mazarin, à la Centurie VII, mais aussi Robin pour Biron, pour la série des 58 sixains. Mais que dire dans ce cas de la présence du nom de Montmorency, au 18e quatrain de la Centurie IX, juste avant le quatrain comportant le nom de Varennes.

IX, 18
Le lys Dauffois portera dans Nansi
Iusques en Flandre electeur de l’Empire
Neufve obturée au grand Montmorency
Hors lieux prouvez delivre à clere peine.

   Ce quatrain est commenté dans l’édition Amsterdam 1667 comme étant relatif à l’exécution d’Henri de Montmorency survenue en 1632 (“Observations sur les Prophéties de M. Michel Nostradamus”) :

   “Mort du Duc de Montmorency, exécuté par un nommé Clerpegne. Cent. 9. Qu. 18”56

   En revanche, plus vraisemblablement, il s’agit d’un précédent Montmorency, contemporain de Nostradamus, comme le signale P. Lemesurier, “Constable Anne de Montmorency had been captured by the Spaniards at the disastrous Battle of St- Quentin and would not be released from prison, far away in Spain, until after the Treaty of Cateau-Cambrésis had been signed on the then border with Flanders in 1559. In 1557-8, Nostradamus fears a more sinister fate for him, though“57, soit un aïeul de l’autre. On voit donc qu’un même nom propre peut faire sens d’un siècle à l’autre, en raison de l’importance de certaines grandes familles sous l’Ancien Régime.

   Quid encore des anagrammes Mendosus (Vendôme, Bourbon) et Norlaris (Lorraine / Guise) qui ne figurent pour le premier que dans la Centurie IX (45 et 50) et pour le second en VIII, 60 et IX 50 ? En X, 18, on a d’ailleurs carrément : “Le ranc Lorrain fera place à Vendosme”, ce qui peut sembler étonnant car à quoi bon user d’anagrammes pour finir par dire les choses en clair, quelques quatrains plus loin ? Apparemment, cela ne choque pas Jean Aimé de Chavigny qui enchaîne quatrains cryptés (Mendosus et Norlaris) et non cryptés (Vendosme et Lorraine), ce qui pour notre part ne laisse de nous paraître suspect et sens la retouche, le mieux étant l’ennemi du bien58 :

MENDOSUS tost viendra à son haut règne
Mettant arrière un peu le NORLARIS etc.


(Cent. 9 qua. 50). Voyez Monseigneur comme ce Prophète persiste à son propos & dit sans doubte sa Majesté (Henri IV) parviendra à son haut règne & exaltation : en rejetant tous ceux qui luy voudront contrarier, mesmes les Princes Lorrains qu’il entend par Norlaris (...) Que sadite Majesté dechassera lesdits Princes Lorrains, cela est clair non seulement par ce presage (sic), Cent. 10. Qua.18.

Le rang Lorrain fera place à Vendosme mais par une infinité d’autres etc.“

   Il y a là coexistence d’un registre crypté et d’un registre “en clair” qui selon nous fait problème et en tout cas révèle un changement de stratégie au niveau de la communication qu’il serait vain de nier et qui renforce le sentiment d’hétérogénéité de l’ensemble centurique.

   En vérité, un certain nombre de signes ne conduisent-ils pas à penser que les centuries VIII-X n’ont pas forcément la même inspiration que les centuries I-III / IV ? Le ton politique du groupe VIII-X nous semble plus marqué, nous l’avions déjà souligné à propos de revendications comme “Le Roy de Bloys dans Avignon régner” (VIII, 38, VIII, 52, IX, 41). C’est également dans ce groupe que se situe le fameux quatrain relatif à l’exécution du Roi d’Angleterre en 1649 à savoir le quatrain IX, 49 (“Sénat de Londres etc”). Mais ce verset est déjà attesté par Crespin en 1572 (“A mes Imprimeurs de Hongrie”) comme d’ailleurs celui de Varennes (“A Monsieur de Ioyeuse”). Ajoutons la référence au Cardinal de France (VIII, 4) - “Le Cardinal de France apparoistra” se retrouvant dans CAR PAR NERSAF (VIII, 67). Un autre célèbre quatrain appartient à la IXe : “De castel Franco sortira l’assemblée /..../ Ceux de Ribière seront en la meslee etc” (16). En ce qui concerne Saint Quentin, on a VIII, 54 ; IX, 29 ; IX, 40 même si on a IV, 8, qui n’appartient pas au premier noyau I-III mais à une partie additionnelle. Les références à Philippe II d’Espagne sont également liées à ce groupe de Centuries (VIII, 81 ; IX, 30 ; IX, 89 ; X, 7). Quant au quatrain relatif à la mort de François II, ce n’est autre que X, 39 : “Premier fils vesve malheureux mariage /...../ Avant dix huict incompetant eage.” Nous avons également signalé le cas de X, 64 : “Changer le siege pres de Venise d’advance / Lors que Colonne à Rome changera.” N’oublions pas enfin en X, 72, le quatrain de l’éclipse de 1999 : “L’an mil neuf cens nonante neuf sept mois etc.” Enfin, nous avions déjà fait remarquer que le recours à la Guide des Chemins de France de Charles Estienne concernait essentiellement les Centuries VIII-X.

   Tout se passe comme si les Centuries dites VIII-X avaient une qualité prophétique plus forte, plus parlante, que les Centuries I-III et que c’était largement grâce à elles que le processus centurique avait si bien fonctionné, que le soufflé vaticinatoire était réussi. Dès lors, il nous apparaît que les auteurs des deux premiers groupes de trois Centuries, formant un premier ensemble à six centuries (I-III et VIII-X), ne serait pas une seule et même personne, ce qui fait voler en éclat la thèse de Nostradamus auteur de l’ensemble. Par ailleurs, bien des éléments propres à ce groupe concernent des événements postérieurs à 1555 comme la mort de François II survenue en 1560 ou le sort d’Anne de Montmorency, à partir de 1557, à Saint Quentin, voire la rivalité entre Bourbon et Guise, à partir de la mort d’Henri II. en 1559 ou encore l’avènement de Philippe II au trône d’Espagne en 1556. En gros, les Centuries I-III seraient plus vagues dans leur propos - même si l’on y trouve le quatrain I, 35 “Le lyon ieune le vieux surmontera” - mis en rapport, de façon d’ailleurs discutable, ne comportant notamment aucun nom propre - avec la mort du “Roi Henry” ; comme on le désigne dans certaines chroniques comme celle de Surius, et ressembleraient davantage aux Présages alors que les Centuries VIII-X se rapprocheraient davantage du style des sixains. En fait, les Centuries I-III se prêteraient mieux à la forme des vaticinations perpétuelles, de par leur caractère plus abstrait, donc susceptible de rendre compte d’événements fort divers tandis que les Centuries VIII-X s’enracinent bien plus fortement dans le XVIe siècle, notamment en raison de noms propres comme Montmorency ou Vendôme, dont la présence n’est a priori pas souhaitable pour un voyage à travers les siècles, impliquant un texte moins marqué ; imaginons en effet, par l’absurde, que l’on veuille appliquer les centuries à une autre époque dans le passé - ce qui semble être leur projet en tant que vaticinations perpétuelles, “pour de longs siècles”, selon la formule finale du “Brief Discours de la Vie de Michel de Nostredame”, par exemple à l’Antiquité, que ferait-on donc de cette mention de Montmorency ou de Guise ?

   Le cas de Montmorency, en IX, 18, a fait couler beaucoup d’encre : certains y voient Anne de Montmorency, devant Saint Quentin, en 1557, d’autres Henri de Montmorency et la conjuration de 1632 avec Gaston d’Orléans, frère de Louis XIII. Rappelons que le nom de Montmorency figure aussi à la fin de l’Epître à Henri IV, introduisant les sixains, en date de 1605, au Château de Chantilly, maison de la famille Montmorency, propriété qui lui sera confisquée après 1632 au bénéfice de la famille Condé. On ne peut d’ailleurs tout à fait exclure que ce quatrain IX, 18, sous cette forme, puisse dater d’après 1632, tant la datation des éditions conservées du second volet centurique, généralement non daté, de surcroît, reste problématique avant les années 1630, l’édition d’un seul tenant datée de 1605 était à l’évidence sensiblement plus tardive, du fait qu’elle contient les sixains qui n’avaient pas de raison d’être avant la mort d’Henri IV en 1610, en dépit de la date de 1605 figurant sur l’Epître adressée au dit Henri IV. Nous avons montré59 s’agit là d’une épître remaniée ayant initialement servi à introduire d’autres textes (pseudo) nostradamiques.

   Certains commentateurs de IX, 18 sont allés60 jusqu’à chercher dans Clere peine, au dernier verset, le nom du boureau qui exécuta le duc. C’est dire à quelle conception de la lecture des quatrains on avait fini par parvenir, laquelle est également fort manifeste dans les sixains, lesquels étaient par ailleurs accompagnés d’une clef.61 On en arrive évidemment à soupçonner de telles mentions d’être réalisées post eventum à l’intention d’un public ne se contentant plus d’interprétations de quatrains assez vagues mais désireux de textes plus précis, donc plus convaincants mais de moins en moins attribuables à Nostradamus.

   Une telle dérive vers un surcroît de détails, qui ne laisse plus guère de place à l’interprétation, aura suscité la censure notamment de la VIIe centurie, dans les éditions parisiennes de la Ligue. Une telle dérive, nous avons pu la constater par ailleurs dans le champ astrologique62, où la marge de manoeuvre de l’interprète est de plus en plus réduite, du fait du thème natal qui vient prolonger et interférer abusivement avec les configurations générales.

Jacques Halbronn
Paris, le 8 mars 2004

Notes

1 Cf. nos derniers travaux à la rubrique Astrologica, Encyclopaedia Hermetica. Retour

2 Cf. J. Steinmann, La critique devant à la Bible, Paris, Fayard, 1956. Retour

3 Voir Site www. BNF.fr, à la bibliothèque numérique, Gallica. Retour

4 Cf. Chomarat, Bibliographie Nostradamus, Baden-Baden, 1989, p. 40. Retour

5 Cf. notre article “Une attaque réformée oubliée contre Nostradamus (1561)”, Réforme, Humanisme, Renaissance, 33, 1991. Retour

6 Cf. E. Leoni, Nostradamus and His Prophecies, op. cit., pp. 57 et seq, O. Millet, “Feux croisés sur Nostradamus au XVIe siècle“, Divination et controverse religieuse en France au XVIe siècle, Cahiers V-L Saulnier, 4, 1987. Retour

7 Cf. les travaux de R. Benazra et de P. Brind’amour concernant les variantes pour les 353 premiers quatrains centuriques, sur la base de l’édition Macé Bonhomme, 1555, et les éditions critiques de Torné Chavigny et de Le Pelletier prenant pour base l’édition P. Rigaud 1566. Retour

8 Cf. Présages de Nostradamus, Paris, Seuil, 1999. Retour

9 Cf. “Différences orthographiques”, pp.14 - 16. Retour

10 Cf. Documents Inexploités sur le phénomène Nostradamus, Feyzin, Ed. Ramkat, 2002. Retour

11 Cf. RCN, pp. 248 - 249. Retour

12 Cf. BNF Lb37 3638A. Retour

13 Cf. Giffré de Rechac, BS Deux playes une pour mourir mort cruelle. Retour

14 Cf. The Unknown Nostradamus, Alresford, J. Hunt, 2003, pp. 81 - 82. Retour

15 Cf. notre étude sur Lichtenberger, Cura.free.fr. Retour

16 Cf. notre étude sur Espace Nostradamus. Retour

17 Cf. l’édition Barbe Regnault avec addition de 39 “articles”, si l’on se base sur ce qu’en disent les éditions parisiennes de la Ligue. Retour

18 Cf. Edition Chevillot à 39 quatrains à la VII. Retour

19 Cf. M. Dufresne, Dictionnaire Nostradamus, définitions, fréquence et contextes des six mille mots contenus dans les Centuries etc, Ottawa, 1989. Retour

20 Cf. Nostradamus and His Prophecies, op. cit., p. 620. Retour

21 Cf. notre étude sur le Site Cura.free.fr. Retour

22 Cf. notre étude sur les Centuries et les Années 1570, sur Espace Nostradamus. Retour

23 Collection Ruzo, décrite in RCN, pp. 122 - 123. Retour

24 Cf. aussi Chomarat, Bibliographie Nostradamus, Baden-Baden, 1989, pp. 77 - 78. Retour

25 Cf. RCN, p. 125. Retour

26 Cf. 1605, Ed. P. Du Ruau, non datée, paraissant avec le Recueil des Prophéties et Révélations, Rouen 1649, Leyde 1650, Amsterdam, 1667, 1668, etc. Retour

27 Cf. RCN, p. 125. Retour

28 Cf. RCN, pp. 51 - 52. Retour

29 Cf. Nostradamus. A Life and Myth, Londres, Element, 2003, pp. 329 - 332. Retour

30 Cf. Bibliographie Nostradamus, n° 47, p. 35. Retour

31 Cf. Testament de Nostradamus, Monaco, Le Rocher, 1982, pp. 355 - 356. Retour

32 Cf. RCN, p. 52. Retour

33 Cf. Présages de Nostradamus, Paris, Seuil, 1999. Retour

34 Cf. Documents Inexploités sur le phénomène Nostradamus, op. cit. Retour

35 Cf. nos études sur Espace Nostradamus. Retour

36 Cf. RCN, pp. 118 et seq. Retour

37 Cf. Nostradamus, astrophile, Ottawa, 1993. Retour

38 Cf. RCN, pp. 172 - 173. Retour

39 Cf. RCN, pp. 120 - 121. Retour

40 Cf. Oracles, 1867. Retour

41 Cf. E. Leoni, Nostradamus and his Prophecies, op. cit., p. 608. Retour

42 In Nostradamus, Life and Literature, New York, Exposition Press, 1961, pp. 7 et seq. Retour

43 Cf. B. Chevignard, Présages de Nostradamus, Paris, Seuil, 1999, p. 196. Retour

44 Cf. M. Chomarat, Bibliographie Nostradamus, op. cit., p. 36, notice 49. Retour

45 Cf. sur ce sujet notre réponse au dossier CURA 26. Retour

46 Cf. B. Chevignard, Présages de Nostradamus, op. cit., pp. 132 - 133. Retour

47 Cf. notre étude sur “les cadavres exquis des almanachs de Michel de Nostredame”, sur Espace Nostradamus. Retour

48 Cf. Eclaircissement, p. 386. Retour

49 Cf. The true prophecies or Prognostications of Michael Nostradamus, Londres, 1672, p. 24. Retour

50 Cf. Nostradamus, The illustrated Prophecies, Arlesford, J. Hunt, 2003, p.17. Retour

51 Cf. Nostradamus and his Prophecies, op. cit., pp. 141 et 575 - 576. Retour

52 Cf. E. Leoni, Nostradamus and His Prophecies, op. cit., p. 676. Retour

53 Cf. notre étude sur la censure au sein du corpus nostradamique, sur Espace Nostradamus. Retour

54 Cf. Nostradamus and his Prophecies, op. cit., p. 66. Retour

55 Cf. Nostradamus and his Prophecies, op. cit. Pp 676 - 677. Retour

56 Cf. aussi G. Ashe, The Book of Prophecy, op. cit., p. 142. Retour

57 Cf. Nostradamus, the illustrated Prophecies, Winchester, 2003, p. 308. Retour

58 Cf. Janus Gallicus, Epistre à Alphonse d’Ornano, pp. 285 - 286. Retour

59 Cf. DIPN, Documents Inexploités, op. cit. Retour

60 Cf. E. Leoni, Nostradamus and His Prophecies, op. cit., p. 62, note 8 et pp. 718 - 719. Retour

61 Cf. DIPN, op. cit. Retour

62 Cf. nos études dans la rubrique Astrologica, sur Encyclopaedia Hermetica, “Obstacles épistémologiques en astrologie mondiale”. Retour



 

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